Des suites à suivre !

Parue en 2007 chez Paquet — sous le titre « Michelle : les mystères de l’Est » —, cette première bande dessinée due à Olivier Marin — avant le succès incontestable de son second ouvrage (le tome 1 des « Enquêtes auto de Margot ») qui le révélera au grand public — est passée un peu inaperçue au milieu de la pléiade d’albums sortis, ceci malgré un prix au festival de Moulins. Voilà que, 17 ans plus tard, les éditions Original Watts ont la bonne idée de redonner une chance aux aventures de Michelle : une étudiante en droit qui se retrouve, en 1963, dans l’univers du renseignement et de l’espionnage, en intégrant le SDECE. Ceci, grâce à un bel album de 88 pages proposant l’histoire d’origine augmentée d’un prologue inédit et éclairant de 11 pages, ainsi que d’un épilogue original de deux planches, le tout agrémenté d’un copieux cahier graphique : un sketchbook, comme on dit maintenant !

Les vacances approchent et, pour occuper le temps libre des enfants, rien ne vaut que de les plonger dans de bonnes séries de bandes dessinées. Nous profitons de cette chronique pour vous rappeler la qualité de quelques séries récentes. Séries dont nous avons déjà eu le plaisir de signaler l’excellente tenue des tomes précédents. Excellence toujours présente dans les volumes sortis en ce printemps et début d’été. Des suites à suivre, donc !

Aliénor Mandragore T2 Trompe-la-Mort

Nous signalions, en octobre 2015, tout le bien que nous pensions du premier volume d’« Aliénor Mandragore ». Séverine Gauthier y revisite avec humour et fraîcheur la légende arthurienne, ou tout du moins les relations entre l’enchanteur Merlin, la fée Morgane et Viviane : la dame du lac. Elle retrouve, pour cette trilogie, son complice sur la série « Washita » : Thomas Labourot, lequel met en images de manière dynamique, avec un style personnel, coloré, vif et expressif, ce conte médiéval décalé, modernisé avec malice.

On retrouve dans « Trompe-la-mort » (le deuxième volume de la série), toutes les qualités du tome précédent. La jeune et vive Aliénor doit quitter la forêt de Brocéliande, pour la première fois, aidée par un tout jeune écuyer : le tendre Lancelot. À la suite d’une prophétie de Viviane, la dame du lac, les deux jeunes gens partent pour les monts d’Arrée d’où ils rapportent un champignon : le troublant « Trompe-la-mort ».

: Aliénor Mandragore T2 case page 10

Peut-être l’occasion pour le fantôme de Merlin, de tenir l’Ankou définitivement éloigné de lui. Cette personnification de la mort ne supporte plus l’arrogance de l’enchanteur qui se croit plus fort qu’elle. Elle a fait de la capture de l’âme de Merlin une affaire toute personnelle !

: Aliénor Mandragore T2 page 27

L’édition de cette série est particulièrement soignée par les éditions Rue de Sèvres, avec une présentation des personnages et un faux journal – « L’Écho de Brocéliande » — qui encadrent les 44 pages d’une bande dessinée gentiment délirante destinée à de jeunes lecteurs, dès leurs 10 ans.

Bien plus loin dans le passé que les légendes médiévales arthuriennes, la mythologie égyptienne est traitée avec un humour décapant par Matthieu Roda dans le tome 2 de « Râ & cie ». Vous retrouverez ici, notre chronique sur le tome 1.

: Pages de garde Râ et Cie T2

Le jeune auteur niortais continue d’explorer, avec un humour jubilatoire, la riche cosmogonie du panthéon égyptien. Il narre en s’amusant, et en nous amusant encore davantage, les mésaventures de Râ : le dieu des dieux égyptiens, complètement dépassé par sa progéniture. Aussi, tout en poursuivant la création de l’Univers, l’égocentrique Dieu du soleil doit ramener le calme au sein d’une famille pour le moins colérique. Mission pharaonique à la démesure de l’ego du premier des dieux.

Le panthéon de l’une des plus anciennes civilisations est rendu accessible à un public de jeunes lecteurs par un humour omniprésent et un dessin simple qui rappelle celui que l’on retrouve dans les temples égyptiens. À force de calembours, de clins d’œil anachroniques et de blagues de potaches, l’auteur nous rend sympathique l’ensemble des premiers dieux égyptiens.

Râ et Cie T2 bandeau page 15

Son dessin aux couleurs éclatantes, sans perspective, avec des personnages représentés de face et la tête de profil, copie sans le caricaturer celui que l’on connaît de l’Égypte des premières dynasties. De quoi s’instruire à s’amusant, surtout avant la rentrée en classe de sixième avec l’Égypte antique de nouveau au programme !

Un petit mot sur l’un des chouchous de cette rubrique — la preuve ici, ici et encore ici —, à l’occasion de la sortie du dix-septième volume de « L’Ours Barnabé ». Depuis le début des années 1980, cette série a su séduire un vaste lectorat, des plus jeunes aux plus âgés, par son humour parfois nonsensique si particulier. Cet humour, non dénué de réflexion et de poésie, est en grande partie visuel, basé sur un graphisme simple et dépouillé.

: Barnabé T17 page 3

Les aventures de Barnabé, l’ours philosophe, offrent une vision du monde à la fois drôle et poétique. Avec son ami le lapin, ils parlent avec les animaux, font des commentaires sur la nature et ont des idées (malicieuses) sur tout. Ils observent avec humour le ciel, les arbres, les plantes et jouent avec leurs amis.

: Barnabé T17 page 5

Philippe Coudray fait preuve d’un art consommé du décalage et d’une grande concision, pour faire vivre en une page, à son ours débonnaire, des aventures toujours empreintes d’une douce spiritualité : que ce soit pour ranger les pierres par ordre de taille, se consoler d’un cambriolage ou sortir du labyrinthe du Minotaure ! Un pour tous, tous avec Barnabé !

le chien Rocky

Autre animal familier de la rubrique jeunesse de BDzoom.com, le très futé Rocky. Ce petit chien accompagne un groupe d’enfants de leurs domiciles à l’école et suit leurs tourments plus ou moins graves ; de la volonté de posséder un animal domestique à la nécessité de maîtriser le code de la sécurité routière et de l’apprentissage de la démocratie avec l’élection du délégué de classe aux difficultés de vivre en groupe.

: Rocky T6 page 10

Dans le sixième volume de « Rocky & cie », c’est l’apparition soudaine du premier amour qui est traité avec une grande finesse. Découverte de sentiments forts, difficultés d’en parler, premiers chagrins d’amour sont les thèmes abordés par le scénariste, Stephan Valentin, docteur en psychologie et spécialiste de l’enfant et de l’adolescent.

Après un récit de fiction bien mené, le psychologue propose toujours solutions et conseils de manière simple et pratique. Les jeunes lecteurs prendront plaisir à lire la courte BD, dessinée dans un style coloré volontairement naïf, et poursuivront leur apprentissage du bien-vivre ensemble avec les conseils avisés des trois pages du « Blog de Rocky ».

Les ouvrages de cette collection destinée aux lecteurs à partir de 6 ans savent être pédagogiques sans utiliser un ton moralisateur rébarbatif. Vous pouvez retrouver les références des nombreux ouvrages sur l’enfance de Stephan Valentin sur son site internet : www.stephan.valentin.com.

: Le blog de Rocky

Les animaux sont les grandes vedettes de cette chronique : après un ours et un chien, nous pouvons convoquer l’ensemble des poissons et des mollusques pour le quatrième tome de l’excellente série à l’humour didactique qu’est « Les Animaux marins en bande dessinée ». Toutes les qualités déclinées dans la rubrique consacrée au tome 3 sont toujours d’actualité pour le tome 4. À noter, après les planches-gags scénarisées par Christophe Cazenove et dessinées par Jytéry, la présence en fin d’album d’un dossier de six pages sur le rôle des aquariums, avec un focus sur ceux de la porte dorée à Paris, du Croisic, de La Rochelle et de Lyon.

: Ogres et Cie page 7

Projet de couverture Ogres et Cie

Un dernier mot, enfin, sur l’univers original d’un auteur alsacien. Nous vous avons présenté de manière fort élogieuse le précédent album de Vincent Wagner, « Cromalin et Cromignonne ». « Ogres et cie » est aussi une suite d’histoires courtes de cinq à quatorze pages dans lesquelles des personnages en ombres chinoises se déplacent devant un décor simplifié rehaussé de quelques touches de couleurs.

Ce beau théâtre d’ombres, sans paroles, avec quelques monstres, du Loch Ness notamment, et un ogre bien naïf, est propice à faire travailler l’imagination de jeunes et même de très jeunes lecteurs, dès leur 4 ans.

: Ogres et Cie page 9

Après ce rappel des séries jeunesse que nous avons beaucoup appréciées cette année, nous nous intéresserons la semaine prochaine — Euro oblige ! — aux bandes dessinées jeunesse qui traitent de football.

Laurent LESSOUS (l@bd)