Dans le cinquième volume de ses aventures, « Le Grimoire d’Elfie T5 : Les Reflets de Walpurgis », la jeune Elfie découvre le marais poitevin (entre La Rochelle et Niort) et des festivités réservées aux magiciens et sorcières depuis le temps de la mystérieuse fée Mélusine. Une nouvelle enquête pour la jeune adolescente, avec l’apport non négligeable de son grimoire magique, à l’issue de laquelle elle en aura appris beaucoup sur les dangers contemporains qui guettent cette zone humide remarquable et sa propre famille.
Lire la suite...La communauté formatrice d’Emmanuel Lepage !
Pourquoi les parents du talentueux dessinateur Emmanuel Lepage, famille issue d’un milieu modeste, ont-ils choisi de former une communauté, avec cinq autres couples ? C’est à cette question quasi existentielle pour lui que le Grand Prix du festival Quai des bulles de Saint-Malo (en 2012) et Grand Boum de la ville de Blois (en 2018), nommé aussi peintre officiel de la Marine depuis septembre 2021, s’est mis en quête de répondre : ayant accumulé, depuis au moins 20 ans, toute une documentation sur le sujet. Cette quête de la vérité débouche, aujourd’hui, sur un ouvrage monumental de 300 pages, où l’auteur donne de nombreuses clés pour définir ces liens qui peuvent unir des hommes et des femmes — et même l’humanité dans son ensemble —, mais également pour mieux comprendre ses précédents albums. (1)
De l’âge de cinq ans à celui de neuf, celui qui sera aussi Grand Prix de la Critique 2017 (pour « Les Voyages d’Ulysse ») a donc vécu en communauté, avec son père et sa mère, dans une indivision non loin de Rennes, au début des années 1970, et il a toujours su qu’il exposerait un jour cette expérience den BD : « Pour mes parents, il s’agissait d’une démarche intellectuelle, spirituelle et philosophique. Je me suis rendu compte que dans tous mes livres, la vie en communauté transparaît. Il m’a fallu du temps pour trouver la forme narrative pour raconter cette histoire-là… »
Né en 1966, Emmanuel, qui est désormais l’un des plus grands auteurs de la bande dessinée contemporaine, vit toujours en Bretagne, dans les Côtes-d’Armor. L’âge avançant, il a eu besoin de comprendre pourquoi, dans la mouvance des colonies libertaires post-soixante-huitardes (mais c’est encore le cas aujourd’hui avec les habitats partagés ou participatifs), des gens ont inventé d’autres façons d’être ensemble et pourquoi cette tentative le touche si profondément.
En partant de son récit familial, il s’est ainsi mis à interroger, à écouter, et à plonger dans ses souvenirs pour, finalement, retracer une histoire sociale de la France des années 1960 et 1970, sans fard ni artifice. Par ailleurs, cette émouvante approche de l’intime vers l’universel explique, aussi, les principaux questionnements qui traversent son œuvre : l’enfance, le partage, l’engagement, la transmission…
Les parents d’Emmanuel étaient ce que l’on appelle des chrétiens de gauche, appartenant à un mouvement de réflexion philosophique et d’engagement. Ils ont rencontré dans ce groupement d’autres gens venus de milieux tous différents, lesquelles partageaient les mêmes valeurs qu’eux. Alors qu’ils se connaissaient à peine, ils ont toutefois décidé, un beau jour, de créer ensemble une communauté spirituelle où chacun va devoir s’entraider sur un domaine composé de six maisons, dont la plus grande partie était dédiée à un usage collectif : chaque famille ayant, quand même, son propre espace privé.
Cependant, malgré tous les bons côtés de cette vie partagée, ils finiront par la quitter : et ce fut un déchirement pour l’enfant qu’était encore Emmanuel. Il s’est, d’ailleurs, longtemps interrogé également sur les raisons de leur départ. C’est lors de son enquête préliminaire, en discutant avec les uns et autres et en découvrant les écrits de l’époque qu’ils avaient précieusement gardés, qu’il en a seulement compris les principales allégations. Leurs doutes sur l’éducation et leurs manques de confiance en eux les avaient placés, d’emblée, dans un rapport d’infériorité sociale, par rapport aux autres parents qui étaient issus de milieux plus bourgeois ou plus cultivés : « Ton projet me donne des sueurs froides… Tu aurais pu attendre qu’on soit morts… À la sortie de ton livre, on prendra de longues vacances, loin de tout, de nos amis, de nos voisins ! » n’hésitera pas à déclarer le père d’Emmanuel à son fils, quand il aura connaissance du souhait de ce dernier de transposer cette partie de leur vie en bande dessinée.
Pourtant, en dévoilant tous ces secrets de famille dans ce qui est son ouvrage le plus personnel, Emmanuel Lepage a réalisé, avec « Cache-cache bâton », ce qui restera certainement comme son grand œuvre !
(1) Voir aussi sur BDzoom.com : « Ar-Men, l’enfer des enfers » par Emmanuel Lepage, « Les Voyages d’Ulysse » d’Emmanuel Lepage (avec Sophie Michel & René Follet) : Grand Prix de la Critique ACBD 2017 !, « Les Voyages d’Ulysse » par Emmanuel Lepage, René Follet et Sophie Michel, « La Lune est blanche » par Emmanuel Lepage et François Lepage, « Un Printemps à Tchernobyl » par Emmanuel Lepage, « Voyage aux îles de la Désolation » par E. Lepage…
« Cache-cache bâton » par Emmanuel Lepage
Éditions Futuropolis (29,90 €) — EAN : 978-2-7548-2796-6