Dix ans après la parution de « Résurrection », la première partie d’un diptyque accouché dans la douleur, voici enfin « Révélations » : conclusion du dernier récit du regretté Philippe Tome, décédé alors qu’il travaillait sur les dernières pages de son scénario. Les éditions Dupuis proposent, enfin, l’intégralité de cette aventure magistralement dessinée par Dan Verlinden, digne successeur de ses deux prédécesseurs : Luc Warnant et Bruno Gazzotti.
Lire la suite...Fidèle et lumineuse mise en BD de l’un des best-sellers de Guillaume Musso par Miles Hyman !
Quand est sorti le roman « La Vie secrète des écrivains » (chez Calmann-Lévy, en 2019), Guillaume Musso, l’un des auteurs les plus lus en France, a eu l’envie de voir des images l’accompagner, alors qu’il avait, jusque-là, refusé tout projet d’adaptation de ces ouvrages. Il pense d’emblée à Miles Hyman (1), illustrateur de renommée mondiale dont il avait été ébloui par sa version de la « Loterie » de Shirley Jackson, et il lui écrit aussitôt pour lui proposer de lui confier l’interprétation graphique de cet angoissant thriller sur l’écriture et l’univers de la littérature. Le dessinateur d’origine américaine — qui vit en France depuis de nombreuses années — a tout de suite vu le potentiel visuel de l’histoire et nous offre, aujourd’hui, une somptueuse bande dessinée de 180 pages fourmillant de peintures envoûtantes, et dont l’impeccable narration est aussi efficace que celle du livre de départ : habile mélange de fiction et réalité, où tout est réuni pour nous bluffer.
Qu’est-ce qui a pu arriver à Nathan Fawles, auteur franco-américain à succès — en pleine fleur de l’âge — de trois ouvrages autant plébiscités par la critique que par les lecteurs, pour qu’il décide de mettre subitement fin à sa carrière d’écrivain ? S’étant retiré du monde sur la petite et sauvage île méditerranéenne de Beaumont depuis bientôt 20 ans (avec son chien pour seule compagnie), il n’a plus jamais publié le moindre texte, ni accordé d’interviews aux médias. Bien des reporters, échotiers ou paparazzis ont essayé de percer « le mystère Fawles », mais tous s’y sont cassé les dents. D’autant plus que ceux qui tentent de pénétrer chez lui sont reçus à coup de fusil. C’est même arrivé à un aspirant-écrivain, à qui les maisons d’édition ont toutes retourné le manuscrit, avide de conseils pour améliorer son écriture, au péril de sa vie. Récemment embauché à la seule librairie de l’île — dont le propriétaire, réfractaire à tout ce qui n’est pas selon lui de « la vraie littérature », compte bien mettre la clé sous la porte à la fin de l’année —, le jeune homme ne se décourage pas pour autant. Par ailleurs, une jolie journaliste suisse, certainement plus rusée que d’autres, réussit, elle aussi, à rencontrer l’écrivain.
Le décor est planté et, bien entendu, c’est là que tout bascule… Le même jour, le cadavre d’une femme est retrouvé à Beaumont et s’en est bien fini de la tranquillité de cette petite île que les autorités ont décidée de complètement boucler : les habitants étant désormais assignés à résidence… Commence alors de dangereux face-à-face, où se heurtent vérités occultées et mensonges assumés… Mais qu’on ne s’y trompe pas, si l’ouvrage distille du mystère en permanence, il nous questionne surtout sur les motivations et affres de la création littéraire, croisant les regards de différents acteurs du monde de l’édition. D’ailleurs, chaque chapitre de l’intrigue s’ouvre sur une citation d’écrivain célèbre que Miles Hyman a inclus dans son découpage, l’illuminant de son style unique et de ses couleurs vives.
En composant ce suspense psychologique, situé donc sur une magnifique île fictive de la Méditerranée, Guillaume Musso souhaitait que l’on ressente bien cette idée de huis clos à ciel ouvert. Également grand amateur d’art sous toutes ses formes — il apprécie beaucoup, comme on l’a déjà vu, le 9e —, le récipiendaire du prestigieux prix Raymond-Chandler récompensant la carrière d’un maître du thriller et du roman noir a, en ce sens, été comblé par le traitement graphique d’Hyman : « Le dessin de Miles me fait penser à Hopper, qui a toujours été un de mes peintres préférés, par le silence des images et des paysages en apparence très beaux, mais où, lorsqu’on regarde bien, les personnages semblent hurler de l’intérieur… C’est ce que j’ai aimé… cette fausse immobilité qui renvoie à l’intérieur des personnages et toujours dans des paysages à la fois austères et lumineux. »
Gilles RATIER
(1) Sur Miles Hyman voir : « Une romance anglaise » : quand Miles Hyman et Jean-Luc Fromental racontent l’affaire Profumo…, « Le Coup de Prague » par Miles Hyman et Jean-Luc Fromental, « La Loterie » par Miles Hyman, « Drawings » : l’art de Miles Hyman, PLUS DE LECTURES DU 26 MAI 2008, ou Matz sonne toujours deux fois !…
« La Vie secrète des écrivains » par Miles Hyman, d’après Guillaume Musso
Éditions Calmann-Lévy (19,99 €) — EAN : 9 782 702 183 250