Drôles, engagés, solidaires mystérieux et aventureux, une bande d’ados sympathique s’offre aux collégiens lecteurs…

Depuis les confinements provoqués par la pandémie, la bande dessinée jeunesse connait une belle croissance, portée notamment par les ventes exponentielles des mangas. Le lectorat adolescent lit en majorité des bandes dessinées venus d’Asie, alors que les jeunes filles et garçons de l’école primaire se régalent d’ouvrages plus traditionnels. Les éditions Bayard et Milan ont eu la bonne idée de créer la collection Bande d’ados dont les ouvrages s’adressent aux anciens afficionados de la collection BD Kids et de la terriblement populaire « Mortelle Adèle : de quoi séduire les 11-15 ans.

L’année 2021 a été une excellente année pour la bande dessinée en France : plus de 85 millions d’exemplaires écoulés, soit + 60 % par rapport à l’année précédente. D’après le bilan annuel de l’institut GfK (1), un livre sur quatre vendu en France est une bande dessinée. Chiffres à relativiser par la croissance exponentielle des mangas : 55 % des ouvrages achetés. Nos chères têtes blondes ont donc bien profité du temps libre offert par les confinements pour lire, et non pas seulement pour se distraire devant les écrans. La preuve : les BD jeunesse représentent un cinquième du secteur.  Certains puristes regretteront toutefois que cette forte croissance soit portée en grande partie par le doublement des ventes de mangas, c’est pourquoi les éditions Bayard et Milan ont décidé de réagir.

« Les Bourrinologues » page 5.

Bayard est le premier éditeur pour la jeunesse en volume et en valeur. Avec plus de dix millions d’exemplaires vendus, « Mortelle Adèle » est la tête de gondole de cette maison d’édition toujours ambitieuse. Nous vous avons déjà entretenu de cette innovante série dans cet article.

La collection à couverture souple BD Kids règne sur le lectorat des 6–11 ans, celui de l’école primaire, avec des séries à l’attrait toujours renouvelé telles « Ariol », « Anatole Latuile », « La Cantoche » ou plus récemment « Les Inséparables », « Les Nouveaux » ou l’hilarant « Chihuahua ».

En 2016, a été créée la collection Mini BD Kids avec des ouvrages à destination des primo-lecteurs. C’est donc fort logiquement que dix ans après la création de BD Kids, les éditions Bayard et Milan élargissent leur offre vers les 11–15 ans avec la collection Bande d’ados.

Les quatre ouvrages qui paraissent simultanément ont des thématiques très variées : ce qui annonce un catalogue vraiment éclectique, avec des bandes dessinées toujours sensibles aux préoccupations des adolescents. Détaillons maintenant les caractéristiques de cette première fournée très prometteuse.

Commençons par « Espions de famille T1 : Bons baisers de papy ». Le titre de l’album fait explicitement référence à un espion bien connu, le célèbre James Bond, et donne le ton d’emblée en nous plongeant dans une histoire d’espions joliment décalée et un brin déjantée. Dans cet article de 2012, Catherine Gentile concluait ainsi son avis : « On s’amuse franchement à lire cette histoire fort bien menée, où des adolescents d’aujourd’hui sont confrontés à des situations inattendues, où l’on poursuit pour de vrai de vrais méchants. On y parle aussi des relations entre générations, de la difficulté de vieillir et de communiquer. C’est drôle, intelligent, malicieux et tonique. » La série, achevée depuis deux ans, s’est poursuivie sur sept albums. Elle bénéficie, avec cette nouvelle publication, d’une belle couverture cartonnée : de quoi intéresser de nouveaux jeunes lecteurs.

« Les Bourrinologues » page 11.

Un lectorat un peu plus âgé sera intrigué par « Les Bourrinologues ». Ce sont trois présentateurs d’une émission de télévision qui se complaisent à présenter, avec une délectation malsaine, les plus belles destructions du vivant à l’œuvre sur Terre de nos jours.

Ils embarquent dans leurs voyages autour du globe des stagiaires de troisième fortement perturbés par leurs discours et ce qu’ils voient. Ironie et humour second degré sont au service d’un message clair sur les atteintes à la biodiversité et au manque de moyen des luttes contre le dérèglement climatique.

Un intéressant mélange de photographies et de dessins dynamise un récit qui aurait pu être alourdi par des explications scientifiques de bonne tenue. Les auteurs du très remarqué « Voyages en Égypte et en Nubie de Giambattista Belzoni » se sont bien amusés pour décrire avec acrimonie la plus belle victoire de l’Homme : détruire sa propre planète.

« La Cité des secrets » page 14.

Attardons-nous maintenant sur deux bandes dessinées traduites. Tout d’abord « La Cité des secrets » de l’États-unienne Victoria Ying. L’ancienne animatrice des studios Disney réussit son entrée dans le monde du 9e art.

Sur plus de 250 pages, elle offre un récit haletant à mi-chemin du steampunk et de la dystopie policière. Ever, orphelin débrouillard, vit clandestinement dans le grand central téléphonique de la ville d’Oskars.

Ancien théâtre, l’immeuble est traversé de rouages et de machineries qui peuvent déplacer escaliers et étages entiers pour mieux protéger un bien mystérieux coffre-fort.

Avec Hannah, une fille de notable fort curieuse, Ever saura trouver la clé pour sauver la ville entière. Ce bel album lumineux, à l’intrigue complexe, ravira les lecteurs les plus vieux de la tranche d’âge visée.

« La Cité des secrets » page 24.

Terminons par un petit bijou de bande dessinée pour adolescents avec « Clara et les ombres » : un récit subtil, tout en nuances, sur les angoisses particulières fréquentes à cet âge de transition.

1988, Clara vient de quitter New-York pour s’installer dans une petite ville avec son père. Régulièrement, la jeune fille est sujette à des terribles crises d’angoisse qui peuvent aller jusqu’à la perte de connaissance. Victime d’un début de harcèlement au lycée, Carla sympathise vite avec Robert qui l’introduit dans un petit groupe d’amis qui partagent d’étranges rêves avec la nouvelle venue.

Chose encore plus étrange, des adolescents disparaissent mystérieusement et une sourde angoisse monte dans toute la communauté. Ce récit d’une grande justesse décrit avec délicatesse les tourments vécus à l’adolescence, de crises d’angoisses soudaines au harcèlement, des amitiés naissantes au premiers sentiments amoureux. Des disparitions inexpliquées et des créatures fantastiques ajoutent à l’atmosphère étrange généré par un récit bien mené. Un premier tome bien construit qui suscite l’envie de lire la suite.

« Clara et les ombres » page 8.

La collection Bande d’ados s’enrichira cette année de plusieurs titres prometteurs : « Les Sorcières de Brooklyn » dès avril prochain, puis en mai « Tcheetos » de Guillaume Long et « Le Manoir », l’adaptation de la série culte d’Évelyne Brisou-Pellen, par Stéphane Melchoir et Raphaël Beuchot.

À noter que pour accompagner la promotion de ce nouvel ensemble éditorial, les éditions Bayard et Milan lancent un appel à projet. Lors du prochain festival d’Angoulême, de jeunes auteurs n’ayant jamais publié pourront proposer un synopsis et quelques planches. Le vainqueur, annoncé au festival Quai des Bulles de Saint-Malo, sera publié dans le catalogue de Bande d’ados ! Ce prix, parrainé par Emmanuel Guibert, offrira donc une belle visibilité à un jeune auteur remarqué par ses pairs.

Laurent LESSOUS (l@bd)

« Clara et les ombres » par Claudia Petrazzi et Andrea Fontana

Éditions Bayard, collection Bande d’ados (15,90 €) – EAN : 978-2-408-02576-2

« Espions de famille T1 : Bons Baisers de Papy » par Romain Ronzeau et Thierry Gaudin

Éditions Bayard, collection Bande d’ados (12,50 €) – EAN : 979-1-0363-4069-7

« Les Bourrinologues » par Lucie Castel, Nicole Augereau et Grégory Jarry

Éditions Bayard, collection Bande d’ados (11,50 €) – EAN : 978-2-408-03268-5

« La Cité des secrets » par Victoria Ying

Éditions Bayard, collection Bande d’ados (19,90 €) – EAN : 979-10-363-2654-7

Parution 19 janvier 2022

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