Aaarg ! pleure, La Revue dessinée rit !

Nées toutes les deux à l’automne 2013, La Revue dessinée et Aaarg ! ont ouvert la route à une nouvelle génération de magazines BD : entre le périodique et l’album. Toutes les deux financées par des groupes indépendants, principalement des auteurs, proposent un pavé que l’on peut acheter en librairie ou dans les kiosques. Parution trimestrielle pour la première, bimestrielle pour la seconde, un prix de vente égal à celui d’un album, un contenu ciblé pour des lectorats différents. Mais si La Revue dessinée voit l’avenir en rose, Aaarg ! abandonne la partie.

À l’instar de Fluide glacial, dont plusieurs auteurs appartiennent aux deux titres, Aaarg ! joue la carte de l’humour déjanté.

De son côté, s’inspirant du magazine XXL, La Revue dessinée se spécialise dans la BD reportage.

Ces deux titres trouvent rapidement leur place et incitent d’autres éditeurs à s’inspirer de leur expérience : Pandora chez Casterman (voir : Pandora : la nouvelle revue des éditions Casterman !) et Groom chez Dupuis (voir : Groom : le nouveau mag de Spirou ouvre les portes de l’actu…).

Très vite, bien que l’accueil des lecteurs pour la revue soit favorable (1), Aaarg ! se lance dans une politique d’édition d’albums et l’éditeur doit rapidement faire face à divers problèmes financiers. Certes, les maquettes sont superbes, la présentation parfaite, mais les lecteurs ne souhaitent visiblement pas retrouver deux fois les mêmes histoires. D’où la décision de proposer un Aaarg ! mensuel dont la présentation s’inspire de la formule de Fluide glacial (voir Aaarg ! : opération survie !). Un appel au financement participatif via Internet permet de lancer la nouvelle formule dans de bonnes conditions, d’autant plus que les nouveaux abonnements sont nombreux. Hélas, la publication de nouveaux albums dont les ventes ne sont pas à la hauteur du coût entraîne une nouvelle fois la jeune maison marseillaise aux frontières du dépôt de bilan. Résultat, afin de rembourser les abonnés, payer les factures… la direction de Aaarg ! prend la décision de disparaître, laissant bien des regrets (2). C’est un peu l’histoire de la grenouille et du bœuf…

La Revue dessinée, prudente, se concentre sur le magazine, rien que le magazine (3). Les albums ce sera pour plus tard. Sous une couverture signée Nicolas André, le numéro 12 (232 pages en noir et en couleurs, 15 €, en kiosques et librairies) couvre l’été 2016 et propose un copieux sommaire où les BD reportages font preuve d’éclectisme : « Le Gay Paris » par Guillaume Lecaplain et Pochep, « Alfred Nakache le nageur d’Auschwitz » par François Thomazeau et Jorge González, « Voyage au Bhoutan » par Benjamin Flao, « La Bombe en question » par Erwan Seznec et Pierre Maurel, « Le Casino des catastrophes » par Carole Suhas et Pierre Lecrenier… et les chroniques de Cécily, James, Arnaud Le Gouëfflec et Nicolas Moog, David Vandermeulen et Daniel Casanave, Rudy Spiessert, Fabcaro, Fabrice Erre et Terreur Graphique… Conscient que se lancer dans l’édition où le marché est déjà saturée est un gros risque, La Revue dessinée préfère mettre au point la publication d’un second magazine, Topo, qui proposera, dès le 1er septembre, l’actu dessinée aux moins de 20 ans. Un magazine de 144 pages tous les deux mois qui risque de faire mal au Groom des éditions Dupuis.

Henri FILIPPINI

(1) Sur le contenu de Aaarg ! première formule, voir Aaarg ! Et L’O.V.N.I. devient magazine !, Dionnet invité de Aaarg ! n° 10…, Aaarg ! : et de 9 ! et Aaarg ! : entretien avec Pierrick Starsky….

(2) Pour en savoir plus sur le naufrage de Aaarg ! : http://www.fraaarg-la-mort-dun-magazine-et-dune-maison-dedition.

(3) Sur La Revue dessinée, voir aussi La Revue dessinée a du nez…, Il faut de tout pour faire un monde… et L’automne printanier des revues BD.

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