Dix ans après la parution de « Résurrection », la première partie d’un diptyque accouché dans la douleur, voici enfin « Révélations » : conclusion du dernier récit du regretté Philippe Tome, décédé alors qu’il travaillait sur les dernières pages de son scénario. Les éditions Dupuis proposent, enfin, l’intégralité de cette aventure magistralement dessinée par Dan Verlinden, digne successeur de ses deux prédécesseurs : Luc Warnant et Bruno Gazzotti.
Lire la suite...En hommage à Paul Gillon
Comme nous vous l’avons déjà annoncé sur notre bandeau défilant, l’auteur de bande dessinée français Paul Gillon est décédé le samedi 21 mai, alors qu’il venait de fêter ses quatre-vingt-cinq ans, dix jours auparavant. Né à Paris le 11 mai 1926, ce maître du dessin classique a abordé pratiquement tous les genres réalistes de la bande dessinée de ces cinquante dernières années…
« À cause d’une tuberculose des os, de six à douze ans, je suis resté alité à l’hôpital. Donc, pas d’école… Lorsque j’en suis sorti, je ne supportais plus la moindre discipline et, par la force des choses, j’étais très ignorant. Puis, j’ai découvert l’école, mais c’était un peu tard et j’ai compris que je ne serais jamais comme les autres. Heureusement, il y avait le dessin : je griffonnais tout le temps… À l’école, ça marchait bien et j’ai obtenu rapidement le certificat d’études. Ensuite, j’ai suivi des cours dans une école religieuse à Vincennes, mais j’ai été viré au bout de trois mois : je passais mon temps à dessiner… ». Considéré comme complètement autodidacte, Paul Gillon débute à l’âge de quatorze ans en illustrant des partitions de chansons célèbres et en réalisant des caricatures d’artistes de la scène et du cinéma pour les journaux Samedi-Soir, France Dimanche, Gavroche et Fillette. Il va se tourner alors vers la bande dessinée et devenir l’un des piliers des titres publiés par la Presse Communiste : Ce Soir ou L’Avant Garde (en 1946), Vaillante (en 1948), 34 Caméra (de 1949 à 1955) et surtout Vaillant, dès 1947.
Pour cet hebdomadaire, il multiplie les reprises graphiques de séries exotiques scénarisées par Roger Lécureux (comme « Lynx Blanc » en 1947
et « Wango » en 1958),
les reconstitutions historiques et politiques (« Fils de Chine », toujours avec Lécureux, en 1950)
et les récits maritimes ou de flibustiers : « Le Cormoran » (avec le scénariste Jean Ollivier, à la suite du dessinateur Lucien Nortier, en 1954), « Jérémie » (les aventures d’un jeune mousse errant dans les Caraïbes du XVIIème siècle, de 1968 à 1973, dont il écrit, lui-même, les scénarios)
et l’adaptation du « Moby Dick » d’Herman Melville (bien plus tard, dans Pif Gadget, le successeur de Vaillant, en 1982).
Il travaille parallèlement (de 1956 à 1957) pour Radar, Rêves, Femmes d’Aujourd’hui, Lectures d’Aujourd’hui et Bonjour Bonheur où il livre récits complets et illustrations. Ensuite, de mai 1959 à décembre 1972, il dessine le strip quotidien « 13, rue de l’Espoir » : un soap-opéra fleuve (de plus de quatre mille bandes) écrit par les frères Jacques et François Gall pour le quotidien France-Soir.
Paul Gillon collabore aussi au Journal de Mickey avec des adaptations de séries télévisées comme « La Déesse d’or » dont le scénario est crédité, de 1961 à 1962, Brigitte Muel (il s’agit de la comédienne Brigitte Eloy, épouse Muel),
« Le Temps des copains » (également scénarisé par Jean Canolle et Pierre Fallot, de 1962 à 1964)
et « Téva » (scénarios d’un certain G. Tardy, de 1973 à 1977),
de films des studios Disney comme « Le Fantôme de Barbe-Noire » (en 1968)
ou d’œuvres littéraires (« Notre Dame de Paris » de Victor Hugo par Claude Gendrot, en 1985).
La science-fiction faisant partie de ses domaines favoris, il aborde alors la bande dessinée dite « pour adultes » en illustrant aussi la magnifique saga des « Naufragés du Temps » écrite par Jean-Claude Forest (d’abord dans l’éphémère magazine en grand format Chouchou, en 1964, puis dans le quotidien France-Soir, de 1974 à 1975, et enfin dans le mensuel Métal hurlant où il assumera seul les scénarios, de 1977 à 1989) ; en ce qui concerne cette série voir notre « Coin du patrimoine » : http://bdzoom.com/spip.php?article3496.
C’est aussi dans Métal hurlant qu’il propose, de 1981 à 1983, d’autres courts récits complets d’anticipation recueillis dans les albums « Mécanoïdes associés » et « Processus de survie ».
Outre de nombreuses pages publicitaires (pour Femmes d’Aujourd’hui ou Jours de France, dans les années soixante et soixante-dix) et illustrations diverses (notamment dans Elle, L’Express, Marie-Claire, Match, Okapi, Je Bouquine… ou pour les romans du « Club des cinq » d’Enid Blyton dans la collection « Bibliothèque rose » d’Hachette, entre 1991 et 1998), on lui doit aussi une « Histoire du socialisme en France » (sur un texte de Claude Moliterni, aux éditions Service de l’homme, en 1977),
le polar « Les Léviathans » (dans l’hebdomadaire B.D, en 1978, puis en albums aux Humanoïdes Associés en 1990 et chez Albin Michel en 2000),
la biographie de Martin Gray « Au nom de tous les miens » adaptée par Patrick Cothias dans le mensuel Vécu des éditions Glénat (en 1986),
la série de science-fiction érotique « La Survivante » (dans L’Écho des Savanes, de 1985 à 1991),
la biographie sulfureuse de « Jehanne » où l’on apprend que la pucelle d’Orléans avait plus d’une corde à son arc (dans L’Écho des Savanes en 1993 et en album chez Albin Michel en 1997)…
Enfin, à plus de soixante-dix ans, cette référence du graphisme élégant s’est offert quelques délassements en mettant en images le diptyque romanesque « La Dernière des salles obscures » écrit par Denis Lapière (pour la prestigieuse collection « Aire Libre » des éditions Dupuis, de 1996 à 1998),
le troublant polar « La Veuve blanche » (réalisé dans la même collection, en 2002),
une politique-fiction (« Le Contrat» (dans L’Écho des Savanes, en 2000), une collaboration efficace avec le grand scénariste Frank Giroud (le tome 7 du « Décalogue », chez Glénat en 2002,
et le deuxième du « Quintett », chez Dupuis, en 2005)
ou la saga familiale se déroulant dans le milieu judiciaire : « L’Ordre de Cicéron » écrit par l’avocat et scénariste talentueux Richard Malka (trois tomes publiés chez Glénat, de 2004 à 2009) et qui demeure, hélas inachevée.
Pour plus de renseignements sur son œuvre, on ne peut que vous conseiller la revue Hop ! dirigée par Louis Cance, dont les récents n°126 et 128 sont principalement consacrés à cet immense dessinateur réaliste : avec une longue et passionnante entrevue (dont nous avons extrait la citation en début d’article) suivie d’une indispensable et très détaillée bibliographie de l’immense production de celui qui était, jusqu’à samedi dernier, le doyen des dessinateurs français de bandes dessinées. On peut aussi consulter les ouvrages « Érotisme et pornographie dans la bande dessinée » de Michel Bourgois (aux éditions Glénat, en 1978) et « Monsieur Gillon » de Claude Gendrot (chez Dupuis, en 1998), les revues Phénix n°45, Les Cahiers de la BD n°36 et n°87, L’Entrevue n°2, Champagne n°2-3, BD Bulle n°10, Café noir n°5, La Vie ouvrière n°2318, BD Scope n°14, Bo Doï n°30, N°96, La Lettre n°66, Vécu (nouvelle série) n°42, Bandes Dessinée Magazine n°1, dBD (nouvelle formule) n°2 et n°26, Bo Doï (hors-série) n°18, CaseMate n°2, n°9 et n°19 et L’Avis des Bulles n°110, ou encore l’excellent article de notre confrère Didier Pasamonik sur actuabd.com : http://www.actuabd.com/Disparition-de-Paul-Gillon-un !
Gilles RATIER
Ce qui est fascinant dans le parcours de Paul Gillon, c’est qu’il reflète plus de 50 ans d’évolution du média BD au travers du support presse. Un parcours qui prend naissance dans la presse quotidienne et les supports jeunesse, et se poursuit après plusieurs décennies dans les mouvements les plus novateurs (Métal Hurlant) ou les plus « tendance » de leur époque (L’Echo des Savanes)… Paul Gillon aura vu son style s’adapter à tous ces supports, depuis Chouchou et France Soir jusqu’à la fin programmée de la prépublication, avec toujours la même classe : savant dosage des classiques américains (Alex Raymond) et d’influences plus européennes. Entre académisme et sensualité, la « French Touch »…
Une carrière fascinante qui pourrait résumer dans ses réussites comme ses impasses un pan entier de l’histoire de notre média.
Merci, Monsieur Gillon. Vous étiez une telle évidence de talent que nous avions négligé avoir affaire à un géant.
Bonjour,
Pour moi, techniquement, c’était le plus grand avec Giraud. A la différence de ce dernier, il lui a manqué la « grande série » comme Blueberry pour Gir, ou XIII pour Vance…. pour le faire connaître du très grand public.
Bonjour
je rends hommage à ce grand artiste qu’était paul Gillon.
Il fut longtemps un pillier du journal Vaillant, un journal qui ne manquait de grands artistes. Aussi je voudrai profiter de cette tribune pour rendre un hommage à un autre grand de cette revue, aujourd’hui disparu : E.T.Coelho
Salut l’artiste !!!
C’était en 1956 ou 1957, ma mémoire me trahis. Comme chaque année, avait lieu la traditionnelle fête de l’humanité, dans la fôret de Montgeon du Havre.
Mon grand-père, communiste convaincu n’aurait manqué pour rien au monde cette grand-messe du parti.
Cette année là il avait décidé de m’emmener avec lui.
Hormis la promenade en foret, je ne voyais aucun intêret à cette ballade.
En arrivant sur le site, mon attention fût tout de suite attiré par le stand du journal Vaillant.
Je ne lisais alors que le journal Mickey et quel ne fut pas mon emerveillement en découvrant les gros albums reliés du journal Vaillant.
C’était pure merveille, avec ses couleurs vives et ses grandes pages façon BD américaines.
Tandis que mon grand-pére parlais de l’avenir de l’URSS, je plongeais avec délice dans les pages d’un gros album.
Il y avait, la pension Radicelle, Nasdine Hodja, les pionniers de l’espérance et bien d’autres BD.
Mais celle qui devait retenir mon attention était consacré à un viking du nom de Ragnar
J’étais en admiration devant les planches malgré l’absence de bulles et une certaine violence qui contrastait avec Mickey.
Dans les années qui suivirent je ne manquais jamais d’accompagner mon grand-pére.
Comme je n’avais pas les moyens d’acheter un album, je restais sur le stand à lire des aventures de Ragnar, ce viking sans barbe ni moustache qui ressenblait plus à un éphébe grec qu’à un guerrier venu des brumes du nord.
Les années passérent et j’oubliais le journal Vaillant pour ne lire que Tintin ou Spirou.
Bien des années plus tard je decouvrais le nom du dessinateur, j’appris qu’il était Portuguais, qu’il avait fui le régime de Salazar, qu’il était devenu dessinateur BD au journal Vaillant, puis illustrateur de nombreux livres d’histoire pour ados.
Un Portugais venu du soleil et qui dessinait avec tant de brios des drakkars et des Vikings dans les mers du nord, pleines de brumes de vents et de crachins, voilà qui était pour le moins surprenant ?
Mais quel talent!!!
PS Encore merci pour cette rubrique qui rend hommage à tant d’artistes trop meconnus. N’oubliez pas de parler un jour de cet artiste et de tous ceux qui travaillérent dans un relatif anonnyma
Je n’oublie pas en particulier la série Yves le loup, ma préféré après Ragnar
Cordialement
Jacques Guillerm
Bonjour. Je viens de « tomber » sur votre site, et je ne savais pas que ce dessinateur génial avait quitté ce monde. C’est une partie de mon enfance, mon père achetait FRANCE-SOIR où paraîssait 13, rue de l’Epoir ( dont j’ai acheté les deux volumes dans les années 80 ). C’est un hommage un peu tardif que je rends à Monsieur Paul GILLON. Respectueusement.
erreur concernant le scénario de la Déesse d’or: Il s’agit de l’adaptation d’une série télévisée pour les enfants et dont ma mère, comédienne( Brigitte Eloy), puis scripte de cinéma fut effectivement l’auteur, comme elle le sera de deux autres séries dans les années soixante, le Petit Ramoneur,et Tony fils du cirque.Elle a ensuite travaillé comme directrice de production de l’émission de Pierre-André Boutang, « Océaniques » sur FR3 sous le nom de Brigitte Pignol.
Merci Christophe pour toutes ces précisions…
J’ai corrigé la parenthèse approximative qui n’était que la reprise de quelques suppositions de « spécialistes » publiées dans divers articles ou ouvrages citant cette adaptation.
Bien cordialement
Gilles Ratier
Bonjour, savez-vous quel est l’album d’Achille Talon, dans lequel le Talon et Lefuneste regarder avec intérêt le débat entre un marquis et un baron? Il soudain quelqu’un frappe l’autre avec gant doux immédiatement à la fois dans de douces cartes de change cordiales et fracture. Sur le même débat que nous lisons « Palsambleu » Savez- vous sur le link pour le trouver ?
Je ne comprends pas, que vient faire ce message sur Achille Talon à la fin de l’excellent article sur Paul Gillon?
Nous non plus, mais bon…
On ne va pas le censurer pour autant…
La rédaction.
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