« L’Or T1 : Issaïas ou le colibri » par Fréderic Bihel et Stéphane Piatzszek

« L’Or » : on songe d’emblée au célèbre récit de Blaise Cendrars. La fièvre est la même, celle de la fureur des hommes pour dénicher le métal jaune, mais celle de cet album se situe nettement plus au sud, en Amazonie, quasiment de nos jours. Et ce premier volume inaugure une série en six tomes d’or et de sang, comme dit la quatrième de couverture, pour « Six récits, six aventuriers, six destins »

Tout commence à Maripasoula, la dernière bourgade de Guyane française le long du Maroni, qu’on atteint par avion venant de Cayenne et pourquoi pas en pirogue venant de Saint-Laurent. Un trou du cul du monde comme on dit, où l’on a pourtant transporté des voitures pour quelques kilomètres de route et de piste ! La voie royale, c’est évidemment le fleuve qui longe Maripasoula puisqu’en face, c’est le Surinam (ex-Guyane Hollandaise) et  New Albina, un grand village où se multiplient épiceries chinoises, commerces et hôtels. Les pirogues font l’aller-retour, sans cesse, pour des trafics en tout genre. Autre rive, autres rêves !

Maripasoula, zone de non droit ? Il y a de cela puisque la police semble corrompue et impuissante, ce qui ouvre la voie aux trafiquants ambitieux récoltant l’or en hélicoptère et qui font bosser des jeunes gars solides mais sans le sou. Il y a là un côté Far-West que souligne ce premier tome où armes à feu et machette font la loi. Dans ces territoires, qu’on croit essentiellement indiens, les Bonis (ethnie d’origine africaine) sont omniprésents sur le « marché de l’or », mais ils ne sont pas les seuls. Le travail sur les placers est pénible, épuisant (Issaïas et son oncle en font les frais, surtout l’oncle Mariano, un peu trop vieux pour ce job) et l’encadrement sans état d’âme.  On y fait trimer  une main d’œuvre brésilienne (le Brésil est pourtant situé de l’autre côté de la Guyane en traversant l’Oyapock : autre fleuve, autres trafics, de main d’œuvre clandestine notamment !). Heureusement, dans toute histoire de malfrats et d’affreux, il y a un une bonne âme, ici celle d’une jolie toubib à laquelle Issaïas n’est pas insensible ; le contraire de Lucy, la patronne des exploitations d’orpaillage, belle aussi, mais tueuse !

Même si l’on peut découvrir Maripasoula sans risquer sa vie, la série entend bien souligner les dérives d’un de ces confins sylvestres où tout est encore possible, même l’impensable, surtout pour l’État français qui y perd régulièrement son latin et son code civil, ce que les autres tomes ne manqueront évidemment pas de démontrer. Les amateurs d’aventures et d’exotisme apprécieront donc ce nouveau projet de Piatzszek qui avait signé « Fête des morts » situé au Cambodge (dessin de Cinna) ou plus récemment « Tsunami », en Indonésie, avec Pendanx (cf. chronique ici-même), tous deux chez Futuropolis. Sans oublier la série « Commandant Achab » chez Casterman (voir également chronique ici-même).

Alors, bon voyage !

Didier QUELLA-GUYOT  ([L@BD->http://www.labd.cndp.fr/] et sur Facebook).http://bdzoom.com/author/didierqg/

 « L’Or T1 : Issaïas ou le colibri » par Fréderic Bihel et Stéphane Piatzszek

Éditions Futuropolis (13, 50 €) – ISBN : 978-2-7548-0947- 4

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