« Tales from the Crypt » T4, collectif

Hé hé hé… Eh oui, mes chères petites goules, la Vieille Sorcière et les Gardiens du Caveau et de la Crypte sont de retour pour vous proposer une farandole d’histoires plus horribles et drôles que jamais dans ce nouveau (et avant-dernier) volume de l’édition intégrale en VF du fameux « Tales from the Crypt ». Et c’est toujours un régal !

Je ne vais pas recommencer à vous présenter en détail l’édition en VF de ce titre mythique, vous invitant plutôt à lire mes articles précédents si vous prenez le train en marche (T1 : http://bdzoom.com/?p=51023, T2 : http://bdzoom.com/?p=68277, T3 : http://bdzoom.com/?p=85248). Le présent volume reprend les épisodes parus dans Tales from the Crypt #35 à #40 entre avril 1953 et mars 1954. On retrouve bien sûr les scénarios de Bill Gaines et Al Feldstein, ainsi que les dessinateurs fétiches du titre : Jack Davis, Jack Kamen, Joe Orlando, Graham Ingels, George Evans, Reed Crandall, Bernie Krigstein, mais aussi Bill Elder… Arrivé à ce point, le titre se maintient dans l’esprit et la qualité qui le caractérisent depuis le début, restant fidèle à ses thèmes de prédilection. Des thèmes déclinés à l’infini, entre horreur classique (vampires, goules, savants fous, morts-vivants, fantômes, loups-garous…) et récits d’angoisse contemporains où l’accent est mis sur le côté sombre qui se cache derrière le visage lisse de la société américaine bien-pensante. Avidité, trahison, cupidité, jalousie et autres belles valeurs qui débouchent sur le meurtre ou la folie, ou les deux… Gaines, Feldstein et leur bande continuent de dézinguer l’hypocrisie qui gangrène le monde.

On admirera une nouvelle fois la force graphique de Jack Davis, mais les autres ne sont pas en reste. Ainsi, dès la deuxième histoire de cet album, Joe Orlando ouvre sa première planche par une case verticale où l’on voit un trottoir de village pittoresque en plongée, avec dans la perspective un homme qui vient vers nous, et derrière lui une silhouette menaçante. Les jeux d’ombres avec les arbres, les architectures à la « Famille Adams » des habitations et la mise en scène des personnages en font une très grande et belle image de l’art du noir et blanc en bande dessinée (mais la suite ne démérite pas, bien sûr !). Personnellement, j’adore le travail de Graham Ingels sur ce titre, particulièrement sa manière de dessiner la Vieille Sorcière, dont le regard fou est exprimé ici avec une rare force. Dans le récit « L’Ombre de la mort ! », la séquence où les ombres des personnages prennent vie et indépendance dans la vengeance sont de toute beauté, puissant théâtre d’ombres où Ingels excelle dans les contrastes et les compositions, ainsi que la qualité du trait. Dans le dernier récit, « À moitié cuit ! », Ingels s’avère génial dans sa façon de dessiner les scènes maritimes, et la voiture vrombissante de la dernière planche reste dans les mémoires.

Les dessins de Reed Crandall sont aussi très réussis, alliant un travail de hachures et d’à-plats tout à fait épatant, et beaucoup d’autres petits bijoux nous attendent sous le pinceau d’Elder, Evans & co. On notera un épisode très particulier, plus proche de Mad que de Tales from the Crypt : une revisitation parodique de « La Belle au bois dormant » dessinée – contre toute attente, car on aurait pu croire que ce serait Elder qui s’y collerait ! – par Jack Kamen. Témoignage de la grande famille EC Comics, avec toutes ses facettes, ses genres, dans un éventail aussi éclectique que cohérent, traversé par une véritable mouvance graphique. À bientôt pour le dernier tome, donc, qui sera accompagné d’un supplément proposant l’intégralité des couvertures du titre, en couleurs et en pleine page, selon la logique amorcée par l’éditeur. En attendant, ne sortez pas trop le soir dans les cimetières, il pourrait vous arriver des bricoles…

Cecil McKINLEY

« Tales from the Crypt » T4, collectif

Éditions Akileos (26,00€) – ISBN : 978-2-3557-4231-6

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8 réponses à « Tales from the Crypt » T4, collectif

  1. Thark B. dit :

    Ah ! Voilà enfin le T4 :-) ! Le dessin de couv’ (« remake » d’une fameuse couverture de Jack Davis) est pour l’instant mon préféré, j’espère qu’il tapera dans l’oeil d’un grand nombre de lecteurs ; il faut vraiment qu’Akileos puisse aller jusqu’au bout de ses rééditions in-dis-pen-sables !
    Cecil, merci d’être fidèle au poste ^^ et d’évoquer toujours aussi passionnément ces précieuses parutions.

    Après lecture intégrale de l’excellent bouquin – en VO – qui détaille les années EC et la carrière incroyable de tous ces auteurs (« Foul Play ! » de Grant Geissman, que vous m’aviez conseillé), je savoure encore plus ces récits en connaissant encore mieux ce qui se cache parfois dans les coulisses de leur création… et dans quels contextes ils ont été imaginés.
    De toutes les mythiques productions EC Comics, c’est finalement la gamme humoristico-parodique que je connais le moins : « MAD » (ainsi que PANIC, notamment), des titres qui ont pourtant survécu au funeste Comics Code Authority… et ont permis à Harvey Kurtzman puis Al’ Feldstein de continuer à faire bosser nombre d’artistes de 1er plan. … Avant que James Warren n’en récupère certains (parmi les tout meilleurs) dans les 60′s pour ses ‘Creepy’/'Eerie’ et autres ‘Vampirella’… mais ceci est une autre histoire.
    ;)
    Concernant MAD, humour satyrique oblige, je suppose que ça doit être truffé de gags et de parodies ultra-référentiels, directement liés à la culture, à la politique et à la société américaine… et donc difficilement traduisibles et « Ã©ditables » en France, non ?
    Après la fin des comics de suspense et d’horreur, certains des dessinateurs-phares ayant trouvé refuge dans MAD ont-ils eu droit à des recueils ou des « digests » traduits et publiés en français ? (je pense par exemple à Bill Elder, Angelo Torres ou même Jack Davis qui, en brillant caméléon qu’il était, s’y est beaucoup illustré… ).
    Si quelqu’un a des infos… Thanks by advance ! :-)

    • Bonjour Thark, et merci pour vos gentils mots, ça fait toujours plaisir !

      Certes, dans « Mad » il y avait pas mal de références inhérentes à la culture et à la politique américaines, mais pas que, en tout cas vraiment rien qui empêche réellement d’apprécier ces parodies : on se marre vraiment en les lisant ! Et rien qui soit intraduisible ni incompréhensible, la preuve, il y a bien eu des éditions VF en albums entre 1979 et 1987, malheureusement jamais réédités (direction les bouquinistes !).

      Un album aux éditions du Fromage en 1979 (« Les Années folles de Mad », réédité en 1983 chez Neptune qui éditera « Mad se paie une toile » en 1984), et, entre 1985 et 1987, trois albums chez Albin Michel : « Les Bandes décimées de Mad », « Un max de Mad », et « La Fin de Mad ». À part le premier album coté 18€, les autres sont cotés à 15€, ce qui reste raisonnable.

      Quant à « Panic », rien en albums VF à ma connaissance…

      Merci de votre fidélité et de votre passion,

      Bien à vous,

      Cecil

  2. Thark B. dit :

    Yeah ! Comme toujours, une réponse sympa et… utile ! ;-) Je vais donc me livrer à une petite « Mad Quest » parallèle à mes explorations ‘horrifi’comics »… Merci beaucoup pour ces références très précises (et alléchantes)…

    Pour ce qui est de MAD en VF, on ne trouve donc pas d’albums avec des compilations de récits PAR AUTEUR ? … (un peu comme les somptueuses rééditions de Delirium qui consacrent un ou deux volumes entiers à un seul dessinateur-phare, comme Berni Wrightson ou Richard Corben périodes Creepy/Eerie)…
    Ce serait fantastique de voir sortir de vrais beaux et gros « Best Of » (ou même des intégrales, let’s get… mad ! ^^) du même tonneau, consacrés à l’Oeuvre passionnante et phéthorique d’Artistes géantissimes comme Kurtzman, Davis, Elder, Wood, etc…, incluant bien sûr bandes dessinées, dessins d’humour ET illustrations !…
    ;-)

    • Re-hello, Thark.

      Non, pas de compilations par auteur pour ces « Mad » en VF, mais plutôt des « sortes de thématiques ». Il faut dire qu’à l’époque, nous étions loin de « l’engouement » actuel des éditeurs pour les comics, et que c’était déjà pas mal d’avoir accès à ça… Et je pense que votre souhait – légitime, même si je pense qu’il vaudrait mieux avoir des best of rendant compte du travail de l’équipe dans son ensemble selon les époques – n’est pas prêt d’être exaucé, car à part quelques fous passionnés qui Å“uvrent en dehors des grosses structures (comme Delirium qui fait un travail remarquable tout autant qu’encore risqué aujourd’hui), personne n’ose aller vers ce genre d’intentions éditoriales qui seraient pourtant nécessaires.
      Sans aller jusqu’à une intégrale de « Mad » (qui serait véritablement un suicide colossal vu le nombre de numéros parus), il serait pourtant bienvenu que le meilleur de ce magazine soit édité… mais bon… ne rêvons pas trop…

      À bientôt pour de nouvelles rééditions EC, car il va sans dire que je suivrai de près chaque album à venir ! ;)

      Bien à vous,

      Cecil

  3. Michel Dartay dit :

    Les droits de traduction de Mad en France appartiennent à Urban Comics qui les adapte au compte-goutte, car cela se vend un peu moins que Batman ou Superman.
    Pour en savoir plus sur cette période, on peut lire:
    https://en.wikipedia.org/wiki/Harvey_Kurtzman%27s_editorship_of_Mad

    • Houlala..! Heureusement que vous êtes là, cher Michel, pour rappeler l’existence de ces albums récents qui – sur le coup – me sont totalement sortis de la tête, allez savoir pourquoi… Ce genre d’oubli de ma part me désole à chaque fois… qui plus est puisque Urban a justement déjà édité deux albums par auteur, comme le souhaitait notre ami Thark… Pas de Kurtzman ou d’Eider pour l’instant, mais un album consacré à Sergio Aragonés, et un autre à Don Martin. Les deux autres sont dédiés respectivement à l’univers de Batman et de Superman.
      Voilà… Hum… J’ai pas été brillant, sur ce coup-là…

      Amitiés,

      Cecil

      • Thark B. dit :

        Héhé, voilà un complément d’info qui me fait bien plaisir ! Merci Michel et thanks again, Cecil… ;-)
        Bon, cette collection « Mad Auteur » d’Urban Comics n’est pas très fournie pour l’instant, mais 296 pages signées Don Martin, ça doit ressembler à un feu d’artifices pour les yeux et les zygomatiques.
        Mais, « EC’s fan addict » oblige ;-) , ma préférence va à ces auteurs tous terrains – aussi à l’aise dans le réalisme, le suspense, la densité narrative que dans la parodie et l’humour le plus déjanté. C’est pour cela que les noms de Jack Davis et de Bill Elder (entre autres) reviennent si souvent dans mes 1ers commentaires ci-dessus…
        Sait-on jamais : si « quelqu’un » de chez Urban Comics venait à lire nos propos croisés, peut-être en saura-t-on plus sur d’éventuels projets éditoriaux autour d’autres grands noms (… d’auteurs ‘rattachés’ d’abord à EC avant de l’être à Mad) ???
        Sinon, je vais voir s’il y a moyen de les questionner par mail…
        Chaleureusement,
        bon Wouikande à tous ! :-)

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