Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Les Vieux Fourneaux T3 : Celui qui part » par Paul Cauuet et Wilfrid Lupano
Totalisant près de 250 ans, le trio de choc flirtant avec la gériatrie, collectionne les galères, mauvaises vues, incontinences, trous de mémoire… tout en conservant une pêche d’enfer, une vitalité à rendre jaloux bien des jeunes, une soif de justice et de liberté contre la connerie ambiante qui parfois les pousse à bâtir des plans foireux. Emmerder tous ceux qui cherchent à les réduire au silence de la maison de retraite est devenu, pour eux, un combat vital qu’ils mènent avec humour et panache.
Antoine, en compagnie de son ami Mimile, a élu domicile chez sa petite fille Sophie, afin de garder sa fille Juliette pendant que la jeune femme met au point le spectacle de marionnettes de son Théâtre ambulant du Loup en slip. Tout se passe pour le mieux dans un joyeux bordel, jusqu’à ce que Berthe Goitreux, la fermière foldingue, lance un SOS désespéré : la Dourville déborde et ses brebis risquent de périr noyées. Victime d’une commotion cérébrale, Mimile part pour l’hôpital via le SAMU, alors que Sophie se retrouve les pieds dans l’eau auprès de la fermière, au bord de la crise de nerfs. Pauvre Sophie, tout juste remise de l’agression au cours de laquelle des voyous lui ont arraché un cheveu : histoire de savoir si son père est le fils illégitime du richissime Garan-Cervier. Pendant ce temps à Paris, après avoir brutalisé les abeilles d’une bourgeoise en compagnie de ses amis Fanfan (vieil aristo de 91 ans) et Baba, Pierrot, ardent activiste de l’association Ni dieu ni maître, se retrouve au poste de police. Lorsque l’on sait que le sujet principal de ce troisième album est l’évocation du passé maritime pas triste de Mimile, longtemps capitaine au long cours ayant bourlingué sur le Pacifique, ont comprendra que l’on ne s’ennuie pas à la lecture de ce troisième opus.
Le scénario de Wilfrid Lupano aux dialogues riches et savoureux, à la fois drôle et émouvant, a permis aux trois octogénaires d’être rapidement adoptés par les lecteurs qui retrouvent, à travers eux, les grands-parents fantasmés qu’ils n’ont peut-être pas eus. Le Toulousain Paul Cauuet (qui a déjà signé « L’Honneur des Tzarom » avec Lupano) campe trois vieillards somptueux, craquants, fragiles, touchants, d’un trait vif tout en finesse. Pas étonnant que « Les Vieux Fourneaux » figurent parmi les best-sellers dans les librairies !
Henri FILIPPINI
« Les Vieux Fourneaux T3 : Celui qui part » par Paul Cauuet et Wilfrid Lupano
Lupano est un scénariste astucieux et innovant: il fallait avoir le courage de lancer un trio de pieds nickelés octogénaires, avec les multiples problèmes de santé qui viennent avec l’âge: perte de mémoire, de la rapidité de réflexe, de la masse musculaire, de la libido… Cette vision est originale puisque la BD était jusque ici truffée de bellâtres musclés et dynamiques (Hochet, Vaillant, Prince, Valhardi Luc Orient), dans la force de l’âge, ou alors de jeunes femmes agréables à regarder (Jessica Blandy, Natacha, Yoko Tsuno; Jeannette Pointu est sympa, mais pas vraiment jolie)l
Et le public concerné ne cesse de croitre grâce à l’allongement de l’espérance de vie, on regrette jusque que les retraités soient de plus en plus soumis à impôts et cotisations. Voila en tout cas qui démontre que la vie continue à plus de soixante-cinq ans, et qu’elle est encore trépidante, car il y aura toujours des braises qui ne demandent qu’à être réveillées dans ces vieux fourneaux.