Après un premier recueil paru en octobre 2022 (et une prépublication dans le célèbre mensuel éponyme depuis le n° 548 de février de cette même année), les éditions Fluide glacial proposent aujourd’hui le deuxième opus de ce dytique qui contient huit nouveaux récits doux-amers sur l’âge d’or d’Hollywood. Dans un style rétro et un humour décalé tout à fait appropriés, le dessinateur Éric Maltaite et le scénariste Zidrou se sont fait leur propre cinoche, en nous entraînant dans ces légendaires fifties où le cinémascope américain était à son apogée : histoire de voir ce qui se passait vraiment de l’autre côté de la caméra, alors que l’on va commémorer, cette année, les 100 ans de l’enseigne avec les fameuses lettres de ce véritable symbole de l’entreprise du divertissement.
Lire la suite...« Yasmina » par Damien May

Isabelle Eberhardt n’a vécu que vingt-sept ans (1877-1904) mais elle laisse derrière elle de nombreux textes dont » Yasmina », une nouvelle écrite entre 1899 et 1902, parmi d’autres regroupées dans » Yasmina et autres nouvelles algériennes » (Liana Levi, 2002) et remarquablement adaptée ici par Damien May ?
Parcours étonnant que celui de cette femme à la vie aussi courte que fascinante qui, déguisée en homme, parcourt le sud algérien et adopte la religion musulmane (voir bio et biblio). Elle connait très bien la vie quotidienne des bédouins ou de ces jeunes bergères qu’on marie un beau (?!) jour et qui, fataliste, résignée, acceptent l’inacceptable. Yasmina est de celles-là et va devenir bientôt « la femme du borgne ». Chance, le mariage est repoussé, le temps pour la jeune fille de rencontrer Jacques ! La séduction est réciproque mais les échanges difficiles. Malgré le doute et les différences culturelles, l’amour s’installe mais Jacques est muté et doit repartir ! Pour Yasmina, c’est le début de la déchéance…
Ce texte sensible est admirablement transposé dans ces pages à la fois frêles et émouvantes. Le trait au pinceau s’inspire des estampes japonaises (on pense à aussi à Baudoin, côté BD) et sait représenter le dénuement, l’inquiétude, l’absence. Une ligne de crête peut ici remplir admirablement une page et signifier élégamment le désert. Personnages et plus encore chevaux ou chèvres sont d’une vitalité dont il faut souligner l’expressivité. Bref, ce récit signé par l’auteur de » Tueuse » (cf. notice L@BD)
(même éditeur), confirme un réel talent.
À noter que le personnage d’Isabelle Eberhardt apparaît dans » Les Fils du Sud / Carnets d’Orient » de Jacques Ferrandez (p. 34-37, 46, 51). Et du même Ferrandez, on doit rappeler » L’Hôte d’après l’œuvre d’Albert Camus » (cf. notice L@BD).
L’Algérie dans la BD, c’est aussi la vision d’un Battaglia dans » L’Homme de la Légion » (cf. notice L@BD), celle de Lax et Giroud dans » Azrayen’ T1 » (cf. notice L@BD), de Stassen et Lapière dans » Le Bar du vieux Français » (cf. notice L@BD), ou plus récemment de Tronchet et Sibran dans » Là -bas » (cf. notice L@BD) pour n’en citer que quelques unes.
Bons voyages !
Didier QUELLA-GUYOT (L@BD et blog)
» Yasmina » par Damien May
Éditions Des Ronds dans l’O (16 €)