« Grimms Manga » T1 et 2 par Kei Ishiyama

Alors que Disney viens juste de sortir son film  » Raiponce  » dans les salles de cinéma, Pika édite, de son côté, le second tome de l’adaptation très libre des contes des frères Grimm, en manga. C’est l’occasion de revenir sur cette collection étonnante mêlant roman et bande dessinée.

Les contes des frères Grimm sont extrêmement connus, non pas pour leur version papier, mais le plus souvent grâce à leurs adaptations en film d’animation. Dans ces longs métrages, de nombreuses libertés ont été prises par rapport au texte d’origine. Il faut dire que ces contes sont, en général, assez courts. Néanmoins, on n’aurait pas imaginé d’aussi grands changements que dans l’interprétation qu’en fait Kei Ishiyama avec certaines histoires de cette collection. Le premier volume de  » Grimms manga « , paru en 2009, proposait justement l’histoire de  » Raiponce  » que Disney vient également d’adapter. La plupart des contes divergent par rapport aux écrits originaux. Ne serait-ce que par les conclusions toujours heureuses chez Ishiyama. Pour comparer, il suffit justement de lire la traduction du texte d’origine que Pika a eu la bonne idée de mettre en fin de livre. Ainsi, chaque conte se retrouve à la fois dans sa version texte et dans sa version illustrée.


© Kei Ishiyama – Pika 2009

Au niveau des contes adaptés, on retrouve dans le premier tome : « Le Petit chaperon rouge « , où un enfant loup épouse la jeune messagère de rouge vêtue alors qu’aucune Grand-mère n’est mangée.

© Kei Ishiyama – Pika 2009

Pour  » Raiponce  » Ishiyama a pris énormément de libertés dans son interprétation des écrits originaux. La princesse à longue chevelure est ici un prince et le courageux fils du roi est devenu une jolie paysanne. Les rôles sont inversés, mais l’histoire reste cohérente et se finit aussi bien que l’originale.

© Kei Ishiyama – Pika 2009

 » Hansel et Gretel  » qui met en scène une version narcissique de Hansel, le frère ainé. Le conte n’a quasiment plus rien à voir avec l’original, seule la maison en sucrerie reste.

© Kei Ishiyama – Pika 2009

 » Les Douze chasseurs « , conte moins connu mêlant romance et devoir royal. Ici, peu de changement… À part une natation légèrement différente et un lion devenus simple chat.

© Kei Ishiyama – Pika 2009

Et pour clôturer ce premier livre, un conte extrêmement long, ici séparé en deux chapitres,  » Les Deux frères « . Peut être l’adaptation la plus fidèle de ce recueil avec seulement quelques arrangements scénaristiques, mais aucun contre sens.

© Kei Ishiyama – Pika 2009

Le second tome, plus court, illustre quatre contes : l’inévitable  » Blanche Neige « , avec de nombreux ajustements sur le plan du scénario qui permettent de renforcer le côté comique de cette histoire. Beaucoup moins noir que le conte original, il met clairement l’accent sur la beauté et la joie de vivre de Blanche Neige, tout en occultant la plupart des passages avec tous les nains.

© Kei Ishiyama – Pika 2009

 » Le Chat botté  » dont le début est extrêmement fidèle aux écrits des Grimm, mais dont la suite diverge énormément. Le chat ne sera pas le serviteur d’un puissant comte et ne trompera pas la princesse avec un château insidieusement dérobé aux magiciens : le paysan restera paysan, mais partagera néanmoins sa vie avec la princesse.

© Kei Ishiyama – Pika 2009

Dans  » Le Roi grenouille « , adaptation de la nouvelle  » Le Prince grenouille « , les rôles masculins et féminins sont inversés ainsi que les caractères des personnages : la grenouille devient désagréable et malheureuse de sa condition de batracien alors que la princesse, devenue prince, est ici d’une gentillesse sans égale.

© Kei Ishiyama – Pika 2009

Le dernier conte,  » La Fauvette-qui-chante-qui-sautille  » est également en deux parties. Si le début est quasiment identique au conte original, la seconde partie est vraiment différente même si, au final, le résultat est identique : ils vécurent heureux…

© Kei Ishiyama – Pika 2009

La ressemblance de ces livres avec un roman est poussée à son paroxysme en se détournant totalement des codes traditionnels de l’édition du manga. La couverture propose un visuel ou les coins, la tranche et les rabats sont imprimés en imitation cuir. La jaquette, absente, est remplacée par un cartonnage plus épais que la moyenne. Les couleurs des illustrations, ocre pour le premier volume et verdâtre pour le second, renforcent l’aspect ancien et précieux de cette édition. Le tout est rehaussé par un lettrage du titre en impression dorée sur la face avant et la tranche. Ce qui contraste avec le pelliculage mat de ces couvertures. Même si cela reste des livres avec une reliure dos carré collé simple, une fois rangé dans une bibliothèque, ils ne jureront pas au milieu d’autres romans anciens.


© Kei Ishiyama – Pika 2010

Chaque volume est agrémenté d’illustrations en couleur sur ses quatre premières pages. On peut ainsi pleinement apprécier le talent de cet auteur et regretter, par la même occasion, que le reste des albums ne soit pas également colorisé. Néanmoins, le travail de mise en page, ainsi que le graphisme général, étant particulièrement soigné, on oublis rapidement ce  » manque  » pour plonger dans le récit. On sent la minutie et la précision du trait de la plume d’Ishiyama. Les pages, remplies de cases éclatées, offrent une construction narrative extrêmement vivante et agréable à lire. Enfin, le dessin est sans faille : que ce soit au niveau des humains, petits ou grands, jeunes ou vieux, comme au niveau des animaux, des plus féroces comme les loups ou les lions, aux plus mignons comme les chats ou les lapins. Tout en rondeur, net et clair, rehaussé de nombreuses trames, le travail graphique de Kei Ishiyama est aussi agréable que sa narration.


© Kei Ishiyama – Pika 2009

Même si ce manga est plutôt destiné à un public jeune, à l’instar des contes originaux, cela n’empêchera pas une personne ayant une plus grande maturité d’esprit de passer un agréable moment de détente. Notamment en comparant ces bandes dessinées et les contes originaux judicieusement reproduits en fin des volumes, ou plutôt en début, si on prend le livre dans le sens de lecture occidentale.

Gwenaël JACQUET

«  Grimms Manga  » T1 et 2 par Kei Ishiyama
Éditions Pika (9.90€)

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