Dans le cinquième volume de ses aventures, « Le Grimoire d’Elfie T5 : Les Reflets de Walpurgis », la jeune Elfie découvre le marais poitevin (entre La Rochelle et Niort) et des festivités réservées aux magiciens et sorcières depuis le temps de la mystérieuse fée Mélusine. Une nouvelle enquête pour la jeune adolescente, avec l’apport non négligeable de son grimoire magique, à l’issue de laquelle elle en aura appris beaucoup sur les dangers contemporains qui guettent cette zone humide remarquable et sa propre famille.
Lire la suite...Charlot a cent ans !
C’est le 7 février 1914 que le personnage de Charlot effectue sa première apparition sur les écrans dans un court métrage intitulé « Kid Auto Races at Venice ». En seulement une année, le vagabond imaginé par Charlie Chaplin se fait connaître dans le monde entier. Très vite, les comics s’emparent de ce héros conçu sur mesure pour eux. Ce centenaire est une excellente occasion pour vous proposer de (re)découvrir les plus fameux d’entre eux.
Aux États-Unis, en 1914, Ed Carey se contente de créer, dans sa série « Pa’s (Imported) Son-in-Law » – baptisée quelques fois « Pa’s Family and their Friends » -, un sosie de Charlot baptisé Charlie Chawpman.
Il faut patienter jusqu’au 14 mars 1915 pour voir le véritable Charlot apparaître dans ce strip quotidien rebaptisé alors « Charlie Chaplin’s Comic Capers » et publié dans la page comics de l’Evening Star, produit par le J. Keeley Syndicate, l’agence du Chicago Herald dont James Keeley est le propriétaire.
Premier dessinateur de cette version dédiée à Charlot, Stuart Carothers campe un Charlot identique à celui de l’écran, portant chapeau melon et se déplaçant avec une cane.
Après avoir été signé par d’autres dessinateurs, le strip — qui possède désormais sa planche dominicale — est repris en mars 1916 par Elzie Crisler Segar, le futur créateur de Popeye. Le succès mondial de Chaplin compliquant les problèmes de droits aux États-Unis, la série disparaît des journaux américains le 15 avril 1917. Désormais, c’est en Europe, où la notion de droits d’auteur est encore très floue, que Charlot poursuivra sa carrière en tant que héros de papier.
L’Angleterre, patrie de Chaplin — il est né à Londres en 1889 — ne pouvait qu’accueillir à bras ouverts la créature de l’enfant du pays dans ses illustrés. Dès 1915, le personnage de Charlot fait son apparition, dessiné par Albert Thacker « Bertie » Brown (1887-1974) dans une histoire avec texte sous les images, laquelle est publiée dans les pages de l’hebdomadaire The Funny Wonder. Identique à son modèle sur pellicule, ce vagabond émouvant poursuit ses facéties jusqu’en 1944, mis en images par divers auteurs dont l’excellent George William Wakefield (1887-1942), qui dessina aussi les aventures de Jackie Coogan puis celles de Laurel et Hardy. Près de trente années de présence, interrompue jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale.L’Italie, à un degré moindre, fait un clin d’œil au personnage, d’abord dans les pages de l’hebdomadaire Cine Comico, en 1935, dans un strip dessiné par le célèbre Carlo Cossio (1907-1964) — futur créateur de la série « Dick Fulmine » traduite en France « Alain la Foudre » —, où Charlot évolue aux côtés de Buster Keaton. Il est ensuite le héros d’une série de seize fascicules publiés par l’éditeur Torelli entre 1948 et 1949. Il lutte contre Fantogas, affronte les cannibales, visite l’Orient, le Mexique, le château fantôme… Tout au long de récits complets inédits en France, dessinés par Paolo Piffarerio (né en 1924, à Milan).
La France, seconde patrie de Charlot…
Curieusement, c’est en France que le personnage de Charlot va connaître sa carrière la plus longue et la plus fournie. Il lui faut pourtant attendre le 5 mai 1921 pour voir le jour dans le numéro 136 de l’hebdomadaire Cri-Cri publié par la Société Parisienne d’Édition (S.P.E.) des frères Offenstadt, lesquels proposent aussi, parmi d’autres titres fameux, L’Épatant et Fillette. Carrière qu’il poursuit pratiquement sans interruption, sinon durant la guerre, jusqu’en 1974, sous les crayons d’excellents dessinateurs.La première version, la plus longue et la plus fidèle au personnage, est l’œuvre de Raoul Thomen, né à Anvers le 24 juillet 1876. Arrivé à Paris vingt ans plus tard, il publie ses premiers dessins dans La Plume avant d’entamer une collaboration régulière avec les journaux de la S.P.E. qui se prolongera de 1899 à 1949. Il propose pages indépendantes, cartoons, caricatures, couvertures, vignettes, illustrations et bien sûr histoires en images dans Le Petit Illustré amusant, Sourire, Pêle-mêle, L’Illustré national, Le Rire, La Vie de garnison, le Petit Illustré, Fillette, L’Épatant, Cri-Cri… Le trait tout en élégance, jamais avare de détails, une force de travail qui ferait frémir nos auteurs contemporains, Thomen, décédé le premier août 1950, laisse une œuvre foisonnante, hélas introuvable aujourd’hui.
Son Charlot, respectueux du personnage joué par Chaplin, vit sous sa signature près de mille planches d’aventures délirantes publiées par Cri-Cri (jusqu’en juin 1937), poursuivies dans Boum ! (jusqu’en novembre 1937), dans L’As (de novembre 1937 à octobre 1938), et enfin dans L’Épatant où paraît l’ultime page dessinée par Thomen, dans le numéro 88 du 4 mai 1939. Ces histoires, sauf les trente-quatre dernières pages parues dans L’Épatant, ont été réunies dans une série de quinze albums de soixante et une pages aux couvertures superbes, édités de 1926 à 1938 par la S.P.E., dans la collection des Beaux Albums de la jeunesse joyeuse. « Les Aventures acrobatiques de Charlot » seront rééditées à la Libération, dans une présentation honteusement tronquée afin de limiter la pagination, la hausse du prix du papier dans l’immédiat après-guerre oblige. Bien que les longs textes placés sous les images, en grande partie écrits par Thomen, soient parfois indigestes, la lecture de ces albums demeure un véritable bonheur.
Au début des années cinquante, la réédition des albums de Thomen achevée, la S.P.E. décide de poursuivre la série dont les ventes sont excellentes. Thomen disparu, il faut faire appel à une nouvelle équipe d’auteurs.
Pas question de renouer avec la présentation d’avant-guerre, le nouveau « Charlot » doit s’exprimer dans ces bulles qui ont chassé les vieux illustrés. Roland de Montaubert (alias Pierre Colin, 1913-1983), par ailleurs scénariste des « Pieds nickelés » pour René Pellos, est chargé de l’écriture des scénarios.
En attendant l’arrivée de nouveaux dessinateurs, Pierre Lacroix, qui a déjà dessiné en dépannage les « Pieds nickelés » et qui assure la reprise de « Bibi Fricotin », signe un unique album : « Charlot et le balai atomique ».
En 1952, Jean-Claude Forest (1930-1998) dessine dans les pages de Vaillant (du n° 372 au n° 387), une histoire à suivre : « Charlot débute », laquelle ne semble pas faire le bonheur des lecteurs de l’hebdomadaire du parti communiste français.
C’est donc pour la S.P.E. que le futur créateur de la pulpeuse Barbarella se tourne et dessine (en écrivant parfois les scénarios) onze aventures de Charlot, de 1955 à 1962.
Afin d’assurer un rythme régulier à la publication de ces histoires proposées dans le mensuel Joyeuses Lectures, la S.P.E. fait appel à l’un de ses plus fidèles collaborateurs : Marcel Mat (1895-1982), créateur d’« Oscar le canard », pour alterner les épisodes.
C’est lui qui met un terme à la série, en 1972, signant d’ultimes histoires courtes destinées à L’Épatant-Journal des Pieds nickelés.
Selon lui, c’est après avoir demandé de la documentation à la maison qui distribue en France les films de Charlot que celle-ci a réclamé des droits aux éditions Ventillard, acquéreurs depuis peu de la S.P.E..
Ces temps où l’on pouvait utiliser un personnage du grand écran sans dépenser un centime étaient donc révolus : Ventillard — ne souhaitant pas payer — met un terme à la série qui, d’ailleurs, était de moins en moins une bonne affaire.
Forest entraîne son personnage dans des univers fantastiques, moyenâgeux, souvent éloignés de ceux fréquentés par l’éternel vagabond campé par Chaplin. Il s’attaque à Madrago Satanas, voyage dans le temps, de la préhistoire au futur en passant par le Moyen âge…
Celui de Mat est plus burlesque, plus proche des histoires imaginées par Thomen, tour à tour policier, sportif, navigateur solitaire, catcheur, jockey…
Ces deux tempéraments aux antipodes permettent aux lecteurs de savourer une vingtaine d’albums jusqu’à la publication du trente-septième volume (« Charlot sur la Lune », en 1963), signé par le dessinateur espagnol Serna (Jose Antonio Ramos Serna).
Notons que les éditions William ont racheté les droits d’exploitation du personnage pour la BD, au début des années 1970. Deux albums seulement, adaptant « Les Temps modernes » et « La Ruée vers l’or », dessinés sans conviction par l’énigmatique Magniaux, sont publiés en 1973 et 1974 : des échecs commerciaux qui ont mis un terme à l’aventure.
Souhaiter le retour du personnage ne serait pas sérieux, alors que la bande dessinée comme le cinéma ont évolué.
En revanche, une réédition des épisodes les plus intéressants sous forme d’intégrales serait la bienvenue, particulièrement concernant ceux réalisés par Thomen (ou encore ceux de Forest, ndlr), à condition de reprendre la version d’origine.
Henri FILIPPINI
Relecture, notes et compléments, recherches iconographiques et mise en pages : Gilles Ratier
Note : La lecture du Collectionneur de bandes dessinéesn° 92 (Hiver 2000/2001) est recommandée pour en savoir plus sur Thomen et merci aux sites http://dessine.blogspot.fr et http://www.bd-nostalgie.org pour certaines images que nous n’avons pas hésiter à reprendre pour illustrer convenablement cet article.
Williams a édité dans les années 70 Laurel et Hardy et Charlot aussi, non? (reprise italienne, je pense)…
Sur Gus Mager : http://conchita.over-blog.net/article-quand-sherlock-holmes-attaque-le-9e-art-37739466.html
Sur Wakefield : http://conchita.over-blog.net/article-laurel-et-hardy-en-bd-38975539.html
Il me semble également que le Charlot de « Film Fun » fut traduit en France dans l’illustré « Jumbo » dans les années 30…(comme Laurel et Hardy ou d’autres stars du muet)
Merci Fabrice pour ces compléments d’information…
La bise et l’amitié
Gilles Ratier
Bonjour !
Après vérification, Claude Guillot, dans son étude sur Jumbo dans le numéro 66 du Collectionneur de bandes dessinées écrit : « Jumbo publie Laurel et Hardy, Harold llyod et Jimmy Durant, trois des innombrables bandes de Film Fun…. Nous ne connûmes donc jamais, semble-t-il les exploits de Charlot, de Harry Langdon… »
Donc d’après l’ami Guillot il semble donc que ces Charlot n’ont jamais été publié en France.
Bien cordialement
Henri Filippini
Bon article, merci Henri,
Les anglophones peuvent également consulter « The Comic Art of Charlie Chaplin », un livre de Denis Gifford paru en 1989, à l’occasion du 100ème anniversaire de Charlot, chez l’éditeur britannique Hawk Books.
Bien amicalement,
Patrick Gaumer