Dans le cinquième volume de ses aventures, « Le Grimoire d’Elfie T5 : Les Reflets de Walpurgis », la jeune Elfie découvre le marais poitevin (entre La Rochelle et Niort) et des festivités réservées aux magiciens et sorcières depuis le temps de la mystérieuse fée Mélusine. Une nouvelle enquête pour la jeune adolescente, avec l’apport non négligeable de son grimoire magique, à l’issue de laquelle elle en aura appris beaucoup sur les dangers contemporains qui guettent cette zone humide remarquable et sa propre famille.
Lire la suite...Des nouvelles sur le front Jack Kirby !
L’actualité assez riche de ces dernières semaines concernant l’auteur Jack Kirby nous a paru suffisamment importante pour nécessiter un nouveau et copieux « Coin du patrimoine ».
Avec tout d’abord, par ordre d’importance, le procès Kirby /Marvel-Disney — 2e round !
Le 9 août 2013 dernier, la Cour fédérale de New York, présidée par le juge Robert Sack, a statué en faveur de Marvel. Elle a validé la décision de la Cour du District Sud dans le procès de Susan et Barabara Kirby, les filles aînées de Jack représentant le Kirby Estate, contre Marvel-Disney.
Fantastic Four, Avengers, X-Men, Thor, Hulk… appartiennent donc à Marvel. Les héritières du King of Comics sont déboutées une fois de plus des droits des co-créations de leur père…
Disney peut souffler : les très juteuses licences des plus gros blockbusters de ces dernières années sont sécurisées… Thor 2, Avengers 2 et Captain America 2 peuvent sortir sans problèmes…
Retour sur les méandres longs et complexes de l’affaire…
D’un point de vue juridique, dans la législation américaine, une création appartient de fait à son auteur, à moins qu’il ne soit salarié (contrat « work for hire »), auquel cas elle appartient à son commanditaire, l’éditeur.
Une société d’édition faisant travailler des créateurs indépendants (en « free-lance »), au statut plus précaire, bénéficie des droits des personnages pour une durée de 28 ans, après laquelle ils reviennent aux créateurs. Un éditeur doit donc racheter ces droits tous les 28 ans.
Signalons que Jack Kirby a toujours travaillé en « free-lance » pour Marvel…
Fin 1968, pour des raisons de santé, les Kirby décident de quitter New York pour la Californie. Le 22 mai, Jack demande un prêt à Goodman, l’éditeur de Marvel, pour ses frais de déménagement. L’éditeur lui consent 2 000 dollars, avec des intérêts de 6 % et remboursables à sa demande.
Le 31 août 1968, Jack rembourse la moitié de la somme qu’il a empruntée à Goodman…
En parallèle, un procès entre Joe Simon et Marvel concernant les droits de Captain America bat son plein… Contre l’assurance de la poursuite de ses commandes et l’engagement de recevoir la même somme que Simon en cas de négociations, Kirby s’entend avec Goodman pour témoigner contre son ancien partenaire.
À quelques semaines des délibérations du procès, des négociations secrètes ont lieu entre Joe Simon et Marvel, et, le 5 novembre 1969, contre 7 500 $, Joe Simon finit par signer un document dans lequel il admet avoir travaillé en tant que salarié en 1940-41, perdant rétroactivement les copyrights de Captain America.
La somme versée par Goodman est, sur sa demande, partagée entre l’avocat de Simon et Joe. Celui-ci en touche directement 3 750 $ et récupérera in fine un large pourcentage de l’autre part.
En juillet 1970, alors que Jack travaille dorénavant pour DC où une nouvelle carrière commence pour lui, Goodman lui fait signer un contrat identique à celui de son ex-partenaire, concernant la renonciation à ses droits sur Captain America et un statut “work for hire”.
Jack, qui doit toujours 1 000 $ à Marvel, veut définitivement rompre les ponts avec son ancien employeur… D’autant plus que Goodman lui promet à nouveau la même somme qu’à Joe Simon.
Kirby ne se doute pas qu’en abandonnant rétroactivement son statut de “free-lance”, il perd aussi les droits de tous ses autres personnages Marvel cocréés depuis 1961 !
Goodman poursuit l’infamie vis-à-vis de Jack en ne mentionnant pas la somme totale versée à Simon, notamment celle passée par l’intermédiaire de son avocat… Mais surtout, il ne le paye pas du tout !
L’éditeur triomphe : il a récupéré ses précieux droits et a berné tout le monde… Il offre tout un catalogue de personnages au nouvel acquéreur de Marvel, Cadence Industries…
Début 1972, Cadence Industries fait passer à Jack un nouveau document à signer, remplaçant celui de juillet 1970, jugé trop imprécis. Se sentant à son aise à DC, Kirby ne comprend toujours pas l’enjeu… En contrepartie, il se souvient des 2 750 dollars qu’il n’a pas perçus pour Captain America… Et Jack exige l’argent en échange de sa griffe. Il signe finalement le 30 mai 1972. L’argent bloqué lui sera envoyé en deux fois, le 7 avril et le 20 juin 1972.
À Marvel, le contrat de Jack est mal rangé et rapidement oublié…
Jack revient à Marvel en 1975, en tant que “free-lance”.
En 1976, un changement de la loi concernant la propriété intellectuelle accorde plus de pouvoir aux créateurs “free-lance”, en limitant la durée de l’exploitation des droits par les éditeurs à seulement deux périodes de 28 ans. Les maisons d’édition font désormais signer des contrats « work for hire » à leurs créateurs. Pour ceux travaillant déjà pour eux, un document simplifié et rétroactif est donné à parapher afin de récupérer les copyrights de leurs créations.
Jusqu’à présent, la signature d’un avenant au dos des chèques par les auteurs (nécessaire pour qu’ils les encaissent) suffisait à l’éditeur pour justifier de sa détention des copyrights pour une période de 28 ans.
La nouvelle loi s’applique à partir de 1978.
Jack, flairant des profits, se contente de signer les avenants au dos des chèques et ne remplit pas le contrat « work for hire » simplifié et rétroactif que le rédacteur en chef Jim Shooter lui fait parvenir cette année-là… Mais celui-ci se méfie et retient en otage les pages originales de Kirby.
S’ensuit une querelle interminable et douloureuse entre Jack et Marvel pour la récupération de ses planches.
N’ayant plus sous la main le contrat de mai 1972 et ayant même oublié son existence, Marvel est incertain du statut de Jack chez eux.
L’éditeur prend peur et envoie à Jack un contrat « work for hire » sur mesure et extrêmement défavorable à ses intérêts. Jack ne signe toujours pas et prend un avocat.
La bataille épuisante dure jusqu’en 1987, date à laquelle les avocats de Marvel finissent par retrouver l’accord de 1972.
Rassurés, ils se contentent de lui faire signer le contrat « work for hire » normal, sécurisant les créations du King depuis 1975. Ils lui rendent enfin les planches du Silver Age en leur possession : seulement le dixième de sa production, une large partie du reste ayant entre-temps été volée dans les locaux Marvel.
Jack, épuisé et amer, meurt en 1994.
En 1999, un énième procès opposant les héritiers de Siegel (le cocréateur de Superman) à la Time Warner détenant DC est finalement gagné par les plaignants, grâce à la défense efficace de l’avocat Marc Toberoff. La famille Siegel parvient à récupérer un pourcentage sur les intérêts perçus grâce au personnage depuis 1999…
En août 2009, Disney rachète Marvel pour 4 milliards de dollars ! Le monde de la BD est dans tous ses états, notamment la famille Kirby. Fin 2009, elle attaque Disney pour les copyrights de 45 personnages (The Fantastic Four, The Incredible Hulk, The Mighty Thor, Iron Man, The X-Men, The Avengers, Ant-Man, Nick Fury, The Rawhide Kid et… Spider-Man ?!). La plainte est déposée au District sud de New York par les deux filles aînées de Jack, Susan et Barabara. Elles se sont également assuré la défense de l’avocat Marc Toberoff. Les héritiers de Jack demandent le retour des droits des personnages à l’issu des 56 ans (2 x 28 ans) d’exploitation. Pour sa défense, Disney affirme que Jack travaillait sous contrat (« work for hire ») et que Marvel est seul propriétaire des créations. Les documents précités sont utilisés comme preuve.
L’enquête dure deux ans. Stan Lee, John Romita et Roy Thomas témoignent que les personnages Marvel ont été créés par Stan Lee, alors directeur de publications, Jack étant employé en « work for hire ». Les spécialistes Mark Evanier et John Morrow, représentant le Kirby Estate, ne sont même pas écoutés, pour la simple raison qu’ils n’étaient pas personnellement témoins des faits…
Le 28 juillet 2011, le procès opposant le Kirby Estate à Marvel /Disney avait conclu en première instance en faveur de Marvel. Le juge du District sud de Manhattan Colleen McMahon statue que Marvel Worldwide gardera la propriété des personnages.
Susan et Barbara Kirby ont donc fait appel auprès de la Cour fédérale… Sans succès, comme on vient de l’apprendre.
Reste à savoir si Neal et Lisa Kirby, les deux derniers enfants de Jack, ne vont pas à leur tour se lancer dans la bataille auprès de la Cour de Californie…
La bataille n’est donc pas terminée !
Maintenant, dans le registre des meilleures nouvelles, signalons d’abord la sortie du Jack Kirby Collector n° 61.
Une nouveauté éditoriale : la couleur ! Malgré la baisse du format (précédemment tabloïde, à la taille des originaux), l’éditeur John Morrow publie toujours l’un des tout meilleurs magazines mondiaux consacrés à la BD, par la richesse des informations et l’iconographie. Le thème de ce numéro : Jack Kirby en tant que scénariste. Si son écriture est parfois emphatique, l’étude de son style et des concepts abordés tout au long de la carrière de Jack s’avère passionnante… Une interview de Kirby, un article de Mark Evanier, une comparaison scénario — planches de « Destroyer Duck », du graphic novel du Silver Surfer et des histoires inédites (« True Divorce Tales » et « Stuntman ! ») complètent ce riche numéro, le tout sous une magnifique couverture peinte du King of Comics.
Vous pouvez commander directement la revue auprès de l’éditeur à l’adresse suivante :
http://twomorrows.com/index.php?main_page=product_info&products_id=1095
ou aller l’acheter à la librairie Déesse, 8 rue Cochin à Paris…
Autre réjouissance, nous venons d’apprendre que DC vient d’éditer l’intégrale en un volume d’« In the Days of the Mob ».
Cette anthologie, consacrée aux crimes véridiques des années de la prohibition, est certainement l’une des meilleures séries de Kirby des années 1970, annonçant avec vingt ans d’avance les « Sin City » de Frank Miller.
Cet ouvrage à 40 $ publie pour la première fois les deux numéros du magazine noir et blanc de DC des années 1970.
Le deuxième n’étant jamais paru et étant encré par Mike Royer, on en salive d’avance !
Signalons également la sortie de « Science Fiction » (Titan Books), rééditant le meilleur des histoires de Simon & Kirby consacré à ce genre.
Un pavé de 352 pages, entièrement restaurées par Harry Mendryk.
L’occasion de (re)découvrir pour 35 $ seulement l’étonnant « Blue Bolt », l’extraordinaire « Race For The Moon », avec les Three Rocketeers (encrés par Al Williamson) et les tout aussi formidables petites histoires d’Alarming Tales…
Dans notre pays, l’éditeur Neofelis prépare de bien jolies choses.
La première est la publication de l’intégralité « Fighting American » de Simon & Kirby en un volume de 200 pages couleur, limité à 500 exemplaires.
Créé en 1954 chez Crestwood, pour profiter de la vague superhéros à la télévision (avec la série « Adventures of Superman »), « Fighting American » devient rapidement une parodie irrésistible de Captain America, dans l’Amérique paranoïaque de l’époque Maccarthyste.
L’éditeur lance actuellement une souscription : http://fr.ulule.com/fighting-american/
La deuxième est ma biographie de Jack Kirby, « Jack Kirby, le superhéros de la BD », chez ce même éditeur, dont le premier tome en est actuellement au stade de la maquette et qui devrait sortir pour cette fin d’année. Nous vous donnerons plus de nouvelles, très vite !
Autre bonne nouvelle, le Kirby Estate, déjà responsable du Kirby Museum (www), poursuit sa collecte pour acheter un musée physique dans le quartier où a grandi Jack (le Lower East Side de New York). À ce jour, la cagnotte s’élève à près de 75 % de la somme nécessaire. Vous pouvez faire vos dons pour l’opération Brick and Mortar sur http://kirbymuseum.org/popupcampaign/.
D’autre part, une nouvelle campagne Kirby4Heroes, en faveur des dessinateurs américains démunis, a été lancée par Jillian Kirby, la petite-fille de Jack…
À l’occasion du 96e anniversaire de Kirby le 28 août prochain, la jeune femme réunit des fonds au profit de Hero Initiative, l’association aidant les auteurs de comic books dans le besoin.
L’année dernière (http://twomorrows.com/index.php?main_page=product_info&products_id=1095), plus de 6 000 $ avaient été levés grâce à la même opération…
Vidéo sur YouTube : http://www.youtube.com/watch?v=tVhB2PGh4lg
Laissons à Jillian Kirby le soin de présenter son projet :
« Quand j’ai démarré Kirby4Heroes, c’était pour me rapprocher de mon grand-père qui est mort l’année avant ma naissance. Je dois admettre être impressionnée à la fois par l’artiste, le parent et l’être humain qu’il était. Mon grand-père n’aurait pas hésité à promouvoir cette campagne pour aider les créateurs de comics ayant besoin d’un soutien financier et médical. Il n’a jamais refusé son aide à quiconque…
Mon père m’a souvent raconté une anecdote dévoilant la nature charitable de Jack Kirby. C’était pendant la cérémonie du Bar Mitzvah d’un de ses neveux dans une synagogue du Lower East Side à Manhattan au début des années 60. Après la cérémonie, la famille avait modestement organisé un petit buffet dans le hall de la synagogue. Quand il a remarqué qu’un sans-abri suivait l’office depuis l’entrée, Jack s’est aussitôt dirigé vers lui, l’a pris par le bras, l’a conduit dans la salle où il l’a fait s’asseoir et lui a servi une assiette de nourriture. Tout cela, sans dire un mot…
Mon grand-père a grandi dans la misère, a connu la faim. Ce simple geste, caractéristique de mon grand-père, m’a inspiré pour lever des fonds et promouvoir Hero Initiative. Cette charité pour la communauté des comics perpétue la générosité qu’avait Jack envers son prochain.
L’année dernière, j’ai personnellement passé des emails, des coups de téléphone… aux libraires en Californie. Grâce à la vidéo sur YouTube, j’ai pu récolter des dons privés pour Hero Initiative. Plusieurs libraires ont relayé l’information sur leur site, sur Facebook et grâce à des affiches et des flyers de Kirby4Heroes. Certains libraires ont même versé des pourcentages sur leurs ventes du 28 août, date du 95e anniversaire de mon grand-père.
D’autre part, le 28 août dernier, Hero Initiative a demandé à 100 artistes de comic books de faire un dessin pour fêter cet anniversaire. Ces œuvres ont été vendues aux enchères au profit d’Hero Initiative. Une vidéo du dessinateur Tim Seeley et de mon père a fait connaître cet événement baptisé Wake Up and Draw. La campagne Kirby4Heroes a en tout rapporté plus de 6 000 $ à Hero Initiative.
Cette année, en plus des librairies californiennes de l’année dernière, je compte impliquer les plus importants professionnels de la BD en Amérique. En plus de la promesse d’un pourcentage de leurs ventes du jour du 96e anniversaire de mon grand-père, certains d’entre eux ont eu de nouvelles idées, comme celle d’accueillir une fête d’anniversaire et de vendre des originaux au profit de Kirby4Heroes. Nous allons également renouveler l’opération Wake Up and Draw.
En plus des libraires, j’espère également toucher les fans de comic books du monde entier.
En parallèle, j’essaye de faire connaître l’œuvre de mon grand-père au public qui aime les films de superhéros tirés des personnages inventés ou co-inventés par lui. J’espère cette année parvenir à lever 10 000 $ pour Hero Initiative et entends bien continuer à faire connaître mon grand-père, dans la perspective de son 100e anniversaire en 2017 ».
– Jillian Kirby
Pour aider cette campagne, qui nous éloigne drastiquement du premier point soulevé dans cet article, vous pouvez envoyer vos dons via Paypal à www.HeroInitiative.org. N’oubliez pas d’indiquer que c’est Kirby4Heroes qui vous envoie.
Jean DEPELLEY
mises en pages : Gilles RATIER
Bravo pour cette article très fouillé. Je ne vois aucune mention ou référence à Comic Book Creator n°1 (printemps 2013) qui contient un dossier écrit par John B. Cooke sur le même sujet avec les mêmes documents. Un oubli ?
Très bien documenté. Merci ! Toujours un plaisir de vous lire, Jean.
Merci pour vos commentaires ! Effectivement, j’aurais également dû parler de Comic Book Creator n°1, sorti il y a quelques mois. Mais je ne l’ai pas encore vu (contrairement au n°2, dédié à Kubert). En tout cas, ça fait plaisir de voir à nouveau Jon à l’œuvre ! En espérant qu’il sorte enfin certains projets laissés de côté (Swamp Monsters, Heavy Metallurgy…). Autre news oubliée, l’intégrale de Kamandi annoncée chez Urban Comics. Une très bonne idée qui va permettre aux lecteurs français de redécouvrir cette formidable série en couleurs et sans les retouches des ateliers Arédit…