Dans le cinquième volume de ses aventures, « Le Grimoire d’Elfie T5 : Les Reflets de Walpurgis », la jeune Elfie découvre le marais poitevin (entre La Rochelle et Niort) et des festivités réservées aux magiciens et sorcières depuis le temps de la mystérieuse fée Mélusine. Une nouvelle enquête pour la jeune adolescente, avec l’apport non négligeable de son grimoire magique, à l’issue de laquelle elle en aura appris beaucoup sur les dangers contemporains qui guettent cette zone humide remarquable et sa propre famille.
Lire la suite...« Blueberry l’intégrale » T1 par Jean Giraud et Jean-Michel Charlier
Attendue depuis fort longtemps par tous les cinéphiles et bédéphiles adeptes à la fois des westerns et des récits feuilletonesques selon Jean-Michel Charlier, voici enfin publiée chez Dargaud le premier volume de l’intégrale « Blueberry ». Cette fascinante série (dont la première aventure, « Fort Navajo », est publiée à partir du 31 octobre 1963) aura indéniablement marquée l’histoire du célèbre journal Pilote, lancé le 29 octobre 1959 par quelques auteurs dont Charlier, René Goscinny et Albert Uderzo. Il aura malheureusement fallu attendre la disparition récente de Jean Giraud (le 10 mars 2012), dessinateur à la renommée devenue internationale, pour voir surgir cette prestigieuse intégrale : celle-ci présentera, en 9 volumes, l’ensemble des planches publiées chronologiquement dans Pilote, assorties d’une nouvelle mise en couleurs, de corrections diverses et d’un riche dossier documentaire signé José-Louis Bocquet.
Rappelons en introduction de cet article la genèse de la série (nous invitons par ailleurs nos lecteurs à consulter le long article de Gilles Ratier consacré aux débuts de Giraud : http://bdzoom.com/47677/patrimoine/pour-se-souvenir-de-jean-giraud%E2%80%A6/) : en 1963, le scénariste Jean-Michel Charlier s’est déjà fait un nom avec sa très populaire série d’aviation « Buck Danny », lancée depuis 1947 dans le journal Spirou, ainsi, au sein de Pilote, qu’avec sa non moins fameuse série consacrée au pirate « Barbe-Rouge » (imaginé depuis 1959 ), soit deux sagas dessinées par Victor Hubinon. Pour concurrencer les deux héros phares du genre et du moment (« Jerry Spring » de Jijé (1954) et « Lucky Luke » de Morris (1948), tout deux publiés par les éditions Dupuis dans Spirou), Charlier cherche à créer « son » western, pour ce qui sera le projet le plus ambitieux de sa carrière et de fait sa plus remarquable épopée. Charlier contacte alors le maître du genre, Jijé, qui lui préconise un nom, celui de son jeune assistant Jean Giraud (25 ans en 1963). Ce dernier, qui revient d’un long séjour au Mexique, a alors des rêves américains plein la tête, dans une époque certes propice à l’American Way of life. Le duo Charlier/Giraud imagine donc les aventures d’un lieutenant passablement tête brulée, pro indien et insubordonné notoire, confronté aux Apaches aux lendemains de la Guerre de Sécession (1861 – 1865). Un physique (inspiré, avec son accord, de l’acteur Jean-Paul Belmondo) et un nom (Blueberry, traduction anglaise du mot « myrtille »), trouvé par Jean Giraud dans l’édition américaine du magazine National Geographic, achèveront le forger la légende naissante.
Inséparables de par leurs immenses talents et leurs parcours (mexicains…) respectifs, Jijé et Giraud resteront de grands amis : c’est ainsi Jijé qui dessine la toute première couverture mettant en scène Bluberry dans « Fort Navajo », pour la prépublication de cette aventure dans Pilote Hebdo entre le 31 octobre 1963 (n° 210) et le 02 avril 1964 (n° 232). Celle-ci sera ensuite publiée en album en septembre 1965, sous un second visuel toujours issu de l’imagination de Jijé. Il faut remarquer que la première illustration parue en couverture de Pilote n’est pas signée. Bien qu’éloignée du style encore assez hésitant de Giraud, elle cherche à traduire au mieux la geste symbolique de l’univers western, en utilisant des codes archétypaux directement compréhensibles de tous. Soit l’image épique du cavalier au cheval cabré, les figures grimaçantes et antipathiques des Indiens, le décor constitué de canyons et de plateaux (mesas) typiques des confins de l’Arizona et du Nouveau-Mexique. Jijé magnifie son dessin avec le déploiement d’un art maîtrise de l’espace et du mouvement : la fuite en avant du soldat poursuivi captive l’attention, en enchaînant sur le regard tourné vers la gauche de Blueberry. Ce dernier, d’un même geste, semble inviter ses soldats et les lecteurs, demeurés hors-champ, à entrer dans la bataille. À l’arrière-plan, nuages de poussière et masses rocheuses séparent sur différents plans les groupes de personnages, tandis qu’une ligne de fuite en forme d’entonnoir semble voire émerger un flot de peaux-rouges évoqué nerveusement en quelques coups de pinceau….
Pour le premier plat de « Fort Navajo », Jijé restitue ces mêmes codes dans une aquarelle encore plus dynamique, où la perspective de la course-poursuite entraîne immanquablement les lecteurs hors-champ et vers la droite, à ouvrir l’album pour en connaître la finalité. Il est indéniable que cette magnifique « Chevauchée fantastique » (film de John Ford en 1939) va longuement frapper l’imaginaire de la bande dessinée franco-belge : en témoigne par exemple l’ancrage traditionnel du Far West redonné en janvier 1976 par la couverture du dixième tome de la série « Les Tuniques Bleues » (« Des Bleus et des tuniques », éditions Dupuis, par Louis Salvérius et Raoul Cauvin), visuel quasi similaire dont seule la tonalité plus humoristique modifie sensiblement la donne…
En 1968, la réédition de « Fort Navajo » par Dargaud verra une première réadaptation de la maquette de couverture initiale : la même illustration est présentée dans un cadrage plus serré, la marge blanche initiale de la Collection Pilote ayant disparu. Le bandeau titre semble alors définitif : « Fort Navajo, une aventure du lieutenant Blueberry », en-tête qui ne disparaîtra qu’en juillet 1973, pour la parution du 14ème titre de la série (« L’Homme qui valait 500 000 $ »)… Mais demeurera plus ou moins utilement sur les rééditions successives de tous les albums précédents jusqu’au milieu des années 1990 !
Pour le visuel de la présente intégrale (1), les éditions Dargaud ont réutilisé un dessin à la gouache de Giraud, visuel employé à l’origine pour la couverture du n° 262 de Pilote en octobre 1964 : le magazine initiait à cette époque la prépublication de la 3ème aventure de Blueberry, « L’Aigle solitaire », récit qui allait s’étendre du 22 octobre 1964 au 08 avril 1965 (n° 285). Les deux albums suivants compléteront ce premier cycle de cinq titres, qualifié de Cycle des Premières Guerres indiennes (voir pour la chronologie de la saga le site officiel : http://www.dargaud.com/blog/blueberry/blueberry.htm). Comme le souligne José Louis Bocquet dans le dossier de préface, la production de Giraud entre à cette occasion dans une cadence infernale puisque le dessinateur réalisera cinq albums de 46 planches (199 pages crayonnées et encrées !) entre octobre 1963 et mars 1966…
Scénaristiquement, il ne faut pas oublier que Charlier avait largement anticipé à la fois la création de Blueberry et de ce premier cycle en imaginant dès octobre 1949 dans Spirou (n° 600) un récit western intitulé « Fort Cheyenne » : illustré par René follet ce texte mettait déjà en scène un soldat désobéissant, stationné dans un fortin de l’Arizona et en lutte contre les Indiens…
Pour ce même visuel comme pour les différentes couvertures de Jijé, il est bien sûr difficile aujourd’hui de retracer la genèse ou l’inspiration graphique ex acte : l’époque des années 1950-1960, très propice au genre Western (plus de 450 films produits en vingt ans…) ne manquera pas d’affiches et de titres ainsi susceptibles d’avoir diversement marqués nos auteurs, outre leur propre voyage en terre américaine. Citons comme exemples « Fort Apache » (John Ford, 1948), « Fort massacre » (Joseph F. Newman, 1958), « La Conquête de l’ouest » (John Ford, 1962) ou encore l’exemple historique de « La Flèche brisée » (Delmer Daves, 1949), premier film notoirement pro indien de cette période hollywoodienne.
À l’instar des réalisateurs évoqués, Charlier, Jijé et Giraud auront définitivement fait bascule l’âpre réalité de l’histoire américaine dans l’épopée des cases. Quand la légende est plus belle que la réalité… Dessinez-la !
(1) : d’autres intégrales ont préexisté :
- Intégrale Rombaldi : 6 volumes en 1983 et 1984 pour toute la série « Blueberry » et les 3 premiers tomes de « La Jeunesse de Blueberry » (signés Charlier et Giraud).
- Intégrale Dargaud : un seul volume paru en 1988 dans la collection Omnibus.
- Intégrale Niffle prévue en 4 volumes en noir et blanc : seul le tome 1 est paru en 2002.
- « Les Monts de la superstition » : intégrale des tomes 11 et 12 (Dargaud, 2003)
- Intégrale « Blueberry » Le Soir : intégrale des albums 1 à 23 de « Blueberry » et 1 à 5 de « Mister Blueberry » par ordre chronologique en 15 albums toilés, avec carnet de croquis dans les huitième et quinzième volumes. Édition spéciale publiée par l’hebdomadaire belge Le Soir (Dargaud, 2009).
Philippe TOMBLAINE
http://couverturedebd.over-blog.com/
« Blueberry » l’intégrale T1 par Jean Giraud et Jean-Michel Charlier
Éditions Dargaud (29, 99 €) - ISBN : 9782205071238
Bonjour
Merci pour toutes ces informations. Au risque de me répeter : Les couleurs de cet intégrale sont très belles et très proches des planches de Pilote.
Retrouver les planches des premiers Blueberry dans leur couleur d’origine c’est comme découvrir dans un musée une toile de gauguin alors que l’on n’avait vu qu’une copie sur une boite de chocolat.
A quand un intégrale de Barbe Rouge de la même veine ?
Jacques
Bonjour
Tout d’abord merci pour ce site très bien fait et qui nous en apprend tous les jours sur l’univers de la BD.
Je suis fan des intégrales, surtout celles de Dupuis (Gil Jourdan,Spirou,Buck Danny,…)
J’aurai voulu savoir si il était prévu la réedition en intégrale d’une série que j’adorais quand j’étais gamin, à savoir « Vieux Nick et Barbe-Noire » de Remacle.
Merci d’avance pour votre réponse.
Daniel Hanicq
Bonjour Daniel !
Aux dernières nouvelles, « Le Vieux Nick et Barbe-Noire » de Marcel Remacle, n’est pas prévu dans l’immédiat chez Dupuis (ce qui ne veut pas dire que cela n’arrivera pas un jour ou l’autre). Le Coffre à BD avait tenté d’en rééditer l’intégrale (comme il l’avait fait pour les « Marc Lebut » et les « Sandy et Hoppy »), entre 2005 et 2007, mais les ayants-droit ont finalement mis leur véto à l’entreprise après la parution des 3 premiers tomes !
Bien cordialement
Gilles Ratier
BONJOUR
Moi aussi j’espére un intégrale du Vieux Nick., de marc Dacier et de Valhardi
Comme cela ne viens pas, il faut insister et encore insister auprès des éditions Dupuis, il faut leur écrire, faire remonter l’information auprès des représentants de Dupuis, et même s’il le faut s’inviter à leurs conseils de rédaction. Ils ne doivent pas oublier de tenir compte des désirs des clients. car sans eux ! ! !
cordialement
.
Les couvertures par Jijé sont à l’Aquarelle, celles par Giraud à la Gouache (plus tard à l’Acrylique, aussi). Cest à noter (et à rectifier…) parce que c’est exactement là, où dans les 15 premières années de sa carrière, la technique de Giraud est vraiment différente de celle de Jijé.
Nous somme nombreux à regretter que cette intégrale ne soit pas en noir et blanc.
Rétablir les couleurs d’origine aurait dû être réservé aux albums vendus séparément (toujours disponibles rappelons-le). Le changement de papier et la remise en couleurs de ces derniers ont abouti à des résultats catastrophiques.
Publier une intégrale Blueberry en noir et blanc comme celle de Jerry Spring aurait été une bien meilleure façon de faire admirer le trait de Jean Giraud dans toute sa pureté.
Là, on a juste une nouvelle intégrale qui n’apporte rien. C’est vraiment dommage.
Voila une bonne intégrale, qui démarre hélas une fois ses deux créateurs disparu. J’apprécie pour ma part la qualité du papier; épais et mat, le format agrandi (il y a beaucoup de textes dans les dialogues de Monsieur Charlier, et nos yeux commencent à fatiguer avec l’âge!), ainsi que la préface introductive de Monsieur Bocquet. Sans oublier le formidable document d’époque qu’est le tapuscrit des deux premières pages de Fort Navajo. Bien cordialement.
bonjour, merci pour votre article. Mais avez-vous des critiques à faire sur cet album ? y avez-vous vu des coquilles, oublis… Moi je trouve dommage que la couverture du Pilote qui introduit la 2e histoire ne soit pas reprise… j’espère qu’elle sera dans le prochain tome !! L’introduction nous apprend-elle des choses ou reprend-elle des informations déjà connues ? merci !
Sans vouloir minorer le travail de GIRAUD je me dois de rectifier quelques chiffres : ce n’est pas 230 planches que Gir a dessiné entre octobre 1963 et mars 1966 mais 199 planches : Jijé l’a remplace sur 9 planches de « Tonnerre à l’Ouest » et 22 planches de « Le cavalier perdu ». Je m’étonne que José-Louis Boquet et Gilles Ratier, habituellement précis, n’aient pas relevé cette erreur.
Pendant la même période Jijé a réalisé 309 planches (Jerry Spring, Jean Valhardi, Dr Gladstone, O Virginie & divers RC)!!!
Cher Jacques…
Gilles Ratier a bien précisé tout ça – et en dit bien plus encore – dans l’article suivant : http://bdzoom.com/47677/patrimoine/pour-se-souvenir-de-jean-giraud…/ (et également dans la biographie « Jean-Michel Charlier vous raconte… » à paraître en septembre au Castor astral), mais t’avoue qu’il n’a pas recompté le nombre de pages exact quand il a relu l’article de Philippe Tomblaine. Quant aux dossiers de José-Louis Bocquet, si j’ai bien compris, l’éditeur ayant décidé de couper en deux intégrales le premier cycle de « Fort Navajo » au dernier moment, il a reporté les infos sur la genèse de la série et sur l’apport de Jijé dans le 2ème tome à paraître incessamment sous peu : oui, je sais, ce n’est guère satisfaisant pour les lecteurs, mais les chroniqueurs et spécialistes BD ne font pas toujours ce qu’ils veulent et doivent souvent composer avec les volontés des éditeurs (c’est quand même eux qui payent..).
La bise et l’amitié
Gilles
Cher Gilles,
Je te remercie de ces précisions, donc Jijé sera remis en selle dans le tome 2 de l’intégrale.
Yeepee!
Bons baisers d’Aire (BBDA)
Jacques