Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« Cherub » T1 (« 100 jours en enfer ») par John Aggs, Ian Edginton et Robert Muchamore
L’espionnage, un genre qui marche en littérature de jeunesse !
Il y a plus de dix ans, l’écrivain britannique Anthony Horowitz, connu pour ses polars joliment décalés et ses histoires fantastiques pimentées d’un humour british à souhait, réinventait le roman d’espionnage pour ados avec son personnage d’Alex Rider, 15 ans et « espion malgré lui ».
Alex a roulé sa bosse aux quatre coins du monde et les ados l’ont suivi.
D’autres séries sont nées, d’autres héros, d’autres jeunes espions …
Cherub, signé Robert Muchamore
Mais Robert Muchamore, écrivain britannique aussi, né en 1972, et ancien détective privé, connaît un succès sans précédent dans le genre avec « Cherub ».
Les adolescents, garçons ET filles, en sont fous. Ils lisent sans problème ces gros romans, en parlent entre eux, se les prêtent, attendent avec impatience le prochain épisode. Un véritable phénomène qui amène à la lecture des ados peu familiers de l’univers des livres. Cette série est suivie par un peu plus de 3 millions de lecteurs à travers le monde.
Cherub, l’école
Cherub est une école ultra secrète, qui n’existe pas officiellement. L’on y forme à l’espionnage des enfants et adolescents, âgés de huit à dix-sept ans, en rupture sociale et familiale. Les créateurs de cette école atypique sont partis du principe que l’on ne se méfie pas d’enfants et d’adolescents, qui peuvent ainsi s’infiltrer plus aisément dans toutes sortes de milieux que l’on veut surveiller ou démanteler. Cherub est située dans un campus très isolé quelque part en Angleterre et les résidents y reçoivent une éducation de qualité et un entraînement très rigoureux. Ils sont envoyés en missions sur le terrain, partout dans le monde, et reviennent ensuite vivre au campus.
Cherub, la série
Chaque tome de la série raconte une nouvelle mission : débusquer le plus puissant trafiquant de drogue du Royaume-Uni ; faire évader un détenu emprisonné dans une prison enfer d’Arizona ; enquêter sur les activités d’un truand dans un quartier chaud de Londres ; démasquer un milliardaire, gourou d’une secte appelée « Les survivants » ; infiltrer un groupe terroriste luttant pour faire cesser l’utilisation des animaux dans les laboratoires ; séjourner en Russie pour déjouer les plans d’un homme d’affaires russe marchand d’armes ; faire cesser une guerre des clans meurtrière dans une ville d’Angleterre ; comprendre les raisons du crash d’un avion anglais au-dessus de l’Atlantique ou infiltrer un groupuscule anarchiste.
Chaque mission peut se lire séparément l’une de l’autre, mais l’on a intérêt à les lire dans l’ordre de parution puisque les héros évoluent dans leurs amitiés, leurs centres d’intérêt, leurs amours et leur rapport au monde.
Les treize tomes de la série, publiés en version grand format :
Mission 1 : « 100 jours en enfer » – Mission 2 : « Trafic » – Mission 3 : « Arizona Max » – Mission 4 : « Chute libre » – Mission 5 : « Les Survivants » – Mission 6 : « Sang pour sang » – Mission 7 : « À la dérive » – Mission 8 : « Mad dog » – Mission 9 : « Crash » – Mission 10 : « Le Grand jeu » – Mission 11 : « Vandales » – Mission 12 : « La Vague fantôme » – Mission 13 : « Le Clan Aramov ».
Cherub, la BD
La rumeur courait sur les blogs et alimentait les commentaires et les attentes depuis quelque temps : « Cherub arrive en BD ! … »
La voici donc enfin tout juste sortie, made in England, fidèlement adaptée du roman par deux auteurs britanniques. John Aggs, le dessinateur, est issu des webcomics, et il est considéré comme l’un des jeunes talents les plus prometteurs de la bande dessinée d’outre Manche. Quant au scénariste, Ian Edginton, il est un prolifique auteur de comics.
On fait, dès la première planche, la connaissance de James Adams,  l’un des principaux personnages de la série. James n’a alors que douze ans et sa vie n’est guère un long fleuve tranquille. Il collectionne les embrouilles,  les échecs, les renvois. Il ne connaît pas son père. Sa mère, alcoolique, vient de mourir, et sa jeune sœur Lauren, dont il s’est toujours occupée et à laquelle il est très attachée, part vivre avec son père. C’est dans l’orphelinat sordide où on l’a enfermé, faute d’adultes pour le guider, qu’il est recruté par Cherub. Ce qui l’empêche sans doute de basculer définitivement dans la délinquance. Commence alors pour lui une autre vie, à laquelle il accède au terme de cent jours d’entraînement épuisants, qui constituent une véritable épreuve initiatique. Il  y révèle d’évidentes qualités. Sa petite sœur Laureen, à laquelle il est très attaché, viendra rapidement le rejoindre à Cherub et montrera qu’elle est une fille de caractère ! L’autre vie de James peut donc commencer. Un autre James voit le jour.
Cette première bande dessinée, très « comic » dans son traitement graphique, est une adaptation efficace du roman. Tonalités sombres souvent, cadrages serrés, scènes d’action et personnages toujours en mouvements, tout cela est bien au rendez-vous. Certains fans seront peut-être déçus par l’aspect juvénile de leur personnage, tel qu’on le découvre dès la première page. Mais James, avant d’être un héros baroudeur à travers le monde, est d’abord un garçon fragile et malheureux, dont on se moque à cause de sa mère et qui doit faire face à une situation personnelle très traumatisante. Ce côté-là du personnage est bien rendu dans l’album.
De l’action, des rebondissements, du suspense, du danger, des adolescents pleins de ressources et d’énergie, un scénario – presque- crédible, documenté, mené sans temps morts, qui utilise les ressorts de la géopolitique actuelle, tels sont les ingrédients de cette histoire d’espionnage. Parallèlement à la mission, les jeunes lecteurs prendront plaisir à suivre leurs personnages dans leur vie plus ordinaire, à s’amuser des déconvenues de James avec les filles, à s’identifier aux filles de Cherub, qui ne s’en laissent pas compter et font des prouesses sur le terrain.
Ce mélange de plausible, de presque vrai, de chronique d’adolescence, et d’aventure exaltante, est sans doute la clé du succès de cette série.
Un site internet en français est dédié à la série, sur lequel on trouve la présentation des différents épisodes, des bonus, des explications sur l’univers de Cherub, des concours … www.cherubcampus.com
 Catherine GENTILE
« Cherub » T1 (« 100 jours en enfer ») par John Aggas, Ian Edginton et Robert Muchamore
Éditions Casterman (13 €) – ISBN 978 2 203 04838 6
Ce n’est pas tant une influence « comic » que l’on recent, mais bien une grande influence du manga Akira de Katsuhiro Otomo.