PLUS DE LECTURES DU 9 AVRIL 2007

“ Une aventure de Spirou et Fantasio par… T.2 : Les marais du temps ” par Frank Le Gall, “ Isabelle : intégrale T.1 ” par Will, André Franquin, Raymond Macherot et Yvan Delporte, “ Le Janitor T.1 : L’ange de Malte ” par François Boucq et Yves Sente, “ L’art attentat ” par Francis Masse et “ Par les chemins noirs T.1 : Les prologues ” par David B.

 


Cliquez sur l’appareil photo pour découvrir les couvertures des albums chroniqués.


 


Nos sélections hebdomadaires de 5 albums se suivent, semaine après semaine, mais ne se ressemblent guère :


 


Une aventure de Spirou et Fantasio par… T.2 : Les marais du temps ” par Frank Le Gall


Editions Dupuis (13 Euros)


Après diverses tentatives graphiques et narratives pour toucher un nouveau public, les personnages de Spirou et de Fantasio retrouvent enfin, dans un album parallèle à la série officielle, le souffle de leur grande époque, celle où ils étaient dessinés par André Franquin. Sans pour autant marcher complètement sur les traces du maître belge, Frank Le Gall retrouve ce cocktail d’aventure, d’humour et de fantastique urbain qui faisait le charme de ces péripéties facétieuses, publiées, durant les années 1950 et 1960, dans l’hebdomadaire au titre éponyme. Spirou, son comparse Fantasio, l’écureuil Spip, le scientifique et pittoresque comte de Champignac, et même son ennemi-ami juré Zorglub, sont tous de retour pour entreprendre un fabuleux voyage dans le temps… En effet, Zorglub a mis au point une machine qui permet de fouiller le passé, mais qui va tomber en panne en 1865, en plein dans le quartier du Marais, à Paris. Nos héros vont également aller se fourvoyer dans ce XIXème siècle plutôt mal fréquenté, où le «méchant» s’est bêtement laissé enliser. Ils vont tenter de le ramener dans notre époque, ce qui sera possible grâce à l’intervention d’un petit génie de l’informatique. Tout en proposant un récit légèrement décalé, l’auteur de «Théodore Poussin» respecte les caractères entiers des personnages et met son trait élégant et clair, pur produit de la tradition franco-belge, au service des nouveaux lecteurs, sans heurter les nostalgiques. Même avec une intrigue assez tenue, il réussit là où certains de ses collègues ont échoué, allant au-delà de l’exercice de style, grâce à ce réjouissant va-et-vient dans l’espace-temps… Chapeau !


 


Isabelle : intégrale T.1 ” par Will, André Franquin, Raymond Macherot et Yvan Delporte


Editions Le Lombard (29 Euros)


Après «Tif et Tondu», voici l’autre grande série du regretté Willy Maltaite (alias Will) reprise en une superbe intégrale ! Publiées par intermèdes dans l’hebdomadaire Spirou, de 1968 à 1995, les aventures de cette petite fille qui passe des jours paisibles chez sa tante Ursule (au bord de l’Atlantique) mêlent habilement réalité et féerie : le merveilleux, les fantômes, les magiciens et les pouvoirs paranormaux n’étant jamais très loin… Cette série juvénile fort réussie, jouant sans cesse entre fantastique et vie quotidienne, connaîtra, cependant, deux périodes bien distinctes. Les deux principaux premiers épisodes («Le tableau enchanté» et «Isabelle et le capitaine»), lesquels sont repris dans ce tome 1, restent assez sages graphiquement, même si les scénarios d’Yvan Delporte (aidé par Raymond Macherot sur le 2ème récit) sortent des normes de l’époque : rappelons que les personnages féminins n’étaient, alors, pas légion ! C’est l’aide scénaristique d’André Franquin, à partir du 3èmeLes maléfices de l’oncle Hermès», également réédité dans cette intégrale), en 1975, qui transcende véritablement le trait de Will et les propos tenus par cette petite sorcière, ancêtre d’ «Harry Potter». Jugée non rentable, les éditions Dupuis arrêteront pourtant l’exploitation de ces albums, en 1995, malgré le renom de ce quatuor, des plus créatifs, dans la bande dessinée franco-belge ! C’est donc avec un immense plaisir que nous retrouvons leur œuvre commune compilée ici, en un beau livre indispensable à tout amateur du genre !


 


Le Janitor T.1 : L’ange de Malte ” par François Boucq et Yves Sente


Editions Dargaud (13 Euros)


La nouvelle série de François Boucq et Yves Sente met en scène un séminariste tout juste promu «Janitor» par la Curie romaine : c’est-à-dire qu’il devient l’un des 12 gardiens de la chrétienté servant de gardes du corps à certains ecclésiastiques missionnés par le Vatican pour des négociations délicates. Fiction ou réalité ? Qu’importe, ce thriller ésotérique réaliste (qui ne chasse absolument pas sur les terres du «Da Vinci Code») est très convaincant ! Les personnages pensent, doutent, et sont toujours en quête de découvertes, malgré leurs aspects réservés et impassibles. L’histoire, qui se passe à Malte, est conçue en deux parties, et elle nous laisse sur un suspense insoutenable, alors qu’une étrange petite fille apparaît régulièrement pour orienter notre héros dans les moments difficiles… S’éloignant de son répertoire burlesque, le dessinateur du «Jérôme Moucherot» et de «Rock Mastard», est, ici, réalistement irréprochable. Quant au scénario d’Yves Sente, il est toujours aussi efficace et, même, de moins en moins bavard… Bref, tous les ingrédients pour faire de «Janitor», une grande série, sont réunis !


 


L’art attentat ” par Francis Masse


Editions Seuil (17 Euros)


Francis Masse reviendrait-il à la mode ? On pourrait le croire à la vue des quelques rééditions que certains éditeurs dits alternatifs lui consacrent, lui qui n’eut que rarement l’honneur de voir ses récits non-étiquetables compilés en albums. Il faut dire que son style graphique très particulier, volontiers surchargé (avec un lettrage dense et serré) qui multipliait les hachures sur à-plats, les personnages à gros nez, manteaux longs ou yeux blancs, et les narrations hautement loufoques et kafkaïennes, a eu du mal à s’imposer au public des années 1970/80. Pourtant, cet auteur majeur, dont l’œuvre était peut-être trop originale et personnelle, mérite grandement d’être mieux reconnue, aujourd’hui, comme telle. Loués soit donc les éditions du Seuil qui nous proposent ici un beau livre (tout en couleurs) des planches que Masse réalisa, dans sa dernière période, pour divers magazines comme (A Suivre), Métal Hurlant, Hara-Kiri, Rigolo, Hebdogiciel ou Marcel. La mise en couleurs, destinée à conquérir le public moderne, a été confiée à l’artiste Paquito Bolino, lequel ne dénature pas trop le noir et gris emblématique de l’auteur. Cerise sur le gâteau, un petit fascicule noir et blanc, de 16 pages, reprend «Le roi de le monde», dont certains gags avaient été publiés à l’origine dans Le Canard Sauvage. Voici donc un ouvrage qui permettra au béotien de se familiariser avec l’œuvre de cet iconoclaste dont on attend, avec impatience, la réédition d’autres «indispensables» comme «Mémoires d’Outre-Terre», «L’encyclopédie de Masse» ou du «30/40» que les éditions Futuropolis lui avaient consacré !


 


Par les chemins noirs T.1 : Les prologues ” par David B.


Editions Futuropolis (14 Euros)


Après deux recueils de nouvelles, dont certaines avaient déjà été publiées dans Lapin, David B. s’ancre pour pas mal de temps dans le catalogue Futuropolis, avec le début de cette saga, historique et poétique, située dans l’Europe de l’entre-deux-guerres. Nous sommes dans l’ancienne Trieste, au port de Fiume occupé par les corps francs (anciens soldats et déserteurs) menés par le poète aventurier Gabriele D’Annunzio, dans l’Italie de 1919. Le Dadaïste veut alors offrir sa proie dalmate à la patrie. Or, le pays, fidèle à ses engagements internationaux, refuse. Sur ces entre faits, D’Annunzio déclare Fiume, république indépendante. Sur fonds de bagarres et de laboratoires du fascisme, les enchevêtrements de corps, d’objets et d’esprits sont les inextricables fils conducteurs qu’il nous faudra dénouer pour suivre ce flamboyant roman d’espionnage, de banditisme et d’occultisme : une trame désordonnée, qui est humanisée par l’amour que vont se porter un mauvais garçon, chef de gang, et une chanteuse française de cabaret, en quête de succès. Prisonnière des Milanais, cette dernière devient une sorte d’Hélène de Troie qui n’en finit pas de diviser ceux qui croisent son chemin… «Par les chemins noirs» mérite vraiment le détour car il s’agit, certainement, de l’œuvre la plus ambitieuse et la plus foisonnante de David B., depuis sa mythique «Ascension du Haut-Mal» et sa trop méconnue «Lecture des ruines» !


 


 


Gilles RATIER


 


 

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