Jacques Ferrandez exposé à Blois

Jacques Ferrandez a inauguré vendredi 14 octobre dernier l’exposition que lui a consacrée l’équipe de BDBoum, dans le cadre des Rendez-vous de l’Histoire de Blois. Il y avait foule à 11h15 ce jour là à la bibliothèque de l’Abbé Grégoire : …

Jacques Ferrandez a inauguré vendredi 14 octobre dernier l’exposition que lui a consacrée l’équipe de BDBoum, dans le cadre des Rendez-vous de l’Histoire de Blois.

Il y avait foule à 11h15 ce jour là à la bibliothèque de l’Abbé Grégoire : c’est en effet l’auteur lui-même qui assurait le vernissage d’une exposition remarquée sur son œuvre phare, les célèbres « Carnets d’Orient » publié depuis 1985 chez Casterman.

L’équipe de BD Boum

Tous insistent sur le travail d’équipe et la participation de chacun. Les rôles étaient cependant bien distribués : commissariat : Sylvain Gache ; scénographie : Jean-Philippe Fleury et Bruno Goujon ; réalisations artistiques, Julien Charles et Jean-Philippe Fleury Le résultat est à la hauteur de l’engagement collectif pour une exposition riche d’une centaine de documents et d’une série d’originaux grands formats couleurs, enchâssés dans un véritable décor de théâtre.

L’exposition

Comme les années précédentes, cette exposition porte la marque de Sylvain Gache, avec sa scénarisation évocatrice privilégiant les ambiances, ses accrochages soignés des planches sélectionnées avec soin et mises judicieusement en correspondance avec des documents d’époque, et par-dessous tout, les « reconstitutions » des lieux emblématiques de la série : l’oasis séparée par une ligne de crête suggestive, de la plantation viticole européenne, la montagne pouvant être perçue comme une allusion rappelant en contrepoint discret le fossé économique, social et culturel qui séparait les gros colons des fellahs algériens ; le bar algérois, cible favorite des attentats urbains commis par le FLN, animé par un écran télé retransmettant en boucle les actualités de l’époque; la barricade pour la seconde phase lancée en mai 1958 ; le paquebot enfin, évocateur de l’exil douloureux, inconcevable et pourtant irrémédiable des Pieds Noirs, parfois « algériens » depuis 3 ou 4 générations. Une plongée dans l’atmosphère de l’époque autant que dans le série des « Carnets d’Orient », renforcée par un parti prix nouveau, quoique déjà perceptible dans les réalisations précédentes, celui d’alléger les explications historiques qui se trouvent cette fois regroupées dans quelques planches chronologique.

Le vernissage par Jacques Ferrandez

Le public a eu la joie et le privilège de découvrir cette exposition intimiste sous la direction de de Jacques Ferrandez lui-même. Planche après planche, classées par ordre chronologique, l’auteur a multiplié les anecdotes, les éclairages, les mises en perspective historique, tissant un réseau complexe entre son œuvre, sa documentation, les témoignages de sa famille, et tout un système de représentations qu’il s’est efforcé de faire évoluer, loin des polémiques passées, au profit d’un point de vue nourri par la recherche de l’objectivité historique. Ont en particulier été replacés dans leur contexte les tomes un et deux, marqués par « une approche historique lourde » ; le tome 3, directement inspiré de la saga familiale (côté maternel) ; le tome 4, celui de la fêlure, annonciatrice du drame à venir mais occultée par les somptuosités aveugles des fêtes du centenaires de l’occupation (1930), porteuse du mythe d’une Algérie française éternelle ; le tome 5 enfin, qui marque la fin du cycle clôturé à la veille de l’insurrection. Jacques Ferrandez avoue ici son désir initial de stopper à ce stade ses « Carnets d’Orient », afin d’éviter le sujet sensible de la guerre d’Algérie. Mais, après quelques années de maturation, il a finalement ouvert un second cycle, centré sur les années d’un conflit qui a longtemps tu son nom. L’auteur explique alors ce qui lui a tenu à cœur : d’une part, incarner l’histoire à travers des personnages forts mais toujours crédibles, apportant le souffle de la vie et de la passion à ce second cycle tragique ; d’autre part, éviter les pièges de l’anachronisme et de la simplification abusive et faussement explicative. Car pour l’auteur, né en Algérie mais qui ne se définit jamais en tant que fils de Pieds Noirs, l’important a toujours été de « juger d’abord avec les yeux d’alors ». Une maxime qui mériterait d’inspirer tous ceux qui se penchent sur la complexité d’un passé dont l’histoire n’offre au final qu’une reconstitution partielle qui doit rester consciente de ses choix et de ses limites.

Joël DUBOS

Galerie

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