« Come Home Indio » : une autobiographie de l’ombre à la lumière…

Indio est le petit nom affectif que son père a donné à Jim Terry. Ce dernier est né de l’union d’un jazzman américain d’origine irlandaise de Chicago et d’une Amérindienne de la nation Ho-Chunk du Wisconsin. Bill et Debbie se rencontrèrent à Los Angeles et se marièrent à l’arrivée de Jim. Un an et demi après arrivait sa petite sœur Elena. Les parents de Jim et Elena finiront par se séparer, amenant Jim à s’interroger sur sa situation. Ces questionnements sur sa place dans la société et son désir d’acceptation le pousseront vers de sombres palliatifs aux conséquences désastreuses.
Paru aux États-Unis en 2020 chez Street Noise Books, « Come Home Indio » est maintenant disponible en France grâce à Komics Initiative.

Pour Jim, les grands moments de joie de sa petite enfance furent les séjours à Indian Heights : un lotissement de Wisconsin Dells, où vivaient ses grands-parents maternels et son demi-frère Tony. La structure familiale étendue de la communauté Ho-Chunk lui offrait une immense famille, ainsi qu’une totale liberté de jeu dans la nature. Malheureusement, atteint d’une leucémie, Tony mourut, causant une blessure dont sa mère ne se remettra jamais tout à fait. Jim a six ans au moment du décès de son demi-frère et il sent confusément que la relation entre ses parents se détériore ; son impuissance face à la situation le désespère. Le couple divorce, Jim et Elena auront dès lors deux foyers.
Jim n’arrive pas non plus à trouver sa place à l’école : son métissage ne lui attribue pas de place au sein d’une société américaine hiérarchisée et sa passion pour la lecture, le cinéma et les comics ne lui sont pas d’une grande aide pour intégrer l’élite des élèves les plus populaires. Las de ce pesant sentiment de solitude, Jim accepte un soir d’été de rejoindre un groupe de jeunes et — malgré tout ce qu’il sait les ravages de l’alcoolisme au sein de la communauté amérindienne et de sa propre famille — il accepte sa première canette de bière.
L’alcool endort les inquiétudes de Jim et lui permet d’être accepté.
Subissant l’alternance de la vie entre deux familles et ne sachant comment se positionner sur son identité culturelle, Jim se retrouve devant une nouvelle alternative : boire pour se sentir bien, puis se détester pour avoir bu.
Une élève de sa classe finit par tomber amoureuse de Jim, ce qui lui offre un moment de bonheur parfois obscurci par les relations avec Bill, Debbie et Don : le compagnon de celle-ci. Dessinant depuis son jeune âge, Jim s’inscrit dans un cursus artistique ; malheureusement, une fois à la fac, les liens finissent par se distendre et la relation amoureuse se rompt. Malgré les conseils de son père — devenu sobre —, Jim retrouve le goût de l’alcool lors des soirées étudiantes.
Son diplôme en poche, Jim s’installe à Chicago avec des amis. Il trouve un travail de manutentionnaire dans un magasin du centre-ville : ce qui lui permet de payer son loyer et d’assurer ses virées, de plus en plus alcoolisées. Les soirées accidentées faisant suite aux nuits sans souvenirs, les rencontres glauques et improbables ne cessent d’entraîner Jim dans une consommation sans cesse plus conséquente. Rongé par la culpabilité, Jim s’enferme dans un cercle de honte et de solitude, alors qu’au même moment sa famille parvient à se reconstruire.
C’est en suivant leur exemple que Jim arrive à faire face à son addiction et à pousser la porte d’une association d’aide aux alcooliques. Commence alors un parcours dur et difficile : Jim devra se reconstruire, en se débarrassant de son penchant pour l’alcool et en se concentrant suffisamment pour y échapper et découvrir de quoi remplacer ce pivot nocif de son existence.
La rencontre bouleversante avec le « New York » de Will Eisner poussera Jim à se remettre au dessin et à s’y consacrer intégralement. Il sera aidé et soutenu par James O’Barr, le créateur de « The Crown », qui fut lui-même sauvé par le dessin à la suite d’une tragédie familiale.
Mais cette nouvelle sobriété ne soulagera pas totalement Jim. L’apaisement ne viendra qu’avec un ultime combat, raconté de manière étonnante : une lutte — accompagnée de sa sœur et d’une cousine — qui permettra à Jim de renouer enfin avec son histoire familiale.
La sincérité du récit de Jim Terry ne peut que nous estomaquer. À cheval entre des racines irlandaises et amérindiennes, bousculé par un entourage instable, Jim se retrouve seul pour se construire comme il le peut, entre histoires et légendes indiennes, Harrison Ford et « Mad Max », la passion de son père pour la musique et l’ouverture à la culture de sa mère, les super-héros de John Romita Jr. et les créatures de Jack Davis…
Jim Terry ne nous épargne rien de ses angoisses et de ses peurs — qui l’entraînent lentement vers ses propres abîmes —, mais il nous montre qu’il est possible, après un parcours titanesque, de trouver la paix en retournant en soi.
Brigh BARBER

« Come Home Indio » par Jim Terry
Éditions Komics Initative (25 €) — EAN 978-2-491374-61-7
Parution 24 février 2023

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3 réponses à « Come Home Indio » : une autobiographie de l’ombre à la lumière…

  1. BARRE dit :

    Pardon d’utiliser cet article pour poser une question qui n’a rien à voir avec la bd citée ci dessus :
    Pourquoi ne peut-on plus poser de questions sur les différents sujets liés au BDM?
    Par exemple, savoir pourquoi il n’y a plus d’écho du BDM?

    • Gilles Ratier dit :

      Il y a en effet quelques soucis techniques qui limitent désormais certaines possibilités sur notre site et nous n’avons pas les capacités pour les résoudre. Il faudrait refaire entièrement le site et cela coûte très cher : en tout cas trop cher pour nous… Après, si vous quelques milliers d’euros en trop et que vous souhaitez en faire don pour refaire notre site, nous trouverons sans problème un technicien adéquat…
      Nous vous rappelons aussi que nous dépensons déjà énormément d’énergie et de temps pour maintenir un niveau qualitatif à BDzoom.com. Or, nous sommes tous bénévoles sur ce site et nous avons tous des métiers et une vie de famille ou sociale à côté : nous faisons de notre mieux, mais à l’impossible, nul n’est tenu…
      Quant à « L’Écho du BDM », cette rubrique était tenue par Michel Denni qui, à l’âge vénérable de 86 ans, a pris une retraite bien méritée ; d’autant plus que le « BDM » est désormais édité par Les Arènes : structure qui n’a rien à voir avec BDzoom.com…
      Cordialement
      La rédaction

      • BARRE dit :

        Merci M. Ratier pour cette explication. Effectivement, je me disais que M. Denni devait savourer une retraite bien méritée.
        J’en profite pour vous présenter mes excuses pour quelques légers excès d’humeurs dont j’ai fait preuve parfois ici.
        Je sais le travail que vous accomplissez sur ce précieux site.
        Bien cordialement,

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