« L’Ange exterminateur » : la vengeance est un plat qui se mange glacial !

Déjà scénariste de deux albums parus chez Mosquito avec le regretté Sergio Tisselli, François Corteggiani poursuit ici sa collaboration avec des dessinateurs transalpins. Parmi eux : Lele Vianello, ancien assistant de l’emblématique Hugo Pratt, devenu le créateur d’une douzaine d’albums en tant qu’auteur complet. Cet « Ange exterminateur » est son treizième…

 Ce western canadien, dont l’action se déroule en 1886 dans les territoires du nord-ouest (précisément dans la province de la Saskatchewa), tourne autour de l’un des trois personnages principaux : Angel Steranko, dit L’Ange blanc. Un homme blanc et de surcroît albinos. Depuis que son frère meunier et sa famille ont été massacrés par des Indiens Cris et Assiniboines, cet artiste de cirque et tireur d’élite voue une haine tenace à ces deux peuples autochtones et, au-delà, à tout Indien. Avec sa bande, composée d’une demi-douzaine d’hommes de main venus du Montana voisin, dont le solide circassien Kodiak, Steranko n’hésite désormais jamais à occire toute « peau cuivrée » croisée sur son chemin.Lorsque l’une de ses victimes en réchappe, récupérée par l’Indienne Chélonna, la mécanique s’enraye. Gendarme royal en couple avec cette dernière, le sergent Keller tente d’arrêter la dérive sanguinaire du vengeur détraqué. Au même moment, une autre bande de Blancs passe la frontière avec un canon, massacrant les militaires du poste canadien. Une nouvelle menace qui risque de soutenir Steranko dans sa volonté de détruire le camp établi sur le fleuve Churchill par Big Bear, un chef indien dont dépend la petite troupe rebelle ayant jadis massacré la famille de l’ange blanc… Mais, alors que Keller et Chélonna tentent d’intercepter le canon pour éviter le massacre redouté, la folie meurtrière qui gangrène Angel Steranko devient bientôt imprévisible…

 Autant dire qu’une belle mécanique narrative rend cette histoire haletante. Courant sur 50 planches, ce récit est judicieusement mené par François Corteggiani, servi par un dessin au réalisme sobre, à l’os même, et valorisé par une harmonie pastel. Un dessin vierge de tout esprit décoratif, car destiné à la seule narration : l’essence même de la BD.

Treizième album, avons-nous dit. Treize, le mauvais chiffre. En l’espèce, encore. Car cet « Ange exterminateur » est l’ultime album de François Corteggiani, tout au moins le dernier qu’il aura tenu entre les mains. Huit jours après sa parution, le scénariste disparaissait brutalement, le jour même de ses 69 printemps (1). Quelques heures avant, il postait un cliché radieux avec son petit-fils : un petit ange chevelu au regard goguenard. Nul doute que, ces prochaines décennies, « Pépé » Corteggiani aurait cultivé avec bonheur l’art d’être grand-père et enchanté de jeunes générations de lecteurs. Si l’homme et l’artiste apprécié laisse un grand vide dans son sillage, retrouvons ici l’esprit Corteggiani : celui d’une bande dessinée populaire, prolifique, exigeante et jouissive. Grazie di tutto,signor Corteggiani !

Jean-François MINIAC 

(1) Voir Décès soudain de François Corteggiani : le monde des « petits mickeys » sous le choc !.

« L’Ange exterminateur » par Lele Vianello et François Corteggiani

Éditions Mosquito (16 €) - EAN : 978-2-3528-3925-5

Parution 16 septembre 2022

Galerie

4 réponses à « L’Ange exterminateur » : la vengeance est un plat qui se mange glacial !

  1. Patrick BOUSTER dit :

    Toujours émouvant, un « dernier album ». Celui-ce dont je ne connaissais pas l’univers, semble très intéressant, et encore sous influence de Pratt, mais on ne s’en plaindra pas.
    Grazie mille, Francesco…

  2. Luca Fausti dit :

    Si vous voulez jouer à les italiens, vous devriez écrire « Grazie di tutto, signor Corteggiani ! » (pas Signore)

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