Dix ans après la parution de « Résurrection », la première partie d’un diptyque accouché dans la douleur, voici enfin « Révélations » : conclusion du dernier récit du regretté Philippe Tome, décédé alors qu’il travaillait sur les dernières pages de son scénario. Les éditions Dupuis proposent, enfin, l’intégralité de cette aventure magistralement dessinée par Dan Verlinden, digne successeur de ses deux prédécesseurs : Luc Warnant et Bruno Gazzotti.
Lire la suite...Décès de Norma : l’hécatombe se poursuit en 2021…
Après une fin d’année catastrophique en disparitions de dessinateurs, l’hécatombe se poursuit dès le premier jour de 2021. Norma, dessinateur du fameux « Capitaine Apache » est décédé à l’âge de 74 ans, à Angoulême où il résidait depuis de longues années. Clap de fin pour un dessinateur réaliste populaire à la carrière injustement en dent de scie.
Norbert Morandière est né le 20 février 1946 à Alger. Arrivé en France en 1962, il rêve de devenir dessinateur de bande dessinée, malgré l’opposition féroce de son père inspecteur des impôts. Marié et père de trois enfants, il finit par monter, seul, en éclaireur à Paris, en 1970.
L’accueil chaleureux de l’équipe du fanzine Falatoffoù il publie ses premiers travaux de 1971 à 1973 — (« Bussy de Ringis », « Sébastien Fulpert »…) sous la signature Marcus, puis Norma — l’encourage à faire le tour des éditeurs.
Il réalise des illustrations pour le rédactionnel des pockets des éditions Mon journal (ainsi qu’une bande dessinée : « Shaco Bentes » dans Whipii !, en 1974),
publie quelques récits complets dans Djin et Formule 1 (énigmes policières) aux éditions de Fleurus ou collabore à Amis-Coop en illustrant des récits historiques.
Dès 1974, il crée son premier personnage dans le premier numéro (janvier 1974) au format tabloïd du mensuel Record : « Lord Remington » est un chasseur de primes dont les aventures, teintées de fantastique, sont réalisées dans un style inspiré par Jean Giraud qu’admire le jeune dessinateur.
Deux ans plus tard à l’initiative de Claude Gendrot, il publie « Le Chevalier ensorcelé » dans le n° 305 de Pif gadget(décembre 1974). Ce récit de chevalerie en dix pages, écrit par Jean Ollivier, lui ouvre les portes du journal.
Dans le n° 347 (octobre 1975) débutent les aventures du Capitaine Apache imaginées par Roger Lécureux. Plaidoyer contre le racisme, les histoires pleines d’humanisme d’Okada, jeune métis élevé par les apaches, fils de la douce Iowa et du solide irlandais Johnny O’Wilburd, se prolongeront jusqu’en 1986.
Placé aux côtés de « Rahan » et de « Docteur Justice » sur le podium, il est le héros de 106 épisodes d’un western original totalisant plus de 1 000 planches aux images superbes.
Quatre albums sont édités par Vaillant en 1980-1981, un autre par Messidor en 1986, et un début d’intégrale par Soleil en 1995.
Notons que les microéditions Taupinambour en ont proposé cinq albums aux tirages très limités en 2013, puis entrepris une intégrale tout aussi limitée à partir de 2019.
Bien qu’abandonnant « Capitaine Apache » en plein succès, suite à un procès qui ne le concerne pas opposant Roger Lécureux à Pif gadget, Norma amorce une reconversion qui s’avère compliquée.
Pour les éditions Glénat, il dessine de 1988 à 1990 « Souvenirs de la pendule » (une histoire en trois épisodes de Patrick Cothias destinée à Vécu),
puis en 1991 la trilogie « Pieter Hoorn » écrite par Frank Giroud,
suivie en 1997 par une adaptation par François Corteggiani du « Bossu ». Hélas, malgré une réalisation parfaite, ces différents travaux ne parviennent pas à conquérir suffisamment de lecteurs.
Au cours de cette période, il crée « Hazel et Ogan » avec Bosse dans Tintin : histoires réunies en deux albums par Blanco en 1989 et 1991, un troisième épisode étant publié par Soleil en 1994.
Toujours pour Soleil, il crée « Saïto » avec François Corteggiani, dont trois albums sont édités à partir de 1993. Hélas !, une fois encore, le succès n’est pas au rendez-vous.
Norma s’installe à Angoulême où il sort encore quelques albums, tout en effectuant des interventions dans les écoles. Notons « Enner et le secret du temple de Salomon » (scénario Jacques-René Martin) en 1998 aux éditions Dervy
et « Rochefort un voyage dans le temps » en 2002 pour la Jeune Chambre économique de Charente-Maritime.
Ensuite, ce sera :
- « Les Aventures imaginaires de Victor Hugo » en 2003 aux éditions de l’Atelier de l’Almanach,
- l’adaptation de « L’Affaire Protheroe » en 2005 pour la Collection Agatha Christie des éditions Emmanuel Proust,
- enfin « À 18 ans sous les balles au Vercors » pour les éditions du Signe, en 2007.
De 1995 à 1997, sous le pseudonyme Marc Page, il met en images quatre volumes au format de poche de la collection pour adultes Confessions érotiques BD aux éditions Média 1000.
En 2002, il dessine « Hawk » (scénario Corteggiani), à l’occasion de la tentative de relance de Yuma par Semic. Il participe au Nouveau Pif gadget de 2006 à 2008.
Son dernier ouvrage, réalisé avec le concours d’un financement participatif sur Kisskissbank, « La Centième Mouche », paraît en 2016 chez Fish Up Philms.
Pur produit de la génération de dessinateurs inspirés par Jean Giraud, Norma s’est fort bien sorti de cette influence, proposant un dessin réaliste original et mouvementé, destiné à un large lectorat.
Il demeurera à jamais le dessinateur de « Capitaine Apache » pour toute une génération de jeunes lecteurs. À propos de son métier, il me confiait en 1977 dans Schtroumpf fanzine : « Pour moi, le dessin est au service d’un texte, au service d’une idée. Si c’est un art, ce n’est pas au niveau du dessin qu’il se place, mais au niveau de la manière de faire ressentir au lecteur un sentiment, une idée. Le dessin doit être au service de cela et non pas le contraire ».
Les pensées émues de l’équipe de BDzoom.com vont à ses proches.
Henri FILIPPINI
Relecture, corrections, rajouts et mise en pages : Gilles RATIER
J’ai toujours regretté qu’aucun des éditeurs « classiques » n’aient songé à rééditer ses « Capitaine Apache ». Pourquoi une telle indifférence à l’égard d’une série qui marqua quand même plusieurs générations ?
Ce n’est pas une histoire d’indifférence mais probablement de droits…
TRés triste d’apprendre le décés de Norma que je connaissait bien ……
festival bd Hyeres fète du livre Toulon Angouleme etc……
Capitaine Apache son plus grand succés mais vue la politique de Pif pour la parution en albums aucune chance de vente…….
Je connaissais Norma depuis le milieu des années 1980 lorsqu’il m’avait accueilli chez lui à Massognes, mis en relation par une bibliothécaire soucieuse d’aider le jeune scénariste amateur que j’étais à se faire un réseau chez des auteurs confirmés. Nos projets BD ont toujours raté mais nous sommes restés longtemps en contact, animés par des idées politiques identiques. J’ai été très heureux de voir qu’il s’était engagé aux côtés de la candidate socialiste Pinville en 2020. je n’ai pas eu le temps de lui dire copieur !
Norbert était un homme généreux, passionné de théâtre, et bon compagnon pour des soirées conviviales ! C’était aussi un bon dessinateur réaliste qui n’a pas eu de pot dans sa carrière, peut-être aussi du fait de son caractère pas toujours accommodant ! Je me rappelle aussi qu’il avait répondu présent en donnant des planches pour une vente aux enchères d’originaux destinés à financer une association venant en aide aux familles de migrants !
Il m’a beaucoup appris sur le monde de la BD et sur l’art de la narration. Norma et Norbert, nous vous regretterons tous les deux mais ne vous oublierons pas !
Son père ne tenait pas un magasin de vêtements a Montpellier mais était inspecteur des impôts ! Désolée mais je ne peux m’empêcher de rectifier cette erreur qui m’a bien fait rire.
Merci, nous corrigeons cette information erronée !
Bien cordialement et encore toutes nos condoléances…
La rédaction