Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
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C’est sans doute un hasard, mais Édouard Karali, né le 17 décembre 1940 à Héliopolis en Égypte, plus connu sous la signature d’Édika, aura 80 ans en décembre prochain. Entré à Fluide glacial en 1979, il a consacré la moitié de sa vie au mensuel « d’umour& bandessinées » : une fidélité sans faille qui justifie cette fort belle anthologie dont le premier opus vient de paraître.
 Loufoque, riche en situations inextricables, en personnages aux corps improbables… mais aussi en jolies filles aux poitrines surdimensionnées, les histoires d’Édika cultivent avec délectation l’art difficile du décalage et du non sens. Monsieur Rachid le myope, mais surtout la famille Proko sont bien sûr de la fête. Bronski le père et ses colères légendaires, Olga la paisible mère au foyer, Georges leur fille et Nini (diminutif de Paganini) leur fils, sans oublier le chat Clark Gaybeul figurent au panthéon des créatures nées de son crayon inventif. Passez votre chemin si vous attendez une chute pour rire un bon coup. Édika est le champion des chutes avortées, des gags qui se figent, des situations sans queue ni tête. Bref, un artiste complexe qui ne fait pas dans la facilité.
           Arrivé du Liban en France au début des années 1970 avec son frère Paul, le dessinateur Carali fondateur du Psikopat, il débute dans la profession en réalisant des jeux et des labyrinthes pour Pif gadget et ses nombreuses revues comiques de poche. Il publie ses premières bandes dessinées dans Charlie mensuel, Métal hurlant et Pilote. Il réalise enfin son rêve, entrer à Fluide glacial, en 1979. Seuls les couvertures et les gags de dernières pages lui permettent de montrer ses talents de coloriste. Gotlib et Diament, les fondateurs du journal résistent, Fluide glacial doit rester en noir et blanc. En couleur ou en noir et blanc, il est devenu l’un des auteurs incontournables de Fluide glacial pendant plusieurs décennies.           Cette anthologie en six volumes proposera le meilleur des 309 histoires totalisant 1 870 pages, publiées en 41 ans par le mensuel, et réunies en 37 albums. L’éditeur annonce la parution de deux ouvrages de 240 pages par an. Au fil des chapitres, Gérard Viry-Babel évoque l’auteur, sa riche carrière, le tout illustré de documents souvent émouvants. Ce premier volume revient sur les années d’apprentissage 1979-1984. De quoi assister, dans le détail, à la naissance de ce créateur à l’humour surréaliste pas comme les autres qu’est Édika.Et ce n’est pas fini, puisqu’il signe les couvertures du n° 528 de Fluide glacial (mai-juin 2020, 84 pages, 4,95 €, en kiosque) et celle du trimestriel Série-Or spécial été (144 pages, 8,95 €, en kiosque le 2 juillet). Dans le premier, il propose une étonnante « Flânerie champêtre » en cinq pages, dans le second la reprise de l’un de ses classiques. Quelle santé pour un futur octogénaire !
 Henri FILIPPINI
 « Anthologie Édika T1 : 1979-1984 » par Édika
Éditions Fluide glacial (29,90 €) – EAN : 9 782 3787 8376 1
 Â
J’ai découvert Carali au début des années 80 dans Hebdogiciel, un hebdo barré pour barrés de l’informatique. Mythique (chez nous autres les vieux geeks) !
Son absurdité enveloppant une acuité socio-politique proche de Coluche m’a profondément marqué.
Un IMMENSE artiste très sous-estimé !
Oui, tout à fait d’accord, avec lui on est à la fois dans le monde du rêve et d’une certaine réalité ordinaire, voire sordide ou pitoyable. C’est tellement drôle ce mélange de gros seins, de paumés magnifiques, de phrases interminables pseudo-philo, absurdes, et d’évènements improbables. Il a marqué la BD avec un ton unique.
Mais il est préférable d’évoquer Edika au lieu de Carali, qui est le nom professionnel de son petit frère.
Je lis dans l’article qu’il ne s’agit pas d’une intégrale mais d’une sélection d’histoires. C’est dommage.