Encore un grand récit picaresque en bande dessinée : « Aldobrando » par les Italiens Luigi Critone et Gipi 

Publié mi-janvier, ce formidable conte initiatique, entre chanson de geste hors du temps et fabliau politique, n’avait été, sur notre site, qu’annoncé rapidement par notre collaborateur Philippe Tomblaine (1). Profitons donc d’un relatif calme éditorial pour remettre un coup de phare bien mérité sur ce savoureux roman graphique médiéval de plus de 200 pages, où interviennent des personnages aussi drôles que loufoques, ou aussi outranciers qu’émouvants, voire aussi monstrueux que romantiques. D’autant plus que le tout se lit d’une seule traite, tellement la narration est efficace et que le scénario, porté par un dynamique trait au lavis avec de beaux ajouts de couleurs plus vives, est bien ficelé.

Fils d’un roi sentant sa dernière heure arriver, Aldobrando a été confié, quand il n’était encore qu’un tout petit enfant, à un vieux mage chargé de l’éduquer. Alors qu’il est devenu un jeune homme malingre, naïf et pas trop débrouillard, son protecteur, grièvement blessé à l’œil par un chat récalcitrant qui ne voulait pas être plongé dans l’eau bouillante, lui demande d’aller quérir, en urgence et dans le froid et la neige, l’herbe du loup : car il n’y a que cet ingrédient, aux feuilles rouges et dentelées, qui pourra le guérir.

Par le hasard des rencontres, il se retrouve l’obligé d’une sorte de Don Quichotte, mi-chevalier mi-escroc portant comme seule arme une lance, à qui il sert de valet et d’écuyer. Nos deux protagonistes trouvent alors refuge dans l’auberge peu rassurante d’un village des alentours. Son nouveau seigneur et maître ayant disparu sans crier gare, il récupère la lance, que ce dernier a laissée, avant de partir à sa recherche ; mais il est arrêté par les troupes du roi qui ont reconnu l’épieu qui a transpercé le dos du jeune prince du royaume, lequel agonise désormais sur son lit de mort.

Rebondissements, amours, trahisons et révélations vont continuer de rythmer ce passionnant, mais également burlesque et délirant, récit picaresque imaginé par Gipi — l’auteur unanimement salué de « La Terre des fils » qui a été récompensé par le Grand Prix de la Critique 2018 (2) — et fort bien mis en valeur par le dessin évocateur de Luigi Critone  : l’illustrateur de « La Rose et la Croix » (les deux premiers tomes d’une série écrite par Nicolas Jarry et France Richemond, chez Soleil, en 2005 et 2006), des « 7 Missionnaires » (scénario d’Alain Ayroles, chez Delcourt, en 2008) ou de l’adaptation de « Je, François Villon » de Jean Teulé (trois volumes chez Delcourt, de 2011 à 2016).

Enfin, n’oublions pas, non plus, le rôle déterminant, dans l’atmosphère de cette BD envoûtante et joyeuse, des originales couleurs magnifiquement travaillées par Francesco Daniele et Claudia Palescandolo.

Gilles RATIER

(1) Voir Une sélection de belles couvertures, pour le début de 2020….

(2) Voir « La Terre des fils » de Gipi, édité chez Futuropolis, Grand Prix de la Critique ACBD 2018 !

« Aldobrando » par Luigi Critone et Gipi 

Éditions Casterman (23 €) — ISBN : 978-2-203-16667-7

Galerie

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>