« La Vallée des immortels » T2 : immortels Blake et Mortimer…

Fidélité à l’esprit d’Edgar P. Jacobs est le mot d’ordre donné par l’éditeur aux auteurs qui depuis la disparition du créateur se frottent aux aventures de « Blake et Mortimer ». Yves Sente en habitué de la série, flanqué des deux Néerlandais adorateurs de la ligne claire, Teun Berserik et Peter Van Dongen, respectent à la lettre la consigne. La présente conclusion du diptyque « La Vallée des immortels » est un modèle du genre.

Après l’anéantissement du palais impérial du dictateur Basam-Damdu par les Espadons, alors que Mao et ses communistes progressent, le Seigneur de la guerre Xi-Li  rêve de devenir le maître de cette Chine d’après Troisième guerre mondiale. Pour y parvenir, le tyran doit récupérer deux anciens manuscrits qui prouvent qu’il est le descendant de Li Si , premier et unique Empereur de la dynastie Han. Arrivé à Hong-kong et aussitôt enlevé par les hommes d’Olrik toujours bien vivant travaillant pour le compte de Xi Li, le professeur Philip Mortimer échoue au coeur de la jungle où il retrouve son ami Nasir lui aussi retenu par Xi-Li le Seigneur de la guerre. À la recherche du professeur, le capitaine Francis Blake et Miss Ti, une jeune communiste chinoise, pénètrent à leur tour dans la jungle profonde. Ayant réussi à fuir le camp où il était retenu, Mortimer accompagné par le cupide Mister Chou, recherchent la légendaire vallée des immortels où se cache la perle de vie, de redoutables dragons, mais aussi une fortune en émeraudes.

Bien que ce second épisode soit riche en séquences de jungle, Hong Kong encore colonie britannique, proche de la Chine de Mao, terre encore inconnue pour les deux héros, sert de cadre à bien des intrigues et à quelques poursuites mouvementées.

L'édition luxe, dite bibliophile

Des héros et des méchants que l’on aime retrouver, une pincée de fantastique, des monstres fabuleux, des inventions modernes parfois destructrices pour la planète, des décors exotiques… le tout saupoudré d’évènements réels, tous les ingrédients chers à Jacobs (et à ses lecteurs) sont présents dans ce récit passionnant et dense, riche en personnages secondaires. Second volume d’un diptyque malin ce récit débute en septembre1949 à la fin du « Secret de l’Espadon » et se termine en mars 1950 avant le début du « Mystère de la Grande Pyramide ». Graphiquement le duo de dessinateurs a tout logiquement choisi de se glisser dans une « ligne claire » inspirée par celle de l’aventure égyptienne des héros. De quoi permettre aux lecteurs d’entrer confortablement dans ce récit où l’amateur éclairé s’amusera à repérer quelques références à Hergé et Jacobs proposées au fil de l’aventure.

Plus de 400 000 exemplaires du premier épisode ayant été vendus à des lecteurs visiblement satisfaits, cette seconde partie devrait cartonner en cette fin d’année.

Notons qu’une édition de luxe au tirage limité est proposée avec une couverture différente au prix de 24,99 €.

Yves Sente, Teun Berserik et Peter Van Dongen

Yves Sente, né en 1964, directeur éditorial des éditions du Lombard à partir de 1993 (on lui doit l’excellente collection Troisième Vague) est le scénariste des sept aventures de « Blake et Mortimer » dessinées par André Juillard. On lui doit aussi « Le Janitor » pour Boucq, les reprises de « Thorgal » et de « XIII », mais aussi « Cinq branches de coton noir » pour Steve Cuzor et « Il s’appelait Ptirou » pour Laurent Verron, dessinateur qui lui aussi a droit à un clin d’oeil dans le présent album.

Teun Berserik né en 1955 tient un garage spécialisé dans l’entretien des voitures anciennes. Il abandonne cette activité pour illustrer des manuels scolaires, réaliser des peintures murales et aborde la bande dessinée en 2013 avec un ouvrage remarqué par la critique dédié aux premières années de Vincent Van Gogh.

Peter Van Dongen né en 1965 est l’auteur de « Rampokan » traduit en 2018 aux éditions Dupuis. Il adapte ensuite « Familieziek » (« Fichue Famille »), roman de Adriaan van Dis.

Leur méthode de travail sur « Blake et Mortimer » est originale puisque chacun dessine les crayons de ses propres pages avant de passer à l’encrage lui aussi réalisé en solo après concertation. Même le scénariste a du mal à savoir qui a fait quoi ! Les couleurs  qui respectent elles aussi celles du Jacobs des années 1950 sont réalisées par le seul Peter Van Dongen.

En attendant un prochain épisode bistish d’Yves Sente dessiné par André Juillard, nos deux néerlandais confortés par l’accueil des gardiens du temple,  planchent déjà sur un nouveau « Blake et Mortimer » tout aussi exotique.

Pour ceux qui auront été intrigués par la dédicace des auteurs et de l’éditeur de l’album à Alexis Dragonetti signalons qu’après avoir dirigé l’équipe commerciale néerlandaise des éditions Dupuis il était le fondateur des éditions Ballon Media qui publient la série « Jommeke » (« Gil et Jo » de Jef Nys), mais aussi traduisent les ouvrages de Média Participation (Dargaud, Lombard, Dupuis) dont « Blake et Mortimer » et ceux de Casterman. Il est mort à 50 ans dans un accident de voiture.

Henri Filippini

« Blake et Mortimer : La Vallée des immortels T 2 : Le Millième Bras du Mékong » par Teun Berserik, Peter Van Dongen et Yves Sente
Éditions Blake et Mortimer (15,95 €) – ISBN : 978 2 8709 7281 6

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10 réponses à « La Vallée des immortels » T2 : immortels Blake et Mortimer…

  1. Scheins Raoul dit :

    Je suis au-delà de la déception pour cet album. Il est vrai que le dessin n’est pas mal (plus proche souvent de Barelli à Nusa-Penida que de Jacobs mais cela passe à moitié) mais le scénario est en dessous de tout. Les enjeux n’intéressent personne (on est loin de la machine à voyager dans le temps ou de la redécouverte de l’Atlandide), les nouveaux engins disparaissent en quelques cases et on soupire en essayant de suivre (en baillant) l’interminable feed back dans la Chine ancienne. Par charité je ne vais pas m’étendre sur l’irruption des méchants pandas géants et d’Odilon Verjus (pourquoi ne pas faire intervenir Modeste et Pompon tant qu’on y est ?). Les admirateurs de Jacobs ne doivent plus acheter le moindre Blake et Mortimer scénarisé par le calamiteux Sente (pour ma part c’est terminé!!). Le fait de vendre beaucoup pour le moment n’empêchera pas d’arriver tôt où tard à un refus de continuer à acheter des albums parcourus au mieux dans la gène et à peine refermés rangé au grenier pour ne plus les voir (c’est mon cas pour TOUS les Blake et Mortimer scénarié par Yves Sent) Or, ce serait dommage si par exemple Aubin sortait un grand album avec un bon scénario (j’en attend bien plus de « 8 heures à Berlin » que de n’importe quel album à rallonge torché par Y. Sente et je crois ne pas devoir attendre en vain dans ce cas…).

    • PATYDOC dit :

      En effet, voici un album de pérégrinations interminables dans la jungle avec découverte d’une vallée perdue… Un cliché de la littérature populaire et de la BD des années 1930, 1940, 1950….! C’est une honte d’avoir la chance incroyable de pouvoir scénariser un des derniers monuments de la BD et finalement d’accoucher de ce vulgaire scribouillage.

    • Pierre dit :

      Je ne partage pas du tout votre avis. Je ne suis pas fanatique de la production d’Yves Sente (dont je n’ai, par exemple, pas apprécié le « Spirou » et son discours sous-jacent), mais il me semble qu’en dehors des 14 pages du pseudo rêve de Mortimer (dont il reste une trace matérielle, comme c’est original…), le reste tient debout, avec une histoire particulièrement dense, des rebondissements et les ingrédients habituels. Le dessin est par ailleurs irréprochable. Ce n’est pas un chef-d’oeuvre, mais je dirais que cet du travail honnête..
      Et on peut aussi apprécier aussi les private joke rencontrés ici ou là : ainsi, on découvre dans l’article relatant la mort de Nathan Chase les paroles d’une chanson des Beatles (A day in the life). On avait déjà aperçu Paul et George à la fin de la machination Voronov. Y aurait-il d’autres allusions aux Fab Four dans les autres albums ? A voir…

  2. Etie Soude dit :

    OK je n achèterai donc pas

  3. Henri Khanan dit :

    Apparemment, vous avez moins apprécié que l’auteur de l’article qui y voit un modèle du genre!

  4. Henri Khanan dit :

    Lu hier. Le dessin est très bien, le scénario peu palpitant, mais trop bavard.

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