Spirou : le c… entre trois chaises

L’hebdomadaire octogénaire des éditions Dupuis n’en finit plus de se chercher. Après l’année catastrophique qui a suivi le départ de Frédéric Niffle, rédacteur en chef éclairé du journal pendant dix ans, son retour provisoire et un espoir d’orientation vers une formule plus sage, voici que son successeur Morgan Di Salvia opte pour une solution fourre-tout.

Après la couverture « manga » de son numéro 4248, la couverture classique de Fabrice Tarrin du suivant, voici celle du numéro 4250  qui lorgne vers Topo (la version ados de La Revue dessinée). De quoi déboussoler plus d’un lecteur ! Les trois tendances évoquées par ces couvertures sont présentes dans cette nouvelle livraison : classique avec « Spirou chez les Soviets » excellent épisode de la collection Une aventure de Spirou écrite par Fred Neidhardt et dessinée par Fabrice Tarrin qui rend un vibrant hommage au grand Jijé, « Contrefaçons », une longue enquête de Jérôme K. Jérôme Bloche par Alain Dodier en grande forme, enfin « Mais où est Kiki ? » un savoureux clin d’œil à « Tif et Tondu » par Robber et son frère Blutch avant le retour des « Tuniques Bleues » de Cauvin et Lambil ; manga avec « Télémaque » relecture japonisante de « l’Odyssée » par Kid Toussaint et Kenny Ruiz et « La Boîte à musique » de Carbone et Gijé dont les planches sont des successions de gros plan.

Enfin le reportage dessiné avec la nouvelle rubrique « Objectif terre » au but écologique louable où se succèdent sur douze pages les signatures de Hervé Bourhis, Gwen de Bonneval, Rachel Syfer, Olivier Bocquet, Mathieu Burniat ou encore Cyril Pedrosa, auteur de la couverture. La pagination devrait se limiter à quatre dans les prochains numéros. Parler écologie c’est important, mais est-ce la vocation de Spirou de le faire sous cette forme ? Peut-être que des fictions sur ce thème aux héros récurrents seraient plus en accord avec l’esprit Spirou que ces brefs reportages dessinés aux graphismes simplistes flirtant avec les graffitis. Il n’est pas question ici de descendre le travail des auteurs, mais d’ouvrir une réflexion sur l‘avenir d’un journal dont les diverses tentations de changements de formules ont toujours eu pour conséquence le retour aux fondamentaux, à savoir la bande dessinée classique.

Il existe un lectorat pour les mangas, un lectorat pour le reportage graphique… et depuis toujours un  lectorat pour la bande dessinée franco-belge. Faire cohabiter les trois ensemble est hasardeux étant donné que rares sont les lecteurs qui apprécient les trois, tout particulièrement le lectorat historique du journal des éditions Dupuis. Avec cette formule, au mieux bancale, Spirou chasse trois lièvres à la fois et risque fort de revenir la gibecière vide.

Après le récent bide de Groom on peut se demander si Spirou ne perd pas parfois la mémoire. Lecteur du journal depuis plus de 3 500 semaines j’ai toujours peur de le perdre lorsque je vois poindre ce genre d’initiatives.

Spirou numéro 4250 du 25 septembre 2019, 52 pages couleur, 2,50 €, en kiosque

Henri FILIPPINI

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10 réponses à Spirou : le c… entre trois chaises

  1. Nicolas dit :

    Les vieux lecteurs aigris et fans du « c’était mieux avant » vont se palucher à la lecture de cet article…
    De tous temps et depuis le numero 1 en 1938, Spirou a mélangé les styles !

  2. Kroustiliyon dit :

    Dessins laids, et textes des phylactères bâclés. Même en dédicace, on soigne mieux ! Quant à Spirou, c’est le bor-del : il n’y a plus d’homogénéité, de stabilité ! C’est devenu une grande brocante où rien n’est rangé, présenté, il faut farfouler, pour s’y retrouver… Ici, pour Spirou chez les Soviets, ça a l’air d’aller, pourvu que ça dure ! Sinon, pour le reste : Tome et Janry, au secouuuuurs !! Question : il n’y a plus de dessinateurs talentueux et soigneux en Francophonie ? J’ai l’impression que tout le monde est dessinateur si il veut. Et le talent, pour lequel on travaille dans l’ombre parfois des années, il est où ? Spirou a changé (« évolué », diront des sans-talent rêveurs) : je prends un exemplaire du journal des années 60-70 et un actuel, dans le premier, je jette 2-3 pages qui ne me plaisent pas et j’admire le reste, dans l’actuel, je garde 2-3 pages qui me plaisent et je jette le reste. Dargaud peut prendre l’entièreté de la maison de Marcinelle, le beau journal a vécu. Il est juste bâclé pour finir sa vie ailleurs qu’en pays de Charleroi…

  3. drouard dit :

    Que dire du Spirou actuel. Que je n’achète qu’a l’occasion de n° spécial.
    Il a beaucoup perdu de sa splendeur des années 1965/70 l’époque ou je lissait plein de
    BD populaire.
    A l’époque il y avais une bonne concurrence avec tout les autres hebdo qui rivalisais
    d’ingéniosité pour attirer de nouveaux lecteurs.

  4. Jean dit :

    Moi, je vous trouve bien sévère. Le nouveau rédacteur est arrivé depuis peu et il faut du temps pour retrouver une stabilité et passé le matériel acheté précédemment par l’ancienne rédactrice. Moi, je trouve qu’il redresse petit à petit le journal avec les moyens dont il dispose et il faut du temps aussi aux auteurs de sortir de nouvelles production. Spirou a eu des hauts et des bas. Dans la famille on lit et garde Spirou depuis presqu’à l’origine… et ce qui nous empêche pas d’acheter et apprécier les mangas. Je pense que le défi est de trouver d’excellents scénaristes ou d’en former. Il y a beaucoup de très bons dessinateurs… et puis il faudrait arrêter la sortie d’albums par centaines qui notent les très bons nouveaux auteurs dans des albums qui ne méritent pas la publication… il serait temps que les éditeurs fassent un vrai travail éditorial. Il sort tellement de titre que l’on est obligé de commander nos séries régulières quand on sait qu’elles paraissent… cette politique tuent la bd et soyons honnêtes les fameux romans graphiques sont d’une médiocrité affligeante. Il y a sans doute de bonnes choses qui finiront au pilon car jamais déballés par les libraires. Moi, qui suit nul en dessin, je pourrais, vu le niveau, passer pour un dessinateur… et puis on donne pas la chance aux nouveaux auteurs d’installer leur série. Les grands auteurs classiques ont mis du temps et des albums pour s’imposer au grand public. J’ai dans ma bibliothèque énormément de tome 1 d’excellents auteurs dont on aura jamais la suite parce que l’on leur a pas donné la chance… et puis la direction éditoriale de certaines maisons d’édition est incompréhensible du public… au moins avec les mangas, on est pas déçu et les scénarios très originaux dans des domaines diverses… ce n’est que mon avis mais le marché de la bd hors manga va s’écrouler d’un coup d’autant que les prix de ventes… mais bon, ce n’est que mon avis….

    • caramel dit :

      D’accord avec vous jean sur la derniere partie de votre post les mangas écrasent tout en termes de création.
      Qui lit Spirou à part les vieux de la vieille comme fifipipifini.
      D’ailleurs c’est combien d’exemplaires par semaine ?
      Quelqu’un à la réponse ?

      • Leo dit :

        Spirou je l’ai aimé, mais aujourd’hui et je vais être tranchant, j’aimerais parfois qu’il s’arrête.
        Spirou se force à vouloir surfer sur la vague « manga » mais ça ne prend pas. Le lectorat manga lit des mangas c’est tout ! et ne sait même pas que spirou existe ou de manière très anecdotique.
        Spirou devrait promouvoir ce qu’ils ont fait depuis tout le temps la BD franco-belge ou traditionnel.

  5. Henri Khanan dit :

    Pas beaucoup d’acheteurs en kiosques/maisons de la presse (d’ailleurs on ne les trouve pas partout), mais à peu prés autant d’abonnés. et puis il y a les acheteurs des fameuses reliures ….

  6. Olivier Northern Son dit :

    Ne faut-il pas plutôt voir dans les pages « vertes » de Spirou un nouvel avatar de l’Oncle Paul?

  7. box office story dit :

    En tout cas Tif et Tondu me fait bien marrer.

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