Dix ans après la parution de « Résurrection », la première partie d’un diptyque accouché dans la douleur, voici enfin « Révélations » : conclusion du dernier récit du regretté Philippe Tome, décédé alors qu’il travaillait sur les dernières pages de son scénario. Les éditions Dupuis proposent, enfin, l’intégralité de cette aventure magistralement dessinée par Dan Verlinden, digne successeur de ses deux prédécesseurs : Luc Warnant et Bruno Gazzotti.
Lire la suite...Spécial 50 ans de Rahan : il était une fois la Préhistoire…
Le 24 février 1969, Rahan fait son apparition dans le premier numéro de Pif Gadget avec « Le Secret du Soleil ». Libre-penseur, observateur inventif et athlétique, ce nouveau héros fait instantanément mouche, dans une Préhistoire fabuleuse qui laisse la part belle à tous les rebondissements. Ce long succès doit indéniablement beaucoup à ses créateurs, Roger Lécureux (scénariste mort en 1999) et André Chéret (né en 1937), dessinateur hors pair qui permettra à la série de prendre une aura exceptionnelle. 50 ans plus tard, le « fils des âges farouches » réapparaît aux éditions Soleil dans une intégrale relookée. Tous « Ceux-qui marchent-debout » lui souhaitent un très bel anniversaire !
Des « intégrales Rahan », les lecteurs en auront connu… beaucoup ! C’est d’abord l’éditeur historique (Vaillant – Pif) qui propose à partir d’octobre 1971 une série de 27 volumes en noir et blanc rassemblant chacun entre 56 et 75 planches (chaque aventure étant composée d’une vingtaine de planches en moyenne). À cette occasion, comme l’explique Louis Cance (le signataire des préfaces de la version 2019), des pages de raccord entre les épisodes seront réalisées. Cette première collection sera suivie d’une deuxième (toujours chez Vaillant) entre 1978 et 1984 (36 albums). Entre mars 1983 et juillet 1987, Vaillant inaugure également en kiosque une très belle collection de 42 fascicules cartonnés souples à couvertures noires. Cette dernière reste dans les mémoires jusqu’à la reprise et la poursuite de la série par les éditions Soleil. Naîtront les collections « Tout Rahan » (maquette de couverture grise, 28 tomes et 3 hors-séries publiés entre avril 1992 et août 1997, les derniers tomes étant rajoutés de 2009 à 2011) et « Rahan, l’intégrale » (maquette de couverture noire ; 25 albums et 1 hors-série de 1998 à 2013)). Citons également en parallèle « Rahan – la collection », du nom des 67 albums proposés par Altaya entre 2011 et 2013. Afin de célébrer les quarante ans de la série, Soleil republiera de 2009 à 2014 dix volumes en noir et blanc rappelant ainsi la toute première intégrale. Rappelons que la majorité des aventures (près de 4 000 planches et 200 épisodes) de ce héros préhistorique furent publiées entre 1969 et 1989 dans Pif Gadget, magazine disparu en 1993 avant de renaître sous différentes formules en 2004, 2015 et 2018.
Au fil des années, il sera en conséquence assez difficile pour le lecteur lambda de s’y retrouver entre rééditions, intégrales partielles et réelles nouveautés (voir les listes descriptives proposées sur le site dédié : http://www.rahan.org/actuel/envente.html et http://www.rahan.org/archive/index.html ; ce d’autant plus que d’autres éditeurs (Hachette, GP Rouge et Or, Messidor, J’ai Lu poche, etc.) publieront de temps à autres des albums sous des titres isolés ou alternatifs. À partir de 1991, Novedi et Dupuis publient « Les Nouvelles Aventures de Rahan », ensemble de 3 tomes dessinés par Chéret et constituant alors la 9ème série engagée autour du personnage ! En juin 1999, suite à la disparition de Roger Lécureux, c’est son fils Jean-François Lécureux qui reprend les rênes de Rahan et se lance dans l’édition en publiant une nouveauté marquante (« Le Mariage de Rahan »). La série est dès lors proposée partiellement par les éditions Lécureux tout en préservant les codes initiaux : le blond Rahan, seul survivant de son clan décimé par une éruption volcanique, parcourt le monde avec son éternel coutelas d’ivoire et son collier de griffes d’ours, afin de découvrir où se couche le Soleil : en croisant et aidant diverses civilisations, il devient un héros idéal, vecteur d’une nouvelle ère plus civilisée.
Imaginé au croisement des temps préhistoriques et des années 1970 – 1980, « Rahan » baigne dans ces deux influences par sa quête du savoir, son refus de la violence, la diversité de ses inventions et sa propre philosophie humaniste. Ni super-héros ni surhomme, Rahan est un chasseur qui cherche à comprendre, un simple mortel qui traverse non sans difficultés les épreuves de sa lointaine époque. Les origines, les haines (vis-à-vis des Goraks, tigres à dents de sabre ayant tué ses parents) et les mystères du héros donneront du reste assez de matière aux auteurs enfin désireux d’expliquer « L’Enfance de Rahan » en 1974. Autre surprise : au détour de la couverture de Pif Gadget n° 443 (août 1977), voici qu’est annoncée « La Mort de Rahan », titre qui procura bien des sueurs froides aux fans d’une série déjà devenue culte. Sans naïveté excessive, prônant avec une modernité de ton la tolérance et le partage, le respect des femmes et de la nature, « Rahan » saura faire accepter ses enseignements proches de l’esprit socialiste et communiste de Vaillant – Pif. Stylistiquement, Rahan emprunte sa musculature aux icônes américaines (le « Tarzan » de Burne Hogarth en 1936) mais il renouvelle aussi à sa manière une certaine représentation de la Préhistoire dans le roman (« La Guerre du feu » de Rosny aîné en 1909) ou la bande dessinée (« Timour » de Sirius en 1953 ; « Tounga » par Édouard Aidans en 1964). La virtuosité de Chéret étonnera aussi bien Uderzo que Van Hamme (voir leur collaboration sur « Domino), Greg ou Gotlib, Nous renverrons ici au long article détaillé composé par Gilles Ratier en 2009 et expliquant la riche carrière d’André Chéret (http://bdzoom.com/2612/patrimoine/le-coin-du-patrimoine-bd-andre-cheret/), artiste récompensé en 2004 de l’ordre des Arts et Lettres. Que conseiller d’autre au final à nos lecteurs que de redécouvrir son œuvre majeure en se replongeant avec délectation dans les aventures de Rahan, égrainées tout au long des 26 tomes publiés par Soleil pendant cette année 2019.
Philippe TOMBLAINE
Notes : voir également l’analyse de planche proposée autour de « Rahan : Le Collier de griffes »
« Rahan : Intégrale T1 » par André Chéret et Roger Lécureux
Éditions Soleil (18,95 €) – ISBN : 978-2302075078
« Rahan : Intégrale T2 »
Éditions Soleil (18,95 €) – ISBN : 978-2302075085
Sublime André Chéret,dessinateur de BD par excellence, à qui il devient urgent de donner le Grand Prix d’Angoulême .Pour rétablir le yin par rapport au yang ,cocos contre bobos,ceux-là mêmes, individus plus ou moins de gauche ,qui sont en train de réécrire l’histoire de la BD ,louvoyant,en prenant soin de mettre sous le tapis toute une partie de la production, populaire.
La definition même de la gentrification .Mais bien sûr le vrai problème est la surproduction…..Bien sûr.
Le tout, alors qu’il est si simple de vérifier le vrai du faux, de ce que par ailleurs on appelle du revisionnisme .Ici avec une impunité qui donne la nausée .
Alors pourquoi le Grand Prix d’Angoulême pour André Chéret qui paraît -il a arrêté de dessiner, alors qu’il a perdu son épouse, coloriste et protectrice assermentée ?
Parce que dans le domaine qui est le sien,l’aventure dessinée aujourd’hui si décriée devinez par qui…, il est meilleur que les meilleurs.Meilleur que les meilleurs à une échelle mondiale.
D’une inventivité folle.
Belle réponse
Mais d’une sénilité graphique devenue remarquable.
Et Craô sait que je suis un fan absolu (et seul Franquin entre dans mon Panthéon… avec la même maladie).
Pour l’avoir interviewé en 83 au fond du trou de ses procès avec Vaillant, vaguement et mal publié par Auzou (Protéo)…
Je devais avoir 3 ans quand le premier pif gadget est sorti, avec un succès…C’était le journal de la famille et chacun y trouvait son compte, même si je savais pas lire j’adorais Rahan, mon frère Docteur Justice et mon père Corto Maltese…Un journal d’une qualité colossale…
André Cheret était l’ultra top des dessinateurs.
J’adhère à tout ce qui vient d’être dit, Rahan c’est une très belle aventure qui fait honneur à la bande-dessinée. Et bien évidemment son support, Pif gadget, est au sommet de ce qui a pu être fait dans le domaine de la presse dite enfantine, subjuguant au passage les adultes, et marquant ses lecteurs à jamais !
Ce qu’il faut c’est lire les intégrales noir et blanc sorties chez Soleil pour comprendre ce que veut dire « narration BD » en réaliste et qui est André Chéret.Qui il est vraiment.
Par contre pour ce qui est du journal Pif ,pour sa relance annoncée cela semble être. .. Tintin…. : http://www.leparisien.fr/culture-loisirs/tv/relance-de-pif-gadget-ou-est-passe-l-argent-de-la-cagnotte-27-06-2019-8104050.php#xtor=AD-1481423553