Dix ans après la parution de « Résurrection », la première partie d’un diptyque accouché dans la douleur, voici enfin « Révélations » : conclusion du dernier récit du regretté Philippe Tome, décédé alors qu’il travaillait sur les dernières pages de son scénario. Les éditions Dupuis proposent, enfin, l’intégralité de cette aventure magistralement dessinée par Dan Verlinden, digne successeur de ses deux prédécesseurs : Luc Warnant et Bruno Gazzotti.
Lire la suite...« Double 7 » par André Juillard et Yann
Hiver 1936. Plongés dans la guerre d’Espagne face aux troupes franquistes, les Républicains bénéficient du soutien des chasseurs « Mosca » envoyés par Staline. Parmi ces as intrépides figure Roman Kapulov, qui vient de tomber éperdument amoureux de la belle milicienne Lulia Montago. Leurs nobles sentiments triompheront-ils des horreurs de la guerre ? Sept ans après avoir raconté la naissance d’Israël dans « Mezek » (Lombard), forts de leur passion conjuguée pour les joutes aériennes et la ligne claire, Yann et Juillard signent chez Dargaud l’un des plus beaux one-shots de cette rentrée éditoriale. Un amour de l’Histoire – sous influence shakespearienne – qui donne des ailes !
Interviewé en août 2016 dans le magazine Casemate (voir également le cahier spécial figurant dans le n° 116 de l’été 2018) sur le devenir des « Mondes de Thorgal », Yann en profitait pour glisser quelques informations concernant son prochain projet en commun avec André : « Il a terminé son nouveau « Blake & Mortimer », avec Yves Sente, et va donc pouvoir attaquer notre histoire sur la guerre d’Espagne. Un one shot d’une soixantaine de pages sur un pilote russe du côté républicain. Une histoire un peu déchirante, quand on sait que les hommes comme lui, de retour en URSS, étaient récompensés d’une balle dans la nuque. »
Intitulé « Double 7 » par référence à l’un des emblèmes (un double domino, ici troué par deux impacts de balles de mitrailleuses) arborés sur l’empennages des forces aériennes républicaines, ce récit poussera Juillard à redessiner des avions (russes, allemands et italiens) ainsi que quelques personnages historiques : « … dont Hemingway et sa femme Martha Gellhorn (mon cauchemar tant je suis nul pour le portrait !) et surtout un beau pilote russe et une belle milicienne du CNT [Confédération Nationale du Travail]. Ils se nomment Roman Kapulov et Lulia Montago… pour vous donner une idée du thème de l’histoire ! »
Pour Yann, outre la remise en scène d’un pan méconnu de la guerre d’Espagne, l’intérêt scénaristique de « Double 7 » réside dans la description de « deux personnages qui ont surtout en commun le fait d’être des « Mavericks », des individus de fort caractère, indépendants d’esprits, refusant de se soumettre aux codes conventionnels ambiants et n’ayant pas abdiqué leur libre arbitre ; personnellement, homme ou femme, c’est le type de personnalité dotées d’un libre arbitre qui m’attire le plus et dont j’aimerais faire partager le point de vue aux lecteurs … Des « Innommables » à Angela Mc Cloud, la Wasp de la série « Angel Wings », c’est le genre d’individu emblématique de la plupart de mes récits. »
« Double 7 » remémore les exactions de la Légion Condor, une force aérienne issue de la Luftwaffe nazie, tristement restée dans les mémoires pour le bombardement de Guernica le 26 avril 1937. Face aux appareils ennemis (de type Heinkel, Junkers ou Messerschmitt), Juillard dessine les Polikarpov I-16 russes, rebaptisés « Moscas », (« mouches »), pour leur techniques d’attaques. Ayant lancé en octobre 1936 une vaste offensive contre Madrid, les Franquistes ne s’attendaient pas à rencontrer une résistance sérieuse : outre une contre-attaque de chars russes, ils subirent la désagréable surprise de voir le ciel madrilène empli de dizaines de chasseurs soviétiques, ce alors que des bombardiers Tupolev ANT-40 effectuaient des raids fréquents. L’offensive nationaliste fut stoppée nette : elle ne parviendra à entrer à Madrid qu’à la toute fin de la guerre, le 28 mars 1939, date à laquelle les jours de la République étaient déjà comptés.
Quid des femmes et de leur rôle éventuel au sein de l’aviation républicaine ? Pour Yann : « Il n’y en eut pas que je sache en tant que pilote ; mais il n’en manquait pas au sol : particulièrement dans les rangs des féministes espagnoles du mouvement des « Mujeres libres » qui prirent les armes rapidement pour défendre l’égalité des droits et qui, sur le plan de la lutte et de l’organisation, étaient en avance sur leurs consœurs françaises. Nous mettons en scène Lulia, le pendant féminin romantique de notre beau pilote idéaliste Roman, un personnage inspiré de Marina Ginestà, une jeune fille exaltée et idéaliste, qui devint, grâce à une célèbre photo, l’icône de l’armée Républicaine espagnole, un cliché qui s’avère désormais pour les Espagnols aussi emblématique que celui du « Che ». »
Classique dans sa forme mais magnifiée par la maîtrise graphique de Juillard, « Double 7 » rejoindra aisément le peloton de tête des albums consacrés au même sujet, dont « Matteo » (par Gibrat), « Les Fantômes de Ermo » (de Bruno Loth) et « Les Temps mauvais » de Carlos Gimenez.
Philippe TOMBLAINE
« Double 7 » par André Juillard et Yann
Éditions Dargaud (16,95 €) – ISBN : 978-2505070450
Version strips (19, 99 €) – ISBN : 978-2505073758
Et que faites-vous de « No pasaran » de Vittorio Giardino et des deux deux épisodes suivants de Max Fridman?
Exact! L’Italien Giardino a évoqué la guerre d’Espagne, tout comme le stalinisme dans le remarquable Jonas Fink à Prague. Deux régimes brutaux et totalitaires, l’un à gauche, l’autre à droite.
Magnifique album, très instructif, qui dénonce les dérives du « Petit frère des peuples », alias leur bourreau, Joseph Staline, pour annihiler les souhaits républicains non inféodés à l’URSS, mais aussi les combattants russes une fois rentrés au pays!!
« Petit père des peuples », excusez-moi, cette formulation est aussi inexacte que la précédente. Un tyran sanguinaire à l’échelle internationale (il n’a pas fait souffrir uniquement des millions de Soviétiques), ses calculs étaient impitoyables, en premier le pacte germano-soviétique avec Hittler qui lui permettait de faire main basse sur la partie Est de la Pologne et sur les Pays Baltes! A l’époque, les communistes français n’ont pas dit grand chose. Que font leurs descendants?
Consultez les archives du journal l’humanité vous y trouverez les reponses à vos questions. c’est en 1956 pour le parti communiste français