Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
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Les éditions Urban comics continuent la réédition en intégrale de cette série horrifique majeure du label Vertigo, débutée en 1988 chez DC par Jamie Delano, mais dont le personnage principal a été créé dès 1985 par Alan Moore dans Swamp Thing. Plusieurs auteurs ont depuis travaillé à donner vie au personnage de John Constantine, magicien enquêteur ayant la faculté de séjourner au royaume des morts et d’en revenir. Mike Carey met notre anti héros dans une position très malaisée, faisant de lui un loser sous influence démoniaque, perdu dans un dilemme temporel. Sans doute l’un des arcs les plus désespérés de la série.
John Constantine rassemble les plus puissants sorciers de sa connaissance car une menace terrible plane sur Londres, hantant la psychique humaine, rendant des gens fous et sanguinaires. Parti volontairement dans l’au-delà pour pouvoir échapper mentalement à cet envoutement, John va néanmoins se faire piéger. Aidé au départ par Gemma, sa nièce, et Swamp Thing, il va cependant perdre plus qu’il n’aurait pu imaginer : son identité. Commence alors pour lui une errance dans les rues de Londres où il va n’être qu’un témoin des pires atrocités. La seule solution pour en sortir : accepter d’être, pour une journée, esclave d’un démon. Mais un autre a décidé de l’aider.
Si vous êtes familiers avec le personnage de Constantine, vous serez sans doute bluffé par la part très sombre de ce run et la grande désespérance que Mike Carey injecte dans son récit. On avance difficilement au fil des pages, heurtés par la dureté de cette destiné dramatique, qui touche au cÅ“ur même de la vie personnelle de notre anti héros. Rarement le personnage n’a été aussi désabusé et sans défenses. On se demande d’ailleurs jusqu’où le scénariste va nous amener. La première surprise à l’ouverture du recueil vient néanmoins du dessin de Marcello Frusin, qui, ici, avec son aspect un peu adolescent, quoi que bien gothique, permet de nous attirer doucement et sans à coups vers le cÅ“ur du récit, devenant de plus en plus sombre (épisodes 189 à 193 : « Droit dans le mur »).
Leonardo Manco prend le relais au numéro transitoire 194, puis assure le 195 pour la première partie de « Hors saison », où Constantine, entre le cauchemar et la réalité, doit affronter le serial killer Gill. Son dessin tacheté et un peu sale, très marqué années quatre-vingt, colle parfaitement au sujet. Pourquoi dès lors avoir laissé la conclusion de cet épisode à Chris Brunner, au style « coupé au couteau » assez différent ? Peut-être justement parce que tranchante est la conclusion. Bien vu.
Marcello Frusin reprend les pinceaux, dans son style bien gothique, parfait croisement entre un Mike Mignola et un Eduardo Risso, pour la conclusion terrible de « Chemin de croix » de toute beauté graphique, magnifiée par les couleurs de Lee Loughridge (épisodes #197-199). Steve « Preacher » Dillon réalise les premières cases de « Les Rejetons », dans son style franco belge si reconnaissable, tandis que Marcello Frusin joue l’intermède « rêvé » de John Constantine et Leonardo Manco, le dur retour à la réalité.
Les épisodes « Jeux d’enfants » (201-202) et « Des raisons de se réjouir » (203-205) sont eux entièrement réalisés par Leonardo Manco. De quoi finir bien déprimé, quoi que comme annoncé en début de chronique, un « gentil » démon : Nergal, est aux côtés de Constantine pour l’aider (liens familiaux obligent). Ces deux-là vont devoir retourner en enfer pour régler des comptes…
Un récit puissant mais difficile, à suivre dans le tome trois, si vous en avez le courage. Âmes sensibles s’abstenir.
Franck GUIGUE
« Mike Carey présente Hellblazer » T2 par Marcello Frusin, Leonardo Manco… et Mike Carey
Éditions Urban comics (28 €) – ISBN : 9791026814115
Les traits de Frusin et de Manco sont opposés, mais tous les deux intéressants. D’un coté, une ligne claire réaliste à la Risso (sud-américain comme Frusin), de l’autre le réalisme sombre de Manco. Que du bon pour cette livraison, mais Hellblazer a presque toujours été une excellente série Vertigo! Je rappelle que Frusin a également travaillé en direct avec Dargaud pour l’Expédition.
Oui, tout à fait. Et j’ai adoré l’« Expédition » d’ailleurs :
http://nebular-store.blogspot.com/search?q=frusin&by-date=false
J’espère pour ma part qu’Urban va rééditer les origines de Constantine, puisque la série Swamp Thing d’Alan Moore est épuisée depuis quelques années déjà . Pas de pistes pour i »instant dans leurs plannings, mais cela viendra peut-être (si on demande gentiment à plusieurs ?)
Merci du commentaire.
Oui, la dernière édition était parue chez Delcourt. Bah, cela viendra bien un jour!