Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
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Quelle bonne idée de rééditer (1) ce décapant recueil de cartoons et de courtes bandes dessinées loufoques revisitant le sulfureux et mythique ouvrage indien, écrit entre le VIe et le VIIe siècle, spécialisé dans les arts amoureux et les pratiques sexuelles : une nouvelle présentation, réintitulée « Kamasultra », qui met très bien en avant le côté érotico-irrévérencieux de l’art foldingue du trop méconnu artiste italien Benito Jacovitti.
En effet, quand ce génial dessinateur (2) s’empare de ce jeu sur les codes d’une société où le sexe est considéré comme une religion, les corps se mélangent en un joyeux bazar, qui s’apparente davantage à un gros plat de pâtes qu’à un déchaînement pornographique.
Cette relecture sarcastique et dévastatrice remonte à l’année 1977, époque où Jacovitti travaillait pour A.V.E. : éditeur très catholique qui finira par mettre notre illustrateur à la porte parce que ce dernier s’était permis de produire des dessins érotiques destinés aux textes du « Kamasultra » rédigé par le scénariste et réalisateur de films Marcello Marchesi. Toutefois, Jacovitti ne se laissa pas intimider, puisque trois ans plus tard, il récidivera en dessinant « Il Kamasutra spaziale » : une version plus complète destinée au magazine Playmen.
On retrouve d’ailleurs la prose ironique de l’iconoclaste Marchesi dans cette version concoctée par l’éditeur Jean Annestay, lequel a bénéficié de la contribution de l’un des meilleurs spécialistes transalpins de l’auteur de « Coco Bill » ou de « Zorry Kid » : Gianni Brunoro.
Bref, voilà un ouvrage idéal pour (re)découvrir le talent de ce prolifique dessinateur aux saucissons au style complètement délirant qui, outre Édika en France ou Hunt Emerson au Royaume-Uni, n’a eu finalement que très peu d’adeptes.
« Kamasultra » par Benito Jacovitti
Éditions i (19,70 €) — ISBN : 978-2-37650-003-2
(1) La première traduction en français de ce petit chef-d’œuvre de Jacovitti a été proposée par les éditions Artefact, avec l’album « Kamasutra », paru en juin 1983, dans la collection La Tranche.Â
(2) Pour en savoir plus Benito Jacovitti, voir notre « Coin du patrimoine » : Les « Pinocchio » de Jacovitti.
..c’était un immense dessinateur…je l’ai decouvert dans les années cinquante quand ses dessins paraissaient en France dans » Super Boy « .!…son style unique est toujours resté dans ma mémoire….