Dans le cinquième volume de ses aventures, « Le Grimoire d’Elfie T5 : Les Reflets de Walpurgis », la jeune Elfie découvre le marais poitevin (entre La Rochelle et Niort) et des festivités réservées aux magiciens et sorcières depuis le temps de la mystérieuse fée Mélusine. Une nouvelle enquête pour la jeune adolescente, avec l’apport non négligeable de son grimoire magique, à l’issue de laquelle elle en aura appris beaucoup sur les dangers contemporains qui guettent cette zone humide remarquable et sa propre famille.
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En janvier 2016, enfin consacré à sa juste mesure, Hermann obtenait le Grand Prix lors du 43e Festival d’Angoulême. Maître absolu de la BD franco-belge – avec plus 50 ans de carrière -, l’auteur aura enchaîné dans ses créations la grande aventure exotique (« Bernard Prince ») et le western (« Comanche »), puis l’histoire (« Jugurtha » ; « Les Tours de Bois-Maury ») et la science-fiction post-apocalyptique (« Jeremiah), avant de se tourner (seul ou avec son fils Yves) vers des one-shots aussi révoltés que somptueux, évoluant au fil des années du noir et blanc vers la couleur directe. L’analyse de ses travaux étant demeurée rarissime, attardons-nous aujourd’hui sur l’une de ces planches d’antan qui ont forgé son style si impressionnant. Au détour de la 35e planche de « La Frontière de l’enfer » (album
paru en 1970 au Lombard), voici Bernard Prince, Barney Jordan et Djinn affronter un ennemi aussi terrible qu’insaisissable : une zone tropicale inhospitalière littéralement infestée de millions de moustiques…
Repéré par le scénariste Greg dès 1965, Hermann débute dès janvier 1966 sur « Bernard Prince » qui apparaît en tant qu’agent d’Interpol dans la version belge du journal Tintin (le premier court récit se nommant « Billet surprise » ; voir un précédent article de Gilles Ratier consacré à ce héros). Dépassant le simple cadre des enquêtes policières et tenus de faire évoluer leur personnage, Greg et Hermann propulsent peu à peu leur héros vers la grande aventure sous toutes les latitudes : en 1967, dans « Les Pirates du Lokonga », le duo composé de Prince et du jeune Djinn (un orphelin d’origine indo-pakistanaise) devient un trio avec la rencontre du tonitruant Barney Jordan. Évoluant sur un yacht blanc surnommé le Cormoran, ce petit équipage sera confronté à toutes les avanies du genre : trafics douteux et prises d’otages, guerres et coups d’états, machinations et guet-apens, éruptions volcaniques et incendies dévastateurs ! Les titres de la série seront à l’avenant de ce joyeux programme : « Général Satan » (T1, 1969), « Tonnerre sur Coronado » (T2, 1969), « La Loi de l’ouragan » (T6, 1973) ou « Le Port des fous » (T13, 1978).
Le journal de Tintin belge n°15 daté du 9 avril 1968 (n°1016 du 11 avril 1968 en France) débute la prépublication de « La Frontière de l’enfer », récit en 44 planches qui deviendra en septembre 1970 le troisième tome de la série publiée par les éditions du Lombard. Sur la couverture – très sobre en textes ou effets d’annonces – de l’hebdomadaire, rien ne laisse encore présager de « l’enfer » que vont vivre nos trois protagonistes, et il faudra donc que les lecteurs patientent jusqu’au visuel du numéro 25 du 18 juin suivant (n°1026 du 27 juin en France) pour prendre la pleine mesure de l’épreuve exotique : sans mot dire (de nouveau, aucun texte-annonce ne vient renforcer l’image), l’enfer en question est donc vert (les personnages évoluent dans les eaux marécageuses d’une jungle de type sud équatoriale), et s’avérera physiquement et psychologiquement dévastateur, cataclysmique et oppressant !
Comment nos héros sont-ils arrivés dans cette galère ? Un rien revanchard, le général Satan – première nemesis officielle du trio – a tendu à Lao-Todang un piège démoniaque à ses valeureux adversaires. Doublement accusés de vol et de meurtre, Bernard Prince et Barney sont conduits au pénitencier de Suong Bay, qui possède la triste réputation d’être le bagne le plus inhumain du monde. Tout est naturellement prévu pour qu’il puisse « aisément » s’évader (avec l’aide courageuse de Djinn et de deux solides codétenus nommés Cody et Cavalli)… et ne jamais revenir de la terrible jungle qui s’étend aux alentours, sur des kilomètres présumés infranchissables. Peuplée de crocodiles et envahie de myriades de moustiques qui dévorent ou rendent fous tout ceux qui osent s’approcher, la nature est encore plus hostile que l’humanité pervertie qui hante les planches d’Hermann. Et c’est peu dire !
Planche 35, le ton est donné dès la première case : évadés depuis la planche 22 sur un ultime avertissement au lecteur ampli de toute la verve de Greg («… Et droit devant eux, les attend une invisible frontière au-delà de laquelle nul être humain ne peut garder à la fois sa raison et sa vie ! [...] »), l’équipée héroïque se retrouve donc seule (Cody et Cavalli étant déjà morts et disparus), encerclée par le bourdonnement ininterrompu de milliards d’insectes. Perçu en plongée, le plan annoncé par Bernard Prince se heurte d’emblée à des perspectives peu réjouissantes : les doutes de Barney sur leurs capacités à s’en sortir, la bordure haute de la case qui réduit l’échappatoire à une masse liquide noirâtre. Dès la case 3, le cadrage se fait rapproché : les corps, déjà à moitié immergés, vont disparaître sous un brouillard volant et dévorateur d’où ne filent que les bulles permettant de suivre – selon la rythmique incessante de l’aiguillon aventureux – l’épopée infernale. Au deuxième strip (cases 4 à 6), le mouvement inverse au sens naturel de lecture raconte à sa façon le calvaire ; la lumière revient l’espace d’un instant lorsque, case 6, le visage songeur et à découvert de Barney – saisi en gros plan – nous laisse espérer par sa force de caractère. Tant et si bien qu’à la case 7, le lecteur ne sait que trop qui va émerger de cette traversée au pays des diptères. Invisible depuis la case 3, Bernard a disparu : « Il n’a pas suivi ! Il est toujours là-dedans !! » clame en conséquence Barney dans l’ultime case 9. La relance du suspense est là, selon un art conventionnel du scénario franco-belge parfaitement connu : à peine en est-on sorti qu’il faut y retourner ; de même, à peine le lecteur a-t-il pu reprendre son souffle qu’il est invité à replonger de plus belle et tête baissée dans la suite des péripéties, en tournant la page suivante. Le plus fort dans tout ça ? En 2016, ce chef-d’œuvre du graphisme hermannien n’a pas pris une seule ride : « Bernard Prince » est vraiment « d’hier et d’aujourd’hui »… Et nul besoin de se piquer pour s’en convaincre.
Philippe TOMBLAINE
« Bernard Prince T3 : La Frontière de l’enfer» par Hermann et Greg
Éditions du Lombard (11, 95 €) – ISBN : 978-2803612796
Première édition en 1970 ; réédition (nouvelle couverture) en 1997.
Quel beau sujet !!! Une série qui ne comporte quasiment que des chefs-d’oeuvres.
A quand un petit article sur la prochaine ré-édition des Comanche prévue au Lombard ?
Ces rééditions au Lombard seront signalées à la rentrée dans la rubrique « Patrimoine », pour leurs parutions effectives.
Par ailleurs, j’avais annoncé pour aujourd’hui un article analytique concernant plutôt la série Jeremiah : celui-ci sera également mis en ligne cet automne.
A propos d’une réédition des Comanche, j’aurai une « supplication » à faire au sujet de l’album « Le ciel est rouge sur Laramie » dont toutes les éditions jusqu’à présent ont été tronqués de cinq planches parues dans le journal Tintin. A cette époque, Greg, le rédacteur en chef et homme orchestre de la revue avait décidé de faire paraître certaines histoires en chapitres avec des planches d’amorce ou de conclusion donnant à chaque chapitre l’aspect d’un épisode fini au sein d’une histoire plus longue (cf à ce sujet le dernier KaBoom). Concernant « Le ciel est rouge sur Laramie » certaines de ces planches (la 17B rebaptisée 18 dans l’album (tandis que la 18 devenait 18B) ainsi que la 30B ont été conservées tandis que les 9B, 17B, 23 B , 23T et 30T) ont été écartées car jugées non indispensables à l’histoire. Dans « Schtroumpfs, les cahiers de la bande dessinées n°44″ qui lui était consacré en 1980, Hermann regrettait cette amputation : « Nombres de lecteurs se sont sentis frustrés. C’est pourtant mon meilleur album dans la série Comanche…C’est le côté un peu épicier des éditeurs. Pourquoi ne pas avoir gardé le tout ? Cela aurait-il donc tant coûté ? ». Ces cinq pages écartées je les ai découvertes pour la première fois en 2009 sur le site officiel d’Hermann et on ne peut qu’être d’accord avec son avis de l’époque. En effet, non seulement, elles sont superbement dessinées comme le reste de l’histoire (c’est de mon point de vue le « sommet » de la première période d’Hermann (celle au trait noir et au pinceau)) MAIS AUSSI elles apportaient vraiment quelque chose à l’histoire. « Le ciel est rouge sur Laramie » est le premier album de la série que j’ai eu entre les mains lorsque j’étais gamin et aujourd’hui encore il reste mon préféré. Sa seule petite faiblesse résidait justement dans les liaisons un peu abruptes entre certains chapitre, faiblesse qui n’existe plus si on remet toutes ces pages qui par ailleurs ont un intérêt narratif évident, particulièrement la 17B qui nous dit pourquoi Dobbs et Wetchin ne prennent pas le temps d’achever Dust mais surtout qui nous montre Shaver Sharp laissant passer l’occasion de descendre les deux bandits. La 23B montrant l’enterrement d’Ambrosius Ryan ne manque pas d’intérêt non plus tout comme la 30T où Wetchin tire en rigolant sur le docteur qui vient de le soigner et de l’aider à se remettre en selle (il faudra simplement veiller pour une meilleure lecture à ce qu’elle se retrouve sur une page de gauche). En fait, on reproche parfois à Greg la faiblesse psychologique de ses personnages mais justement ça me semble tout le contraire dans cet album ou chacun est traité avec finesse (façon un peu « old school » quand même mais vraiment bien à mon goût) . Je pense que la richesse des protagonistes de l’histoire serait encore mieux mise en valeur si on restaurait l’intégrité de l’album. J’espère qu’Hermann a pensé à user de tout son poids pour qu’elles apparaissent dans la prochaine rééditions: ça rendrait justice au talent de Greg et ferait profiter les lecteurs de pages superbement dessinées. Me concernant, la version du « Ciel est rouge sur Laramie » que j’ai actuellement dans ma bibliothèque est une réédition de 1993 : à l’arrière de l’album en guise de présentation des auteurs il y a pour Hermann l’ancienne présentation piquée dans les vieux Jugurtha (« Ce dessinateur fut séduit par la vie aventureuse de Jugurtha ») et pour Greg celle piquée aux albums Bernard Prince des années 80 et qui ne correspond même pas à Commanche ni à Hermann (« Comme il les connaît aussi bien l’un que l’autre, Greg continue les aventures de Bernard Prince avec Dany comme il l’a fait avec Greg »)… Je serai ravi de me débarrasser de cette édition pour une nouvelle qui respecterait mieux les auteurs.
Bonjour,
Yves H. a confirmé sur le forum consacré à Hermann que les planches manquantes doivent bien être dans la réédition annoncée.
Par ailleurs, ces rééditions sont dotées de nouvelles/anciennes couvertures, c’est-à-dire différentes des anciennes mais avec des illustrations d’époque (des couvertures du journal Tintin).
Vous pouvez voir les trois premières sur le site de l’éditeur :
http://www.lelombard.be/albums-a-venir-bd/
Bizarrement, le tome 3 avait d’abord été annoncé avec une couverture issue d’un journal Tintin, mais ils semblent avoir finalement opté pour une illustration récente, que je ne connaissais pas (peut-être réalisée pour l’occasion ?…).
J’apprends sur votre site qu’une réédition de la série Comanche est prévue pour bientôt et j’ai une « supplique » à faire à l’éditeur au sujet de l’album « Le ciel est rouge sur Laramie » dont toutes les éditions jusqu’à présent ont été tronqués de cinq planches parues jadis dans le journal Tintin. A cette époque, Greg, le rédacteur en chef et homme orchestre de la revue avait décidé de faire paraître certaines histoires en chapitres avec des planches d’amorce ou de conclusion donnant à chaque chapitre l’aspect d’un épisode fini au sein d’une histoire plus longue (lire à ce sujet une interview de Greg dans le dernier KaBoom). Concernant « Le ciel est rouge sur Laramie » deux de ces planches, la 17T rebaptisée 18 dans l’album (tandis que la 18 devenait bizarrement la 18B) ainsi que la 30B ont été conservées tandis que les 9B, 17B, 23 B , 23T et 30T ont été écartées car jugées non indispensables à l’histoire. Dans « Schtroumpfs, les cahiers de la bande dessinées n°44″ qui lui était consacré en 1980, Hermann regrettait cette amputation : « Nombres de lecteurs se sont sentis frustrés. C’est pourtant mon meilleur album dans la série Comanche… C’est le côté un peu épicier des éditeurs. Pourquoi ne pas avoir gardé le tout ? Pourquoi ne pas sortir un album un peu plus gros ? Cela aurait-il donc tant coûté ? ».
Ces cinq pages écartées je les ai découvertes pour la première fois en 2009 sur le site officiel d’Hermann et on ne peut qu’être d’accord avec son avis de l’époque. En effet, non seulement, elles sont superbement dessinées comme le reste de l’histoire (c’est de mon point de vue le « sommet » de la première période d’Hermann (celle au trait noir au pinceau)) MAIS SURTOUT elles apportaient vraiment quelque chose à l’histoire. « Le ciel est rouge sur Laramie » est le premier album de la série que j’ai eu entre les mains lorsque j’étais gamin et aujourd’hui encore il reste mon préféré. Sa seule petite faiblesse résidait justement dans les liaisons un peu abruptes entre certains chapitre, faiblesse qui n’existe plus si on remet toutes ces pages manquantes qui par ailleurs ont un intérêt narratif évident. C’est particulièrement vrai pour la 17B qui nous dit pourquoi Dobbs et Wetchin ne prennent pas le temps d’achever Dust mais surtout qui nous montre Shaver Sharp laissant passer l’occasion de descendre les deux bandits. La 23B montrant l’enterrement d’Ambrosius Ryan ne manque pas d’intérêt non plus, tout comme la 30T où Wetchin tire en rigolant sur le docteur qui vient de le soigner et de l’aider à se remettre en selle (il faudra simplement veiller pour une meilleure lecture à ce qu’elle se retrouve sur une page de gauche). En fait, on reproche parfois à Greg la faiblesse psychologique de ses personnages mais justement ça me semble tout le contraire dans cet album ou chacun est traité avec finesse (façon un peu « old school » quand même mais vraiment très bien pour mon goût) .
Je pense que la richesse des protagonistes de l’histoire serait encore davantage mise en valeur si on restaurait son intégrité à l’histoire. J’espère qu’Hermann a pensé à user de tout son poids pour que ces cinq planches apparaissent enfin dans la prochaine édition: ça rendrait justice au talent de Greg et ferait profiter les lecteurs de pages superbement dessinées. Me concernant, la version du « Ciel est rouge sur Laramie » que j’ai actuellement dans ma bibliothèque est une réédition de 1993 : à l’arrière de l’album on trouve en guise de présentation des auteurs un vieux pitch issu d’un dos d’album de Jugurtha pour Hermann (« Ce dessinateur fut séduit par la vie aventureuse de Jugurtha… blabla… ») et pour Greg un pitch piqué à un album de Bernard Prince des années 80 même pas dessiné par Hermann (« Comme il les connaît aussi bien l’un que l’autre, Greg continue les aventures de Bernard Prince avec Dany comme il l’a fait avec Hermann… blabla… »)… Je serai ravi de me débarrasser de cette édition pour une nouvelle qui respecterait les auteurs.
Heu… Ben même réponse, du coup…
Oui, pardon pour avoir posté 2 fois quasiment la même prose…
En fait comme mon message n’apparaissait pas sur le site, je pensais avoir fait une fausse manoeuvre en l’envoyant et j’ai donc tenté ma chance de nouveau le lendemain.
Concernant les planches manquantes, c’est une excellente nouvelle.
Pour ce qui est des couvertures, c’est vrai que les deux premières n’étaient pas fabuleuses (particulièrement celle des « Guerriers du désespoir ») et les remplacer par des couvertures du journal Tintin n’est pas idiot (elles apparaissaient déjà en page de garde des anciennes éditions). Pour le troisième album, mettre un dessin inédit avec un dessin fait récemment pour l’occasion ne me semble pas une bonne idée . Personnellement je préfère toujours quand la couverture correspond à l’époque et au dessinateur des planches de l’album … et en plus changer de stratégie sur la maquette en cours de route ne me semble jamais judicieux . Par ailleurs la couverture originale des « Loups du Wyoming » était plutôt bonne.
Pour ce qui est du « Ciel est rouge sur Laramie », la couverture originale est très bien et je ne vois pas de raison d’en mettre une autre.
Pour la couverture du 3ème abum (Les Loups du Wyoming), il s’agit d’une illustration datant des années 2000, qui avait du reste déjà été montrée dans la 2ème tome de l’intégrale Comanche (2005) : il s’agit d’un des divers visuels d’Hermann présentant la chevauchée infernale des frères Dobbs, variation du dessin présent en couverture de Tintin n°33, paru le 15 août 1972.
Merci de cette précision.
Du coup je suis allé chercher la couverture en question sur internet et je pense que ce serait plus judicieux de choisir cette couverture du Tintin n°33 de 1972 (ou bien celle du n°27 du 4 juillet 1972 qui n’est pas mal du tout). Toujours par soucis de cohérence avec la maquette choisie pour les deux premiers albums (car le dessin d’Hermann a quand même sacrément évolué entre 1972 et 2000).