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« Les Mondes cachés : L’Arbre-forêt » par Silvio Camboni et Denis-Pierre Filippi

09/04/2015
Par Laurent Lessous

Dans le Paris d’aujourd’hui, une aventure fantastique est toujours possible, par-delà les toits, il faut passer au travers le miroir d’un jardin extraordinaire pour découvrir un monde caché, autour d’un arbre-forêt. Voilà de quoi réveiller le côté aventureux de Grégoire, le héros maintenant adolescent de la série « Gargouilles ».

De 2004 à 2012, le jeune Grégoire a reçu une formation de mage en multipliant les voyages temporels vers le Moyen-âge, dans les sept volumes de la série « Gargouilles ». Ce garçon ordinaire et sa sœur se sont confrontés à tout un bestiaire coloré de créatures fabuleuses peuplant un XVII^e siècle de fantaisie, dans des aventures fort mouvementées. Mais le retour à la réalité du XXI^e siècle est douloureux, leurs parents se séparent.

C’est ici que commence le second cycle de leur récit d’apprentissage, mais pas besoin d’avoir lu les épisodes de « Gargouilles » pour comprendre l’intrigue des « Mondes cachés ». Dans le premier volume de cette suite, le lecteur découvre un Grégoire adolescent qui veut retrouver une vie normale. C’est pour cela qu’il refuse d’utiliser ses pouvoirs magiques, contrairement à sa sœur qui abuse de sortilèges, dès qu’elle en éprouve le besoin.

Grégoire est profondément affecté par la séparation de ses parents. Il vient d’emménager dans un immeuble parisien avec sa mère, un nouveau beau-père un brin arrogant, et sa sœur avec qui il a du mal, désormais, à communiquer. Il ne trouve de réconfort qu’auprès de son amie Itsuki qu’il rejoint, parfois, sur le toit de leur immeuble. En parlant, ou même en restant silencieux, les jeunes gens se comprennent : les parents d’Itsuki se disputant, eux aussi, fréquemment.

Un jour, la jeune fille fait découvrir à son nouvel ami le magnifique jardin de son grand-père japonais, lequel domine une partie de la ville. Grégoire y découvre le carnet de notes du frère d’Itsuki, disparu mystérieusement quelque temps auparavant. Perturbée, Itsuki compulse seule, chez elle, les notes de son frère. Au matin, ses parents affolés signalent sa disparition.

Grégoire se met tout de suite à sa recherche et découvre, en suivant les indices qu’elle a semés, un monde magique en traversant le tronc d’un arbre du jardin du grand-père d’Itsuki. Dans cet univers merveilleux, la magie de Grégoire est bien utile pour se sortir des pièges que lui tendent une flore et une faune exubérantes. Tout finira pour le mieux, Grégoire pourra sécuriser le passage vers ce monde caché de la magie.

Le schéma narratif de Denis-Pierre Filippi est classique et efficace. Comme Harry Potter, son jeune héros magicien vieillit. Devenu adolescent, il n’utilise la magie qu’il a apprise que quand il y est contraint par la découverte d’un univers merveilleux, mais dangereux. Architecte de formation, Silvio Camboni fait preuve de son grand talent, aussi bien pour des décors urbains d’une extrême précision que pour inventer un monde parallèle foisonnant, avec l’aide des couleurs inventives de Gaspard Yvan. Son trait est plus réaliste que pour les six tomes de « Gargouilles » qu’il a dessinés, il accompagne ainsi la maturité du personnage principal.

Cette œuvre ambitieuse pour la jeunesse s’adresse à un large public, les premiers lecteurs de « Gargouilles » retrouveront des héros, qui vieillissent avec eux, dans des récits et un graphisme plus complexes. Les auteurs dépassent la simple BD d’aventures de « fantasy » en développant des thématiques riches, des difficultés de vivre dans une famille recomposée aux affres de la crise d’adolescence et de la naissance du sentiment amoureux à la construction du deuil.

De l’aventure et des émotions véritables dans un récit riche et sensible, voilà des débuts plus que prometteurs pour la suite de « Gargouilles », une série qui avait déjà su rencontrer un large public.