Depuis 2021, chaque année, Tiburce Oger rassemble une belle équipe de dessinateurs et dessinatrices pour évoquer l’Ouest américain à travers des personnages authentiques – le Far West, donc – et l’exploitation de ces territoires par des individus qui oubliaient, bien souvent, qu’ils n’étaient que des colonisateurs assoiffés de richesses…
Lire la suite...« Bambi » T5 par Atsushi Kaneko
Les éditions IMHO viennent de publier l’avant-dernier tome de leur série phare » Bambi « . La cavalcade de l’héroïne sans scrupule touche à sa fin et de nombreux mystères sont éclaircis tout au long des deux cent pages de ce tome. Cette série est décrite par son éditeur comme un » road movie sous amphétamines, violent et sanglant digne des meilleurs films de Tarantino » et il n’a pas tort. Même si son auteur, Atsushi Kaneko est japonais, ses influences sont à chercher au plus profond de la bande dessinée underground américaine. Digne héritier de la période post-punk, il dépeint un univers extrêmement violent et dénué de bon sens.
» Bambi « , c’est une jeune fille plutôt mignonne avec ses cheveux roses et son air angélique. Néanmoins, elle dévoile rapidement des talents de tueuse, hors-pair et sans aucun scrupule. Elle sait repérer ses ennemis, les mettre en joue et tirer sans que cela ne lui laisse un quelconque remords. Le premier volume débute alors que » Bambi » vient de kidnapper Pampi, un jeune garçon un peu stupide pour le compte » des vieux « . Auparavant, il était détenu par » The King » un ersatz d’Elvis complètement détraqué et dont le seul plaisir est de massacrer des filles nues : charmant ! Il mettra à prix la tête de » Bambi » pour la colossale somme de cinq cents millions (de quoi ?). Si la capture du gamin fut aisée, le retour préfigure de l’enfer, jalonné de tueurs à gages de toutes sortes. » Bambi » n’aura d’autre alternative que de massacrer ces poursuivants.
Ce synopsis est valable pour les quatre premiers tomes durant lesquels nous suivons la balade de l’héroïne et assistons aux bains de sang qu’elle trace sans état d’âme. En revanche, le volume cinq offre quelques réponses en nous révélant, enfin, qui sont » Les vieux » et » Pampil » : alors que plein d’autres mystères s’éclaircissent.
L’auteur ne prend pas de gants concernant le langage de ses personnages. Ils sont crus et adaptés à la situation © Atsushi Kaneko -IMHO
La particularité de ce manga, du moins au niveau de l’impression, est de ne pas être en noir et blanc, mais d’utiliser deux couleurs « pantones » pour la reproduction des dessins. Ce volume 5 est en violet et en marron. Les précédents volumes étant également déclinés en « pantone »: tome 1, rouge foncé – tome 2, bleu et rouge – tome 3, vert et rouge – tome 4, noir et argent.
Les couvertures ont également cette particularité colorimétrique qui permet d’éviter les tramages disgracieux et surtout d’avoir des couleurs vives, voire fluo, comme un rose et un jaune dans les volumes 1 et 2. Ou encore des couleurs métalliques comme de l’or pour le volume 3 et de l’argent pour le volume 1. La couverture de ce cinquième volume ferait presque sobre avec ses quatre couleurs : un bleu roi, un rouge écarlate, un jaune fluo et un vert sapin.
On sent que l’éditeur français, IMHO a vraiment respecté le travail de l’auteur afin de sortir des livres de qualité et surtout en gardant l’originalité inhérente à cette œuvre.
Personne n’est épargné, pas même les animaux. Quand une des tueuses détruit un corps à l’acide, les rats en dessous en pâtissent. © Atsushi Kaneko -IMHO
Comme je l’expliquais déjà dans ma chronique sur » Soil « , Atsushi Kaneko, même s’il est japonais, a un dessin américanisé qui prend ses racines dans le style ligne claire d’auteurs underground tels que Charles Burns ( » Black Hole « ) ou Daniel Clowes ( » Ghost world « ). Ce volume cinq est d’ailleurs particulièrement réussi. Le trait est juste, expressif et dynamique, tout ce qu’il faut pour raconter une histoire de violence pure. Pourtant, tout cela est trop « clean » pour que l’on ait de compassion pour les victimes. Le trait est tellement propre qu’il dépeint des situations tragiques en les faisant passer pour des actes banals. Les démembrements sont explicites, les têtes éclatées visuellement réalistes et le sang reste figé dans ce moment de beauté graphique, sans fausse note ni tache mal positionnée. Tout est surréaliste, aussi bien la cruauté des protagonistes que la chance de l’héroïne qui arrive à se sortir des pires situations en gardant son air de lolita.
L’éditeur à choisis de garder le coté visuel des onomatopées originales en rajoutant leur traduction en plus-petit à côté, un bon choix. © Atsushi Kaneko -IMHO
» Bambi » n’est pas un manga pour le fan de mangas. C’est une bande dessinée à cheval entre la culture américaine, asiatique et européenne, surfant sur la vague des films violents et cyniques. Le lecteur ne peut pas s’y tromper et l’amateur du genre y trouvera son compte, même s’il n’est pas attiré par le reste de la production japonaise.
Le sixième et dernier volume de cette série est annoncé pour le mois d’octobre 2011. Nous sauront afin si » Bambi » est réellement invincible ; car la fin de ce volume cinq nous laisse face à un Cliffhanger digne des meilleures séries TV américaines : du grand art !
Gwenaël JACQUET
Le calme avant la tempête ? Toujours avec un langage fleuri et décomplexé. © Atsushi Kaneko -IMHO
» Bambi » T5 par Atsushi Kaneko
Éditions IMHO (12,95)
ISBN : 2-915517-22-3
EAN : 9782915517224