Dix ans après la parution de « Résurrection », la première partie d’un diptyque accouché dans la douleur, voici enfin « Révélations » : conclusion du dernier récit du regretté Philippe Tome, décédé alors qu’il travaillait sur les dernières pages de son scénario. Les éditions Dupuis proposent, enfin, l’intégralité de cette aventure magistralement dessinée par Dan Verlinden, digne successeur de ses deux prédécesseurs : Luc Warnant et Bruno Gazzotti.
Lire la suite...« Ad Astra » T1 par Mihachi Kagano
Le péplum était un genre tombé en désuétude depuis la fin du siècle dernier. Pourtant, en bande dessinée, Rome et ses conquêtes deviennent des sujets très tendance. On compte de plus en plus de titres s’inspirant de cette époque ou la suprématie romaine n’était plus à démontrer : « Thermae Romae » et « Eurêka » en manga, « Vae Victis », « Murena », « Les Aigles de Rome »… pour la partie franco-belge. Pourtant, cette suprématie militaire va être mise à mal par un seul homme. Un tacticien hors pair : Hannibal ! Voici son histoire romancée vue par un œil japonais.
En 241 avant Jésus Christ, les troupes carthaginoises menées par Hamilcar Barca doivent se rendre face à la supériorité de l’armée romaine. Hannibal Barca à six ans lorsque cette reddition se déroule sous ses yeux. Fils spirituel du dieu Baal, il est impétueux et s’avérera un excellent tacticien. Il est prêt à mener des troupes de tous horizons afin de venger cette humiliation et marcher sur Rome. Sa haine de l’empire va l’amener à croiser sur son chemin Scipion l’Africain : un génie militaire qui arrive à comprendre et anticiper ses tactiques. Le destin des deux hommes est lié, l’un voulant conserver la grandeur de Rome, l’autre souhaitant sa déchéance.
Ce premier tome débute par la naissance d’Hannibal. Voué à être sacrifié aux dieux Ball alors qu’il n’a que quelques jours, il n’aura la vie sauve que grâce aux quelques mots qui sortent de sa bouche. Chose totalement impossible, il vient de naître, et, à cet âge-là, un bébé ne s’exprime que par des pleurs. Du coup, Hamilcar, son père, voit dans cet événement la marque divine de Baal. C’est pourquoi il va lui donner le nom de Hannibal Barca. Hannibal voulant simplement dire : qui a la faveur de Baal et Barca représentant la foudre. Un nom qui lui sied à merveille.
S’en suit la présentation de son futur ennemi : Scipion l’Africain. Lors d’un simple tournoi de dés, il nous démontre qu’il sait se jouer de son adversaire en usant d’un stratagème qui lui permet d’arriver à ses fins et gagner la partie à coup sûr. Encore jeune, il n’est pas encore le chef de guerre qui fera tomber Hannibal. Néanmoins, l’histoire est maintenant centrée sur ce soldat, fils de notable romain. Alors qu’Hannibal s’apprête à traverser les Alpes à dos d’éléphant, ils vont se trouver pour la première fois face à face. C’est à ce moment-là que les capacités d’anticipation et le génie militaire de Scipion vont s’affirmer. Dès cet instant, l’histoire de l’un ne pourra plus s’écrire sans évoquer l’autre.
Bien évidemment cette aventure est basée sur des faits historiques. Mais Mihachi Kagano n’hésite pas à avouer qu’il a pris quelques libertés narratives entre deux faits avérés. L’histoire avec un grand H est pourtant bien là. L’avancée chronologique des faits est scrupuleusement respectée. Du coup, ce manga est recommandé par la chaîne Historia, à la fois un coup de pub et un gage de sérieux reconnu grâce a l’autocollant apposé sur ce livre. Heureusement, celui-ci s’enlève facilement, car justement la couverture est superbe. Un dessin très réaliste, dans les tons chaud composés de brun et d’ocre. Son papier, texturé, est très agréable au touché. Un choix judicieux qui symbolise parfaitement un vieux papier à vocation d’archivage d’une œuvre majeure.
Il est amusant de voir comment les Gaulois sont ici traités avec justesse. Les détails de vêtements pas si loin de ceux présents dans « Astérix et Obélix » et le caractère fougueux de nos ancêtres est bien cerné. Il est intéressant de voir que, même à l’autre bout de la terre, un japonais trouve une manière juste et réaliste de les présenter. Ce qui prouve qu’une bonne documentation a été réalisée en amont de la conception de l’histoire.
« AD Astra» est le premier manga de Mihachi Kagano. Le dessin, réaliste, à une dynamique à même de rendre crédible les affrontements auquels l’armée romaine ou carthaginoise sont confrontées. Il y a bien sûr quelques maladresses de jeunesse, mais on les voit s’estomper au fur et à mesure que le récit progresse. Pour une première œuvre, c’est extrêmement prometteur.
Ce manga offre de nouvelles perspectives pour son éditeur (Ki-oon), puisque c’est la première fois qu’ils éditent une série prépubliée dans le magazine Ultra Jump (1) du prestigieux éditeur Shueisha. Avoir réussi à décrocher un tel contrat est un vrai gage de reconnaissance de la part des Japonais pour cette équipe de passionnés français ne faisant pas parti d’un grand groupe d’édition. Du coup, aux yeux de cette éditrice japonais, ki-oon est en bonne place pour devenir un vrai outsider de l’édition de manga dans l’hexagone. Peut-être arriveront-ils, un jour, à concurrencer les Glénat, Kana et autres Pika.
Trois tomes sont aujourd’hui disponibles au Japon et ils sont tous annoncés en France. Voilà un titre historique où s’enchaînent batailles, pillages, complots et stratégies guerrières. Un remarquable témoignage sur la bravoure de ces hommes prêts à défendre leurs idéaux et leur liberté dans cette période confuse où Rome entendait régner en maître absolu sur ce que les politiciens considéraient comme des barbares.
Gwenaël JACQUET
« Ad Astra » T1 par Mihachi Kagano
Éditions Ki-oon (7,90 €) – ISBN : 978-2-35592-652-5
(1) Ultra Jump est un magazine seinen (pour jeunes adultes) qui publie des séries tel que « Gunnm Last Order » ou « Jojo’s Bizarre Adventure »
AD ASTRA PUBLIUS CORNELIUS SCIPIO AFRICANUS MAJOR & HANNIBAL BARCA © 2011 by Mihachi Kagano / SHUEISHA Inc.
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