Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...Hergé, un musée de papier
Très volumineux ouvrage de 480 pages (au format de 21 x 21 cm), le « Musée Hergé » constitue une belle somme iconographique pour tout amateur de l’œuvre – à la fois culte, historique et patrimoniale – du fameux créateur de Tintin, dont le profil en orne d’ailleurs la couverture. Comme l’indique la préface de Fanny Rodwell, ce beau livre constitue aussi un véritable « musée de papier » faisant écho au véritable musée Hergé, inauguré en juin 2009 à Louvain-la-Neuve, en Région wallonne : en sept chapitres, il en restitue le parcours saisissant d’une vie dédiée au 9e art, et amorce du même coup les immanquables célébrations tintinophiles liées en 2014 aux 85 ans du célèbre « reporter du siècle ».
Une fois passé le handicap technique consistant à compulser les pages sans les endommager (la tranche, ornée d’un damier rouge et blanc, est partiellement encollée par l’encre rouge…), le lecteur s’aventure donc pas à pas dans le musée en lui-même, sujet du 1er chapitre. S‘ensuivront, sur le modèle des sept tomes signés par Philippe Goddin et composant la désormais célèbre suite « Hergé, chronologie d’une Å“uvre » (éd. Moulinsart, 2000 à 2011), des chapitres divers, consacrés aux débuts de Georges Rémi, au surgissement d’une famille de papier légendaire (Milou, Haddock, etc.), aux sources d’inspiration, aux voyages ou encore à la gloire d’Hergé. Le livre sera bien sûr d’un intérêt limité pour tous ceux qui possèdent déjà sur leurs rayonnages tout ou partie des quelques trois cents ouvrages consacrés à Hergé, Tintin et leurs mythologies respectives ; citons notamment les récents dossiers publiés de 2010 à 2013 par les éditions Atlas sous le titre « Tintin, les archives » (comprenant pour chaque aventure pas moins de 64 pages documentaires !), ou encore, dans un registre assez similaire, le catalogue de plus de 1 000 pages lié à l’exposition organisée au Centre Pompidou entre décembre 2006 et février 2007 (commémorative du centenaire de la naissance d’Hergé).
Mais cet ouvrage demeure aussi un formidable moyen de se replonger dans un univers à la fois délimité et devenu intemporel : au-delà des textes précis de Michel Daubert, entre esquisse au crayon et composition d’une planche encrée, de dessin publicitaire en bleu de coloriage, et du livre au cinéma, le « Musée Hergé » déroule une reconstitution impressionnante, au sens littéral du mot. Du haut d’une pyramide de 230 millions d’exemplaires vendus à travers le monde, Hergé nous contemple et nous fascine… et ce n’est pas fini !
Ceci dans le mesure où, comme nous l’annoncions en introduction de cet article, 2014 sera un moyen judicieux de relancer les publications ou les hommages, 85 ans après les débuts hésitants de « Tintin au Pays des Soviets » dans Le Petit Vingtième, le 10 janvier 1929. Sont ainsi d’ores et déjà annoncés, suite au rapprochement entre l’éditeur Casterman (lié au groupe Flammarion/Gallimard) et l’entreprise Moulinsart (gérante des droits d’Hergé) plusieurs ouvrages : le 15 février 2014 paraîtra « Les Trésors de Tintin » par Dominique Maricq, qui retracera sur une centaine de pages la genèse des aventures de Tintin, l’ensemble étant accompagné par 22 documents facsimilés rares (dont une réplique du Petit Vingtième de 1929). Cet ouvrage n’est pour l’instant disponible (depuis début octobre 2013) en exclusivité que dans les enseignes France-Loisirs.
Autre livre annoncé récemment pour mars 2014 (mais sans doute repoussé dans sa parution), « Les Secrets du Cigare du Pharaon », dixit l’éditeur, racontera pour sa part en images la refonte par les Studios Hergé de l’aventure parue en noir et blanc en 1934 pour créer l’album en couleur que nous connaissons aujourd’hui. S’ensuivront aux premier et dernier semestres 2014 deux autres albums identiques par Philippe Goddin, consacrés aux « Mystères des Boules de cristal » et au « Secrets du Temple du Soleil » : soit un préalable habile au deuxième film d’animation (sur les trois prévus) coréalisé par Steven Spielberg et Peter Jackson (sortie programmée pour Noël 2015).
À l’heure où Moulinsart annonce encore fièrement la vente annuelle d’un million d’albums en français, ceci alors que la série n’est pas enrichie (Hergé ayant décidé que son personnage ne lui survivrait pas), l’administrateur Nick Rodwell (cogérant avec Fanny Rodwell de l’héritage hergéen) a déclaré qu’il y aurait bel et bien « une nouveauté en 2052, pour protéger les droits », ceci afin d’éviter que Tintin ne bascule dans le domaine public. Les réalités du monde de la bande dessinée actuelles, dominées par les reprises à succès de Spirou, Blake et Mortimer, Alix ou Astérix, permettront-elles de tenir ces lointaines frontières ? Un nouvel album, la finalisation officielle de l’inachevé « Alph-Art » ou un montage réalisé à partir d’inédits d’Hergé ? Une histoire confiée à d’autres auteurs ? Un roman ? Seul le – riche – avenir nous le dira… Mais c’est aussi cela que de rentrer dans le « Musée Hergé ».
Philippe TOMBLAINE
« Musée Hergé » sous la direction de Brigitte Govignon et de Didier Platteau. Textes de Michel Daubert.
Éditions Moulinsart et Éditions de la Martinière (39, 00 €) – ISBN : 978-2-7324-5707-9
Le livre « Les secrets du cigare du pharaon » aux éditions Moulinsart annoncé pour mars 2014 est-il sorti ?
Non, ce titre n’est pas ou pas encore sorti.
Et, depuis, Casterman, Moulinsart, Casterman/Moulinsart et Moulinsart/Casterman ont plutôt mis la pédale douce sur ce type d’ouvrage pas assez grand public (formule pieuse pour : générant un moindre revenu…)
C’est bien triste! si le contenu rédactionnel est intéresant!
Pour ma part je désespère de voir un jour édité les strips N et B commentés de l’Etoile mystérieuse.
Ce serait une excellente occasion de revenir sur les quelques dessins explicitement antisémites pour les remettre dans le contexte de l’époque (expliquer bien sûr, pas justifier).
Mais je doute que Moulinsart prenne ce risque…