Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
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Les éditions Mosquito viennent de créer une collection jeunesse coquettement appelée « Lily Mosquito », dont le premier album sorti marque aussi le retour du grand Marc Wasterlain. : ils en ont, de la chance, ces gosses !!!
LES PIXELS tome 1 : LES PIXELS CHASSEURS DE MONSTRES (Lily Mosquito)
Ça fait toujours un bien fou, de voir un nouvel album de Wasterlain fleurir chez le libraire… Une floraison bien trop rare à notre goût ! Car Marc Wasterlain fait partie de ces figures aussi emblématiques que discrètes qui ont su faire évoluer l’« école de Marcinelle » après l’âge d’or des premiers grands maîtres (que Franquin me pardonne cette éloge même indirecte), à l’instar de Walthéry, par exemple, réussissant à allier classique et modernité avec un talent fou, jalons solides et providentiels pour la continuité et la nature de la bande dessinée belge. Des racines ils ont fait des branches… Et puis il y a ce trait inimitable et si particulier de Wasterlain, un trait proprement fascinant dans le visage même de l’encre tracée, sorte de « rondeur anguleuse », mais aussi dans cette association sublime de traits gras et minces qui font que – à moins de regarder les yeux fermés –, on ne peut oublier la rencontre visuelle avec un dessin de ce merveilleux dessinateur.
Wasterlain, c’est l’humour, la tendresse, l’aventure, la poésie, et un certain regard sur le monde que l’on sent envieux de plus de douceur… Que ce soit dans Mr Bonhomme, Docteur Poche ou Jeannette Pointu, l’humanisme, le sourire et le léger désespoir de Wasterlain transparaissent à chaque planche. L’humour y est délicieux et omniprésent, et l’émotion a droit de citer. Wasterlain fait des albums pour les grands enfants et les petits adultes, décomplexant les adultes face à leur besoin de poésie et de légèreté, et interloquant les enfants par un ton résolument… chouette ! qui ne les prend pas pour des idiots, les aidant plutôt à assumer leurs valeurs les plus naturelles. Néanmoins, on ne peut pas ignorer le goût très prononcé de Wasterlain à s’adresser aux jeunes lectrices et lecteurs : au-delà de l’universel Docteur Poche, on peut citer Ratapoil, Bob Moon et Titania, Les Aventures de Gil et Georges, par exemple… On supposera donc que ce fut avec un plaisir non dissimulé que Wasterlain envisagea de créer une nouvelle série pour enfants (en lisant et regardant son album, le plaisir est palpable !).
Avec cette série, Wasterlain continue son rôle de passeur. C’est une drôle d’Å“uvre, que ces Pixels. Tout est dit dans le nom de nos héros : la sémantique est résolument actuelle et connotée informatique (jusqu’au chat prénommé Arobase : trop mignon, ce minou !) et le contexte (héros sympatoches, groupe musical, fast food, ordinateur) parlera furieusement au jeune lectorat. Mais – et c’est là où ça devient intéressant – Wasterlain immerge tous ces éléments dans une structure très classique, presque archétypale du récit d’aventure. Tout est là . Le coup du sort et l’aventure, le mythe des grands espaces, les dangers exotiques, l’animal de compagnie fétiche, les méchants, la mascotte, la fantaisie, les coups de théâtre, les pièges et la victoire des héros, car il y a les héros, bien sûr ! Là aussi, Wasterlain a trouvé un équilibre parfait entre les deux copains et la fille, sous-entendant un possible mélo : Arno (le petit rouquin impétueux), Kevin (le gentil skate-boarder) et Zebra (la jolie blonde pétillante). Cela donne à l’ensemble une grande solidité qui perpétue pour les plus jeunes l’art du récit d’aventure, et qui s’avère un très bel hommage aux grands classiques pour les plus anciens… Pygmées, monstres et un certain docteur Rolling Stone viendront agrémenter l’histoire de quelques frissons bienvenus. La lecture d’un ouvrage de Wasterlain est toujours délicieuse, et non « doucereuse ». Et l’on y croise toujours des inventions poétiques et drôles, comme ici ces incroyables chenilles géantes à poils blancs et au langage plus que réjouissant : « Youpiilouppii, Doubiiloubii, Biloup Biloup ! »
Alors : les djeun’s, n’oubliez pas de prêter votre album des Pixels à vos parents, et les parents, attendez que vos enfants soient à l’école pour lire l’album derrière leur dos. Quant au chat… il le lira bien assez tôt, quand il le voudra, ne vous en faites pas !
Cecil McKinley
Je vous remercie pour avoir écris un si bel article sur mes petits personnages de papier. C’est à la demande de Cortégienni ( rédacteur de « feu » Pif-Gadget, qu’ils ont vu le jour et c’est
Mosquito qui leur permetra d’exister en album. Un deuxième suivra: LES PIXELS ET LES ROBOTS, qui reprendra les récits complets ,sur ce thème, parus dans Pif………………..
Avec toute ma sympathie : MARC WASTERLAIN
Bonjour, cher Marc. Merci pour votre petit mot qui me ravit, et de ces précisions éditoriales sur les Pixels que je n’ai pas mentionnées puisque Gilles Ratier les a magistralement écrites dans son article sur vous. Sachez qu’il n’y a pas une syllabe de mon article que je ne pense pas foncièrement: quelle merveille, votre dessin, votre univers! En attendant de vous lire et de vous relire, veuillez donc accepter mes salutations les plus doubiiloubiis.