« Parapal » T1 par Takumi Ishida

Les mangas publiés par Akata ont la réputation de traiter en profondeur des sujets de société contemporains. Leur nouveau titre « Parapal » n’échappe pas à la règle. Ce manga est là pour nous faire réfléchir au regard que nous portons sur les autres et vice-et-versa. Voilà un manga qui, même s’il s’adresse à un jeune public, fait vraiment appel à notre intelligence.

Komaki, l’héroïne de cette histoire se réveille un matin en pouvant décrire avec précision le menu du petit déjeuner, juste en l’ayant senti à travers toute la maison. Elle est elle-même étonnée par cette capacité qui lui est nouvelle. L’explication est pourtant simple, si l’on peut dire :  un extra-terrestre a élu domicile dans sa tête. Eh oui, sous ses airs de shojo classique, « Parapal », offre un récit de science-fiction ou des êtres venus d’ailleurs auraient besoin d’hôtes humains pour s’implanter et survirent. C’est donc ce «parasite» qui a décuplé les capacités olfactives de Komaki. Si cela s’avère agréable pour deviner le menu, il en est tout autre quand elle découvre l’odeur corporelle de ses camarades de classe. Surtout lorsqu’ils sont en contact avec une personne de sexe opposés et qu’une effluve d’hormone se dégage d’eux. Komaki prend brusquement conscience du monde dans lesquel elle vit et de la réalité du comportement des humains qui le compose. Avant d’avoir ce «pouvoir», elle n’avait pas conscience de cet état d’excitation quasi permanent chez les jeunes de son âge. Du coup, elle est horrifiée par l’image qu’elle peut véhiculer, sent-elle aussi fortement elle-même ? Est-elle également en rut dès qu’un mâle lui parle ? Pourquoi les humains sécrètent-ils une odeur aussi forte ? Autant de questions qui ramènent aux changements corporels liés à l’adolescence.

Ce qui frappe ici, c’est la manière novatrice que l’auteur(e), Takumi Ishida, a choisi pour parler des comportements des adolescents. Si pour Komaki, c’est l’odorat qui s’est soudainement amplifié, pour Tsurumi, un autre élève de son école, c’est l’ouïe qui est touchée. À chaque fois, c’est à cause d’un parasite extra-terrestre. Comme celui-ci ne se déclare pas toujours auprès de son hôte, ce jeune garçon ne sait pas vraiment pourquoi il entend si bien chaque murmure et autre bruit vers lequel son attention se focalise. Et si ces deux-là sont contaminés, d’autres le sont peut-être également ? Comment savoir, comment faire confiance à leurs camarades ?

Bien évidemment, ce pouvoir a aussi ses inconvénients. Notamment, il est plus facile de découvrir quand une tierce personne ment, elle secrète une odeur d’anxiété caractéristique qui trahit son comportement. Et dans certaines situations, Konami aurait bien aimé ne pas savoir que son petit ami l’avait trompée avec une camarade de classe. Elle n’aurait pas rompu avec lui et sa vie aurait été plus simple.

Du coup, chaque personne devient suspecte. Entre l’une qui sent constamment des odeurs nouvelles et l’autre qui entend des grésillements étranges émanant des personnes proches, c’est tout un monde à découvrir et surtout à comprendre. Ils sont encore plus interloqués lorsque l’un des professeurs, censé représenter l’autorité, aurait un comportement contraire aux bonnes mÅ“urs. À tel point qu’il n’hésitera pas à donner en pâture, à ses amis, une jeune fille qui en pince pour lui, sous prétexte que c’est une nana facile. Or, elle-même ne comprend pas ce besoin de coucher avec de nombreux hommes. Mais de là à participer à une séance de viol organisée, il y a un pas qu’elle n’est pas prête à franchir.

Ce premier volume ne fait que positionner l’histoire. On sent que, vers la fin, l’auteur(e) nous amène vers quelque chose de plus complexe. Il y a forcément une explication derrière ce parasitage. Certains comportements étranges ont forcément une explication, qu’elle soit surnaturelle ou non. Il faudra attendre les autres tomes pour en savoir un peu plus.

Outre le caractère insolite de l’histoire, le dessin de Takumi Ishida est également légèrement plus moderne que ce qui se fait traditionnellement en shojo. On est loin des planches larmoyantes remplies d’effets, de fleurs, et autres stéréotypes féminins. Le trait est vif et spontané. À la fois dépouillé, avec cette omniprésence du blanc, et très détaillé dans les costumes, les attitudes et les expressions des protagonistes. C’est particulièrement agréable à regarder et chaque personnage est parfaitement reconnaissable. Les coupes de cheveux sont actuelles, les vêtements simples, mais représentatifs de celui qui les porte.

Tout ça se retrouve dans la couverture. Un buste aux couleurs pastel sur un fond moderne, mais rappelant également le psychédélisme des années 1970. La pose est simple, le visage de profil avec une main gauche levée qui semble dire stop au gavage que cette jeune fille endure. En lisant le livre, on comprend que c’est à la fois une métaphore olfactive et sexuelle. Cette couverture est toute en subtilité, tout comme ce manga.

Tout le monde ne réagira pas de la même manière face à cette histoire un peu déstabilisante. Les allusions érotiques pourraient éventuellement choquer certaines âmes sensibles, c’est pourtant la réalité crue à laquelle sont confrontés les adolescents d’aujourd’hui qui est exprimée en mot et en images. Une belle manière de se questionner sur ses propres actions et leurs répercussions dans la vie de tous les jours. Encore une fois, un très bon choix de titre de la part d’Akata.

Gwenaël JACQUET

« Parapal » T1 par Takumi Ishida
Éditions Delcourt (6,90 €) – ISBN : 2756028789

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