Depuis 2021, chaque année, Tiburce Oger rassemble une belle équipe de dessinateurs et dessinatrices pour évoquer l’Ouest américain à travers des personnages authentiques – le Far West, donc – et l’exploitation de ces territoires par des individus qui oubliaient, bien souvent, qu’ils n’étaient que des colonisateurs assoiffés de richesses…
Lire la suite...« Exil » par Jean-Marie Minguez et Henri Fabuel, Prix Mélouah-Moliterni 2013 du Festival BD d’Aubenas
Francisco Parilla Almenara est espagnol, mais vit en France, à Perpignan. En cette période de Noël, la neige qui tombe le replonge dans les souvenirs douloureux de l’année 1936 quand, chassé par le putsch des nationalistes, il avait dû quitter précipitamment son village d’Andalousie ainsi que femme et enfants. Il va s’ensuivre une longue errance sur les routes d’Espagne, marquée par la peur, les rencontres, l’espoir et les désillusions. Pour ceux qui rêvaient d’une République juste et solidaire, le rêve s’est terminé tristement dans un poste frontière des Pyrénées, où les autorités françaises les traitèrent comme des prisonniers…
C’est un phénomène éditorial curieux : l’année 2013 aura vu un nombre impressionnant de bandes dessinées, toutes de fort belle facture d’ailleurs, mettant en scène la guerre civile espagnole : « Espana la vida » par Eddy Vaccaro et Maximilien Le Roy chez Casterman, les deux tomes du « Convoi » par Eduard Torrents et Denis Lapière chez Dupuis (voir notre rubrique « BD Voyages ») ou encore « Les Temps mauvais » par Carlos Giménez (notre « BD de la semaine », au début du mois). Cela correspond, peut-être, à un besoin urgent de retour aux sources et de consolidation de nos racines : une démarche plutôt rassurante en ces temps déroutants de crise. En tout cas, pour le dessinateur Jean-Marie Minguez (« Le Grimoire de féerie » chez Soleil ou « Carabosse » au Lombard) et pour le scénariste Henri Fabuel (« Les Caméléons » chez Casterman et « H. H. Holmes » chez Glénat), qui sont tous les deux d’origine espagnole, c’est bien une façon de rendre hommage à ces hommes et femmes qui ont voulu fuir l’horreur de la guerre et qui ont vécu un nouveau calvaire sur les routes de l’exil.
Quoi qu’il en soit, c’est une réussite de plus : cette histoire émouvante, mais pas trop mélodramatique, est menée avec efficacité et est rythmée par des dialogues bien ciselés dus à Henri Fabuel, tandis que le dessin, en noir, blanc et lavis, met bien en valeur le trait agréable (et complètement en adéquation avec le sujet) de Jean-Marie Minguez.
Notons, toutefois, que c’est ce dernier qui est à l’origine du projet puisqu’il avoue, dans la préface du livre, que c’est grâce à une question anodine posée à sa grand-mère en fin de repas (« Mais comment se fait-il que vous soyez venus en France ») qu’il a été sensibilisé à l’histoire des quelque cinq cent mille républicains espagnols de la Retirada. Sa rencontre avec un scénariste avec qui il a aussi des liens communs (ses grands-parents ayant vécu la même époque et les mêmes événements) ayant fait le reste : travailler ensemble leur est, alors, apparu comme une évidence…
« Exil » par Jean-Marie Minguez et Henri Fabuel
Éditions Vents d’Ouest (22,50 €) – ISBN : 978-7493-0471-7
Le 7e Carrefour Européen du 9e art et de l’image d’Aubenas, qui s’est déroulé cette année du 24 au 26 mai, a donc décerné le prix Mélouah – Moliterni à « Exil » de Jean-Marie Minguez et Henri Fabuel. Depuis 2008, ce prix distingue une bande dessinée ou un auteur ayant œuvré pour les droits de l’homme.
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