Dans le cinquième volume de ses aventures, « Le Grimoire d’Elfie T5 : Les Reflets de Walpurgis », la jeune Elfie découvre le marais poitevin (entre La Rochelle et Niort) et des festivités réservées aux magiciens et sorcières depuis le temps de la mystérieuse fée Mélusine. Une nouvelle enquête pour la jeune adolescente, avec l’apport non négligeable de son grimoire magique, à l’issue de laquelle elle en aura appris beaucoup sur les dangers contemporains qui guettent cette zone humide remarquable et sa propre famille.
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Notre sélection de bandes dessinées de la semaine? : ? Malgré nous T.1 : Elsa? ? par Marie Terray et Thierry Gloris, ? La Guitare de Bo Diddley ? par Jean-Christophe Chauzy [d'après Marc Villard], et aussi ? Coucou tristesse ! ? par Baron Brumaire et Sergio Salma.
- ? Malgré nous T.1 : Elsa? ? par Marie Terray et Thierry Gloris – Éditions Quadrants (10,50 Euros)
On savait déjà que Thierry Gloris était un habile conteur, capable de nous captiver avec des récits mêlant la grande Histoire et le fantastique (« Le Codex Angélique », « Saint-Germain », « Souvenirs d’un elficologue », « Missi Dominici »…), mais on l’attendait quand-même au tournant sur des histoires beaucoup plus réalistes et émotionnelles. Ceci dit, à la lecture du premier tome de ce beau portrait d’un jeune Alsacien enrôlé, malgré lui, dans la Waffen SS pendant la Seconde Guerre mondiale, il semble que l’on peut avancer, sans conteste, que c’est vraiment un grand scénariste de bandes dessinées ! Aussi à l’aise pour évoquer les croix gammées que les monstres irréels, ce jeune Franc-comtois, dont la principale source d’inspiration demeure la littérature du XIXe siècle, contribue ici à lever le voile, sans aucun manichéisme, sur une dure réalité historique encore trop méconnue. En 1941, la région Alsace-Lorraine est passée sous la coupe de l’Allemagne nazie : Louis Fisher, un jeune étudiant strasbourgeois dont le père a perdu son bras droit à la grande Guerre et dont le frère aîné est tombé au front, est un francophile épris de liberté. Il brave le couvre-feu pour aller retrouver en cachette son amoureuse, avant que cette dernière ne coupe les ponts avec lui car elle est promise à un meilleur parti… Pendant ce temps-là, sa sœur, elle, sort avec un soldat allemand… Cette saga familiale romantique, pleine d’émotion et de subtilité, symbolise tous les tiraillements entre la France et l’Allemagne qu’ont dû subir ces Alsaciens obligés de faire des choix existentiels, et ceci depuis 1870. Enfin, ce récit de guerre, aussi intelligent que poignant et qui participe à ce devoir de mémoire que nous devrions tous avoir, est sensiblement illustré par le trait élégant et la palette de chaudes couleurs directes de Marie Terray, dont c’est le premier album : chapeau à elle aussi !
- ? La Guitare de Bo Diddley ? par Jean-Christophe Chauzy d’après Marc Villard – Éditions Casterman (17 Euros)
Le procédé (un objet qui passe de mains en mains et qui est prétexte à une suite de portraits) n’est pas nouveau ; mais ici, il permet à l’écrivain de polars Marc Villard de nous brosser une plaisante galerie de loosers et de camés de Paris et de sa banlieue, au travers des sex-shops, des tours des cités, des terrains vagues et des carcasses de bagnoles. Adaptée de sa nouvelle (qui donne d’ailleurs le titre du livre paru chez Rivages en 2003), cette savoureuse bande dessinée nous permet de suivre la trace de la mythique guitare Blue Hawaï n°1 qui a appartenu à Bo Diddley, au gré des deals et des meurtres, des putes et des paumés, des sans-papiers et des éducateurs de quartier…, provoquant inévitablement un enchaînement de fatalités. Un voyou subtilise donc cette guitare rectangulaire de couleur bleu caraïbe, en forçant la portière d’une voiture, mais il ne sait pas que l’instrument a une histoire. Il l’apprendra d’un Congolais, lui-même musicien. Ce dernier l’emprunte pour pouvoir se produire dans un club, mais il la fourgue à un dealer, en échange de faux papiers. Le trafiquant ne la gardera pas longtemps en sa possession car il se la fait piquer par un chauffeur de taxi ! Quel que soit son propriétaire, cette guitare ensorcelée semble porter clairement la poisse… Vous avez compris le système, chaque chapitre introduit un nouveau personnage et son entourage, un nouveau quartier de Paris, une nouvelle ambiance, le tout au rythme des riffs de cette guitare qui, à peine livrée au célèbre musicien, avait été renvoyée au fabricant car la couleur ne lui plaisait plus. Ce récit dynamique est sublimement mis en images par le trait expressif et les couleurs nuancées de Jean-Christophe Chauzy. Ce dernier semble, d’ailleurs, se complaire dans l’adaptation en bandes dessinées de romans noirs contemporains dus à des auteurs de polars français qui contribuent, eux-mêmes, au scénario de cette nouvelle version de leurs écrits. En effet, après sa collaboration réussie avec Thierry Jonquet, le dessinateur de « Petite nature » ou de « La Vie de ma mère » avait déjà proposé une autre nouvelle de Marc Villard : « Rouge est ma couleur », publiée chez le même éditeur, en 2005. Bref, « La Guitare de Bo Diddley » est donc un bon point supplémentaire pour la collection « Rivages/Casterman/Noir » (dirigée par François Guérif et Matz), laquelle vient également de publier un très intéressant (quoiqu’un peu court) « Coronado » de Jacques de Loustal, d’après la nouvelle de Dennis Lehane.
- ? Coucou tristesse ! ? par Baron Brumaire et Sergio Salma – Éditions Drugstore (13,90 Euros)
En faisant allusion au titre du célèbre roman de Françoise Sagan (« Bonjour tristesse »), ces pages de gags complètement muettes mettent en images des scènes ordinaires (ou, à l’inverse, complètement improbables), confrontées à des situations sordides et caricaturales ; et se moquent gentiment du malheur des autres. Ces histoires, qui mêlent donc talentueusement le rire aux larmes, permettent surtout, aux auteurs, de jouer sur différents tableaux et, finalement, de nous faire réfléchir sur le sens de la vie… Lointain héritier de Jijé, Baron Brumaire a délaissé ici le style réaliste qu’il avait utilisé sur la passionnante saga familiale des « Morin-Lourdel » (un scénario beaucoup plus conventionnel du regretté Raymond Maric, chez Glénat) pour un trait encore plus jeté et surtout plus humoristique, assez proche de celui de Sempé ; mais aussi de celui du scénariste Sergio Salma lorsqu’il dessine sa petite « Nathalie ». Quoi qu’il en soit, l’humour à la fois tendre et sarcastique, ainsi que le sens critique de ce dernier (qui fait mouche à chaque coup), est subtilement mis en cases et devrait ravir nombre d’amateurs de chroniques douces-amères. Après, le meilleur moyen d’apprécier ces gags est peut-être aussi de les lire dans les pages du mensuel L’Écho des Savanes (qui appartient désormais aux éditions Glénat et qui fournit une grande partie du catalogue du label Drugstore), tout comme son autre série (« Bagdad KO ») dessinée par Marco Paulo qui vient, elle-aussi, d’être compilée en album. Ils y semblent, en effet, encore plus percutants, retrouvant ainsi, au sein de ce périodique, leur utilité première !
Gilles RATIER