« Europe-Japon : regards croisés en bandes dessinées » par Paul Herman aux éditions Glénat

Puisqu’elle était perdue au fond d’un hall et coincée entre la buvette et les toilettes, certains ont peut-être eu du mal à trouver la remarquable exposition « Europe-Japon : regards croisés en bandes dessinées », due à Paul Herman (entre autres éditeur chez Glénat de mangas destinés au marché néerlandophone), au dernier Salon du Livre de Paris ! Espérons que nous pourrons la revoir dans d’autres lieux plus adaptés, où elle sera mieux mise en valeur?

En attendant, les amateurs se jetteront sur le très beau livre souple et de grand format, avec 240 pages toutes en couleurs, sur lequel ce passionné du 9ème art (qui sait aussi s’ouvrir à d’autres genres comme le prouve la vingtaine de livres Épopée et mythes du western dans la bande dessinée » qui fait encore référence aujourd’hui, alors qu’il est paru en 1982 !’>Les éditions Glénat seraient d’ailleurs bien inspirées de rééditer (et de réactualiser) son « Épopée et mythes du western dans la bande dessinée » qui fait encore référence aujourd’hui, alors qu’il est paru en 1982 !] qu’il a pu consacrer à la bande dessinée, mais aussi aux jouets anciens ou aux dessinateurs de la fin du XIXème siècle) s’est basé pour ce gigantesque travail, lequel réunit et met en perspectives plusieurs centaines d’illustrations.

Cet ouvrage, qui se présente en deux parties bien distinctes que l’on peut lire dans les deux sens (les textes étant bilingues, c’est-à-dire français-japonais) en commençant soit par le début, soit par la fin, est une invitation au voyage, à la tolérance et à la richesse des autres mondes : Paul Herman visant ainsi à nous démontrer combien les cultures japonaises et européennes se sont nourries l’une de l’autre en matière de narration graphique, en insistant bien entendu sur la bande dessinée franco-belge ] et le manga.

C’est ainsi que, côté pile, nous pouvons admirer comment les dessinateurs européens ont représenté l’Empire du Soleil levant, du Moyen-Âge nippon à nos jours : de Hergé, Auguste Liquois, Victor Hubinon, Edgar P. Jacobs, Willy Vandersteen, Jijé, Will, Pierre Dupuis, Félix Molinari, Robert Gigi, Jo-Ël Azara, Roger Leloup, Dimitri ou Jean-Claude Fournier, à Philippe Adamov, Marc Michetz, Frank, Olivier Neuray, Philippe Berthet, Jung, Thierry Gioux, Hub, Frédéric Genêt, Hugues Micol, Benjamin Lacombe, Djief, José Luis Munuera ou encore Frédéric Boilet, Joann Sfar et Aurélia Aurita, la plupart des auteurs récents étant sous la nette influence des mangas.

Ceci précédé d’un chapitre où l’auteur a eu bien soin de nous démontrer, preuve à l’appui, comment ces auteurs se sont inspirés des récits de voyage au XIXe siècle et de leurs illustrations, grâce à de magnifiques reproductions des couvertures du Petit Parisien, du Soir Illustré, du Petit Journal, des Belles Images, du Rire et des imageries d’Épinal, entre autres.

Dans la deuxième partie, côté face, qui, si on la lit de façon occidentale commence par la représentation actuelle des Européens dans les mangas contemporains et remonte le temps jusqu’aux estampes japonaises et aux premiers dessins humoristiques nippons, Paul Herman ne se contente pas de nous montrer des extraits de séries déjà traduites pour le public francophone, dénichant quelques pépites inconnues qui ont tenté de jeter des ponts graphiques entre Orient et Occident. Angélique marquise des anges » adaptée par Toshie Kihara !!!’>Ainsi découvre-t-on l’existence d’« Arabesque » de Ryoko Yamagishi, « The Sons of Eve » de Yasuko Aoike, « Maia » de Kyoko Ariyoshi, « Kaze no Kasuba » de Masumi Kawasou…, et même d’« Angélique marquise des anges » adaptée par Toshie Kihara !!!]
Faisant tomber les clichés de l’intérieur et secouant les stéréotypes de l’illustration, ce livre indispensable à tout véritable amateur du 9ème art tente de décloisonner les différents publics de la bande dessinée et, comme l’éditeur et l’auteur s’en sont manifestement donné les moyens, il n’y a aucune raison pour qu’il ne parvienne pas aisément à ses fins !

Gilles RATIER

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