Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...Antoine Gallimard refuse l’image d’entrepreneur cynique dressée par les auteurs BD de Casterman et propose sa propre fille, Charlotte Gallimard, au poste d’administrateur délégué de la maison éditrice de « Tintin » et d’Hugo Pratt…
Interpellé directement par les auteurs de bandes dessinées publiés chez Casterman représentés par leurs plus gros vendeurs comme les ayants droit d’Hergé, d’Hugo Pratt, mais aussi Jacques Tardi, Philippe Geluck, Enki Bilal, Frank Margerin, François Schuiten, Régis Loisel… (1), Antoine Gallimard a réagi rapidement et sèchement auprès de l’AFP afin de mettre les choses au clair.
« Chers auteurs,
Vous m’avez adressé une lettre publique où vous laissez entendre que l’éditeur de littérature que je suis n’est qu’un entrepreneur cynique et inattentif à vos préoccupations. Moi qui ai toujours été du côté des écrivains et connais leur sensibilité, je ne me reconnais pas dans cette caricature.
Reprenons simplement les faits dans le bon ordre.
Si je me suis engagé dans le rachat du groupe Flammarion, c’était bien aussi pour conforter la place de Casterman, et donc celle de ses auteurs, parmi les éditeurs de bandes dessinées. J’y ai consacré toute mon énergie pendant neuf mois, jusqu’à ce que l’affaire soit signée le 5 septembre dernier, il y a tout juste deux mois.Â
Une proposition m’a été faite par L’École des Loisirs, propriété de la famille Delas, de racheter la moitié des parts de Casterman. Ce projet était motivé par le souhait de Louis Delas de conserver la direction de Casterman, tout en prenant la présidence et la direction de son groupe familial. Il s’agissait donc d’abord, pour Louis Delas, de résoudre un problème de succession, étant appelé de longue date à prendre la suite de son père à la tête de l’École des Loisirs. Je n’accepte pas de porter la responsabilité de la décision de Louis Delas de rejoindre le groupe de son père. Cette décision était prise depuis longtemps.Â
Vous me reprochez de ne pas être venu vers vous plus tôt pour vous rassurer sur le devenir de Casterman. Mais c’est précisément par respect pour la direction éditoriale de Casterman, et donc de Louis Delas, que je me suis abstenu de le faire.Â
Je sais l’importance de la création éditoriale dans le secteur de la bande dessinée. C’est du reste ce qui m’a motivé à reprendre Futuropolis et à créer un secteur de bande dessinée chez Gallimard Jeunesse, notamment avec Bayou. Riche de cette expérience, je souhaite continuer avec vous tous à faire vivre cette maison, qui est autant la mienne que la vôtre.Â
Bien sincèrement,
Antoine Gallimard »
Par ailleurs, toujours d’après le quotidien belge Le Soir et notre collègue Daniel Couvreur (http://www.lesoir.be/120060/article/culture/livres/2012-11-14/charlotte-gallimard-chez-casterman), à l’occasion du conseil d’administration des éditions Casterman qui se tient aujourd’hui, Antoine Gallimard va proposer de désigner sa fille, Charlotte Gallimard (trente-deux ans et déjà P.D.G. des éditions Alternatives), au poste d’administrateur délégué de la maison Casterman : titre qu’avait Louis Delas, lors du rachat de Casterman par la maison Flammarion.
En conséquence, Charlotte Gallimard devrait donc, logiquement, remplacer Louis Delas qui a récemment démissionné de son poste, suite à cette proposition de rapprochement entre sa maison familiale L’École des loisirs et Casterman, laquelle n’a pas été validée par Antoine Gallimard : une période de transition s’ouvrant sous l’autorité du président du conseil d’administration des éditions Casterman, madame Teresa Cremisi.
Quoi qu’il en soit, cette affaire est une nouvelle preuve de l’angoisse qui étreint, en ce moment, le secteur de la bande dessinée francophone : les relations entre auteurs et éditeurs n’ayant jamais été aussi tendues…
Gilles RATIER