Depuis 2021, chaque année, Tiburce Oger rassemble une belle équipe de dessinateurs et dessinatrices pour évoquer l’Ouest américain à travers des personnages authentiques – le Far West, donc – et l’exploitation de ces territoires par des individus qui oubliaient, bien souvent, qu’ils n’étaient que des colonisateurs assoiffés de richesses…
Lire la suite...Spécial « Spawn Family »
L’univers de « Spawn » est si riche qu’il n’en finit plus de susciter l’imagination des auteurs et des artistes, semblant ne pas pouvoir – ni vouloir – s’étioler. Excellente nouvelle pour les fans français : les éditions Delcourt continuent de suivre au plus près le petit monde horrifique de McFarlane, avec notamment « Sam & Twitch » et le renouveau de « Spawn ».
« Sam & Twitch » T2 (« Les Sorcières et l’écrivain ») par Alberto Ponticelli, Luca Erbetta, Brian Michael Bendis, Luca Blengino et Todd McFarlane
C’est toujours un immense plaisir que de retrouver Sam & Twitch, nos deux flics atypiques apparus dès le début de la série « Spawn ». Ces Laurel & Hardy du crime à la fois désabusés et retors, loin de jouer les seconds couteaux, sont devenus au fil du temps des stars à part entière, ayant droit à leurs propres séries (j’espère que vous n’avez pas loupé « Les Enquêtes de Sam & Twitch », superbe spin-off de spin-off édité également chez Delcourt). Au début de l’été est sorti le deuxième tome de la reprise de leurs aventures originales, une refonte bienvenue des épisodes parus il y a des années chez Semic. Outre le fait que cette série incontournable soit à nouveau disponible, on ne peut que se réjouir de la beauté de ces albums redonnant un second souffle à cette œuvre captivante. En attendant la suite avec les sublimes épisodes signés par le duo Bendis et Maleev (miam !), ce deuxième tome nous propose les épisodes 10 à 13 (l’arc « Witchcraft »), mais aussi les quatre épisodes d’une histoire récente inédite en album VF (pré-publiée dans Les Chroniques de Spawn) : « The Writer ».
Difficile de succéder à l’excellent Angel Medina qui n’a pas son pareil pour dessiner de manière aussi réaliste qu’exagérée, créant des distorsions visuelles extraordinairement justes. Pourtant, avec « Les Sorcières », Alberto Ponticelli s’en sort haut la main, réussissant à s’intégrer dans l’univers graphique initial sans singer quoi que ce soit. Au départ, on le sent un peu fébrile, mais très vite son style semble happé par l’esprit de la série. Paramètres importants dont il a tenu compte pour ce faire : le découpage et la mise en pages si spécifiques aux créations de McFarlane (répétition, fragmentation, rôle de l’espace noir enserrant les cases, dynamique du cadre, utilisation de l’écran télé en tant que case, etc.). Sur ce point, c’est une totale réussite. « Les Sorcières » s’inscrit directement dans cette croisée des chemins incarnée dès le départ par la présence de nos deux flics « réalistes » au sein d’un univers fantastique, pendant voulu par McFarlane pour justement ne pas faire de « Spawn » une série trop éloignée de notre monde réel. Avant de passer à des enquêtes bien plus « normales », Sam & Twitch ont eu affaire à des crimes flirtant avec le surnaturel, ce qui est le cas ici avec ces sorcières modernes horriblement assassinées dans un parc. Pas étonnant de retrouver Bendis au scénario, l’homme étant connu pour être venu du polar avant de se lancer dans le récit super-héroïque ; « Sam & Twitch » constitue donc pour lui une charnière évidente. Il nous pond là une histoire bien sombre qui ne verse jamais dans le folklore malgré les éléments pittoresques et indispensables à tout bon récit de sorcellerie, en portant un regard direct sur les choses.
« L’Écrivain » est une création plus récente (2010) chapeautée par McFarlane et réalisée par les deux Luca : Blengino au scénario et Erbetta au dessin. Petit changement d’ambiance, surtout esthétique, avec un trait et des couleurs plus « clairs », proposant aussi un découpage plus classique. Mais ce récit n’en est pas moins sombre pour autant, au contraire : c’est une histoire à faire se dresser les cheveux sur la tête, d’autant plus qu’elle s’inscrit fortement dans un contexte réaliste. En introduction, McFarlane le dit lui-même : « Si vous trouvez cette nouvelle histoire quelque peu incommodante et dérangeante, cela signifie que nous avons réussi notre coup. » Coup réussi sans doute aucun, puisque le récit de cet assassin surnommé « l’écrivain » à cause de son utilisation des corps de ses victimes comme support pour inscrire les chapitres de son livre a de quoi effrayer. Une idée aussi géniale qu’atroce, fascinante, digne des plus grands psychopathes de notre monde réel. La vision de ces corps nus recouverts de mots frappe puissamment l’esprit du lecteur, et donne à l’enquête une dimension incroyable. La présence du Docteur Charlotte Garland (consultante en graphologie pour la police) aux côtés de Sam & Twitch pour aider ces derniers à résoudre cette sordide affaire est aussi l’un des points forts du récit, mettant en exergue la difficulté pour Sam d’accepter une tierce personne dans l’enquête, qui plus est une graphologue, et qui plus est une femme… C’est vraiment très très bon, et l’on suit l’affaire avec grand intérêt, pris par les différents événements du récit qui s’agencent parfaitement pour entretenir le mystère. On frémit souvent. Excellent.
« Spawn : La Saga infernale » T1 (« Liens de sang ») et T2 (« Abus de confiance ») par Szymon Kudranski, Jonathan David Goff, Will Carlton et Todd McFarlane
Si vous êtes fans de « Spawn », vous savez donc que depuis le numéro 200 de janvier 2011, la série a pris un tournant historique et décisif pour l’avenir de cette création mythique. En effet, Al Simmons a fini par mourir pour de bon, son corps retrouvé décapité dans les bas-fonds de la ville. Mais l’énergie du Hellspawn, elle, n’a pas disparu pour autant. Son nouvel hôte, un certain Jim Downing, sort d’un long coma, amnésique, et se retrouve affublé de ce pouvoir dont il ne connaît rien. Les lecteurs de comics sont habitués à ce phénomène de « héros qui ne meurt jamais ». Du côté de Marvel et DC, on n’en finit plus de faire mourir et renaître Captain America, Batman et consorts… avec ce danger déjà vécu d’une lassitude du lectorat qui – à force d’être spectateur du « je meurs mais je ne meurs pas mais je meurs quand même sans mourir » – ne vibre plus, ne pouvant plus lire ce genre de récit dramatique sans se demander où se cache le truc qui va faire revenir le héros d’entre les morts. Mais malgré ça le processus continue, et je suis prêt à vous parier que dans les prochaines années certains héros immortels périront avant de revenir en s’exclamant : « Coucou ! C’est moi que v’là  ! C’était pour de faux ! Hé-héééé ! ». Tout ça pour vous dire que le renouveau de « Spawn » échappe à cet écueil bien connu avec un talent fou, redonnant un incroyable souffle à la série : c’est beau, c’est excitant, c’est rondement mené, bref : un sans faute. C’est assez rare pour le souligner. La mort d’Al Simmons aurait pu engendrer une fausse révolution, un rebond de plus, faussement spectaculaire. C’était sincèrement à craindre. Mais c’est tout le contraire qui se passe, redynamisant même brillamment le concept.
La mort d’Al Simmons transcende la série sur le fond comme sur la forme, donnant l’occasion à McFarlane de renouveler aussi son équipe artistique et d’offrir à sa création une esthétique nouvelle sans pour autant la dénaturer. C’est chose faite – et bien faite : bon dieu ce que c’est beau – avec l’arrivée de Szymon Kudranski au dessin, un artiste si doué que ça en devient agaçant. Alors que le monde des comics se targue depuis quelque temps de la présence en ses rangs d’artistes italiens encensés (Dell’Otto, Bianchi, etc.), je trouve personnellement que le vrai renouveau vient de l’Est. Bien plus fort, bien plus intéressant. Parmi les plus anciens, il y a bien sûr le Bulgare Alex Maleev, mais il faut aussi compter sur le Serbe R. M. Guéra (« Scalped »), les Croates Danijel Zezelj (« Luna Park ») et Esad T. Ribic (« Silver Surfer »), et maintenant le Polonais Szymon Kudranski. L’école de l’Est, alliant un véritable savoir-faire du dessin réaliste et de la peinture souvent sombre, ne cesse de nous faire découvrir des artistes exceptionnels. Kudranski apporte indubitablement du sang neuf à « Spawn », déployant un véritable talent pour les ambiances en clair-obscur : l’idéal pour cette œuvre. Bien sûr, on sent dans son travail alliant dessin pur et informatique l’influence d’un artiste comme Maleev, mais il a vraiment un style bien à lui, et ses couvertures peintes sont de vraies merveilles.
Dans ces deux premiers volumes, nous ferons donc mieux connaissance avec le « nouveau Spawn », Jim Downing, dont la personnalité tranche beaucoup avec celle de Simmons. C’est aussi l’un des éléments qui fait de ce renouveau de la série un vrai tournant et non un coup de bluff. Une idée assez maline, que de prendre un personnage presque à l’opposé de Simmons… Là où ce dernier se cachait, restant dans l’ombre et évitant toute exposition devant les médias, Downing, lui, s’expose, allant sur les plateaux télé et ne rechignant pas à faire preuve de ses pouvoirs au su et au vu de tout le monde. Une attitude qu’il devra vite repenser, certes, mais un caractère qui – en étant aussi différent de celui du premier Spawn – ouvre carrément une nouvelle voie, un nouvel esprit, une ouverture possible pour régénérer et réinventer cette Å“uvre sans la trahir. Tous les personnages historiques sont présents (Sam et Twitch, le Violator, Malebolgia…), mais c’est bien une nouvelle ère qui commence avec ces épisodes dont on saluera aussi la grande qualité d’écriture. Entre les citoyens qui assistent éberlués aux miracles de guérisseur de Downing devant les caméras, le Violator qui cherche à manipuler le nouveau Spawn pour le contrôler avant qu’il ne devienne… incontrôlable, un Twitch autant désemparé par l’arrivée de ce nouveau Spawn que par l’état critique de son coéquipier Sam hospitalisé, Marc Rosen qui se charge d’enquêter sur le passé oublié de Downing qu’il « manage » et la présence de deux ou trois figures féminines non négligeables en termes d’intrigue et d’émotion, on peut dire qu’il y a là un bon potentiel pour que « Spawn » ne retombe pas de sitôt ! Un coup de cÅ“ur.
Cecil McKINLEY
« Sam & Twitch » T2 (« Les Sorcières et l’écrivain ») par Alberto Ponticelli, Luca Erbetta, Brian Michael Bendis, Luca Blengino et Todd McFarlane Éditions Delcourt (19,99€) – ISBN : 978-2-7560-2898-9
« Spawn : La Saga infernale » T1 (« Liens de sang ») par Szymon Kudranski, Jonathan David Goff, Will Carlton et Todd McFarlane Éditions Delcourt (14,95€) – ISBN : 978-2-7560-2862-0
« Spawn : La Saga infernale » T2 (« Abus de confiance ») par Szymon Kudranski, Jonathan David Goff, Will Carlton et Todd McFarlane Éditions Delcourt (14,95€) – ISBN : 978-2-7560-2895-8
J ‘ aime autant le Spawn 1.0 que 2.0 qui il est vrai ne s ‘ oppose en aucun cas sur la forme te le fond .J ‘ ai eut un peu de mal à m ‘ adapté au design post Cappulo , mais je la considère comme une série pop corn comme peu l ‘ être Darkness .