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« Je suis le gardien de mon frère » par Liu Wei et Pierre Makyo

12/03/2012
Par Gilles Ratier

Un père alcoolo, cruel et violent, est rongé par un démon intérieur qui le pousse à rouer de coups son épouse et son plus jeune fils, Ivan. Curieusement, son frère, Niko, semble épargné : une différence de traitement qui n’est pas sans conséquence sur les relations qu’entretiennent ces deux garçons qui, manifestement, ne s’aiment pas ! D’autant plus que, contrairement au « souffre-douleur » Ivan, Niko est le « fils parfait » : beau, gentil, meilleur en tout…

Il va même s’occuper d’Ivan quand son père le laisse à moitié mort, alors que son jeune frère a, auparavant, massacré son chat ! Cependant, Ivan le défendra quand le père osera porter la main sur Niko… Le drame familial qui va s’en suivre va pousser Niko à veiller sur un Ivan détruit par un acte irréparable : « Je suis le gardien de mon frère » faisant référence à la phrase interrogative que répliqua cyniquement Caïn à Dieu, alors qu’il venait juste de tuer Abel… La vie a-t-elle encore un sens après tant de violence ? Dans ce scénario oppressant, Pierre Makyo restitue parfaitement les non-dits des secrets de famille et de ses jalousies qui détruisent les âmes pour pousser les protagonistes au paroxysme de leurs sentiments. Il en décortique même tout le mécanisme, séquence après séquence, nous faisant pénétrer dans l’esprit des personnages pour mieux s’attacher à déceler leur résurgence, leur duplication dans le temps. C’est ainsi que nous comprenons mieux cet engrenage infernal qui va aboutir à un gâchis monumental et ce cycle récurrent, inéluctable, qui nous rattrape tous… En revanche, le traitement graphique (avec des décors plutôt minimalistes) du Chinois Liu Wei peut surprendre ; mais il faut bien reconnaître, qu’au final, ses teintes grises et ses jeux d’ombres sur les regards ou sur les gestes sont révélateurs du récit et renforcent la sensibilité des mots…