Depuis 2021, chaque année, Tiburce Oger rassemble une belle équipe de dessinateurs et dessinatrices pour évoquer l’Ouest américain à travers des personnages authentiques – le Far West, donc – et l’exploitation de ces territoires par des individus qui oubliaient, bien souvent, qu’ils n’étaient que des colonisateurs assoiffés de richesses…
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Je me souviens de “Zig et Puce” et de quelques autres… : une sélection parmi les 85 ouvrages de référence sur la bande dessinée parus en 2007 !
En cette période de multiplication de l’offre livresque, de nombreux essais sur la bande dessinée sont venus fleurir les rayons déjà bien garnis de nos librairies, risquant de passer inaperçus : l’amateur préférant casser sa tirelire pour acquérir les derniers «XIII», «Quête de l’oiseau du temps» ou «Lanfeust» plutôt que de prendre connaissance des dessous envoûtants du 9ème art ! Après avoir salué les remarquables ouvrages sur René Goscinny déjà parus en cours d’année (1) et les habituelles monographies indispensables qui sont publiées par les éditions Mosquito ou PLG (2), commençons par mettre l’accent sur «L’art d’Alain Saint-Ogan» par Thierry Groensteen, aux éditions Actes Sud.
Evidemment, cette bio-bibliographie très fouillée, qui se veut avant tout un beau livre d’images, conçue par l’un de nos plus éminents experts es-9ème art, est réalisée, en priorité, pour les vrais amateurs de bandes dessinées : ceux qui sont curieux ! Pour l’écrire, Thierry Groensteen s’est appuyé, particulièrement, sur le très riche fonds Saint-Ogan du CNBDI : établissement où l’auteur fut recruté comme conseiller scientifique, puis comme directeur du Musée de la bande dessinée, jusqu’en 2001. Alors qu’il n’existait encore aucun ouvrage consacré spécifiquement au père de «Zig et Puce», de «M. Poche» ou du «Rayon mystérieux», ce livre comble un vide certain en évoquant la carrière de l’artiste, sous tous ses aspects, et en expliquant la dette qu’à notre medium favori à Alain Saint-Ogan. Notons que les aventures de «Zig et Puce» ont été intégralement rééditées aux éditions Glénat (sous la direction de l’érudit Dominique Petitfaux), et qu’elles sont toujours disponibles au catalogue de l’éditeur grenoblois : elles sont la preuve évidente du charme, toujours opérant, de ce chef-d’œuvre trop oublié aujourd’hui. Malheureusement, cette belle réédition n’a guère rencontré le succès espéré, la série accusant, par ailleurs,  indiscutablement son âge : mais n’oublions pas qu’elle fut créée en 1925, et qu’elle fut aussi la première création importante et populaire à abandonner les textes sous l’image, au profit d’un emploi exclusif du phylactère ! Une révolution pour l’époque !
Enfin, Saint-Ogan fut l’une des plus importantes influences pour Hergé, le dessinateur de «Tintin» et l’auteur le plus «monographié» du monde de la bande dessinée ! Philippe Goddin, l’un de ses principaux biographes lui consacre encore un ouvrage de plus de 1000 pages : «Hergé, lignes de vie» aux éditions Moulinsart. Cette approche biographique différente, basée sur des courriers personnels et des documents inédits, en fait une somme (définitive ?) qui complète les travaux de ses prédécesseurs (Numa Sadoul, Pierre Assouline, Thierry Smolderen, Pierre Sterckx ou Benoît Peeters), même si elle leur doit beaucoup !
Justement, Benoît Peeters et Pierre Sterckx viennent de publier deux nouveaux ouvrages sur «Tintin», aux éditions Les Impressions nouvelles ! Le premier est la réédition bienvenue d’un ouvrage mythique et rigoureux, fortement revu et enrichi (et complété par un passionnant entretien inédit avec Hergé) : «Les bijoux ravis», un livre hélas orphelin des images qui auraient dû l’accompagner, Benoît Peeters n’étant guère en odeur de sainteté chez Moulinsart. Le second, écrit par un célèbre critique d’art qui fut l’ami d’Hergé pendant 20 ans, nous montre la double nature ambiguë du reporter du Petit Vingtième, lequel incarne à merveille la raison et la folie du système occidental : «Tintin schizo». Inutile de vous préciser que ces deux publications sont indispensables à tout amateur !
Pour en finir avec «Tintin», ne négligeons pas la 3ème mouture (là aussi amplement corrigée) d’«Etudier Tintin au Tibet» que le pédagogue confirmé qu’est Didier Quella-Guyot nous propose dans sa collection «La BD de case en classe» aux éditions Scerén et du CRDP de Poitou-Charentes. L’ouvrage est très agréable à la lecture et est fort bien mis en pages. D’autant plus que, lui, il a la chance d’être amendé par Nick et Fanny Rodwell : en effet, il contient quelques cases signées Hergé afin d’appuyer les brillantes démonstrations du professeur !
Signalons encore deux monographies particulièrement intéressantes, parues également en cette fin d’année chargée : «Blueberry, une légende de l’Ouest» d’Arnaud de la Croix chez Point Image – JVDH (une remarquable étude en profondeur de la saga western créée par Jean Giraud et Jean-Michel Charlier par un ancien des Cahiers de la BD, aujourd’hui éditeur chez Casterman et enseignant aux instituts Saint-Luc à Bruxelles), et «Henri Vernes & Bob Morane, une double vie d’aventures» de Daniel Fano, au Castor Astral dans la collection «Escales des lettres» (une passionnante biographie basée sur des entretiens malicieux et complices entre le romancier-scénariste-baroudeur et un journaliste spécialisé dans les littératures jeunesse : même si on y parle peu de bande dessinée, les témoignages de Yann & Conrad et les déclarations sans langue de bois de ce maître de l’aventure, qui fêtera bientôt ses 90 ans, sont un délice !).
«Bob Morane», la bande dessinée, est publiée par les éditions Lombard ! Cela tombe bien, l’éditeur du journal Tintin vient enfin de publier la 3ème partie de la chronique de ses 50 premières années : «Le Lombard, l’aventure sans fin». C’est l’esthète et historien bien connu qu’est Patrick Gaumer (le «Larousse de la BD», c’est lui !) qui a pris la suite de Jean-Louis Lechat (dont les 2 premiers recueils sont réédités avec une nouvelle maquette pour l’occasion) pour nous conter la période 1996 à 2006 : là encore, la verve et la précision du spécialiste fait mouche !
Si, pour vous, la bande dessinée, cela ne se cantonne pas qu’au franco-belge, on vous conseillera aussi deux guides pour vous initier aux mangas : «Manga, histoire d’un empire japonais» de Benoit Maurer aux éditions Timée (où un amoureux de la culture nippone, par ailleurs fondateur des éditions IMHO, nous propose un ouvrage ludique pour tout connaître sur la culture manga) et «Découvrir le manga» d’Agnès Deyzieux publié également dans la collection «La BD de case en classe» des éditions Scerén et du CRDP de Poitou-Charentes (où la documentaliste se base sur «L’histoire des 3 Adolf» et sur «Gen d’Hiroshima» pour insister sur les spécificités narratives et graphiques de ce phénomène asiatique).
Enfin, si, en fait, ce qui vous intéresse, c’est de créer des bandes dessinées, nous avons aussi ce qu’il vous faut en stock : «Réaliser une bande dessinée» de l’omniprésent et compétent Didier Quella-Guyot (encore aux éditions Scerén et du CRDP de Poitou-Charentes) s’adressera plus particulièrement aux enseignants ; quant au «Faire de la bande dessinée» de l’américain Scott McCloud chez Delcourt, il fait autorité en la matière (même s’il analyse surtout les techniques propres aux pays Outre-atlantique), comme ont pu l’être ses deux précédents ouvrages de références : «L’art invisible» et «Réinventer la bande dessinée».
Pour clore ce chapitre, signalons que les nombreux visages du 9ème art sont résumés dans un remarquable petit livre destiné, principalement, aux universitaires et à ceux qui n’y connaissent pas grand-chose mais qui veulent en appréhender la substantifique moelle : «La bande dessinée» d’Annie Baron-Carvais aux Presses Universitaires de France (PUF), dans la collection «Que sais-je ?». Hélas, cette membre émérite de l’ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinées) et maître de conférence à l’Université de Lille 2 nous a quittés trop tôt, en août dernier. Elle venait juste d’achever la mise à jour de cette 5ème édition qui aurait, cependant, méritée une dernière relecture posthume par des spécialistes du domaine afin de corriger les inévitables petites erreurs de détail… Il n’en demeure pas moins que ce concentré d’informations en 126 pages reste l’un des ouvrages de référence les plus important de l’année puisqu’il s’adresse, prioritairement, à un public qui a longtemps négligé cet extraordinaire véhicule de la culture de masse, et qui, grâce à Annie Baron-Carvais, lui est désormais, en grande partie, acquis !
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Gilles RATIER
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(1)                «Goscinny et moi : témoignages» de José-Louis Bocquet chez Flammarion Plus de lectures du 12 mars 2007 et «Goscinny (1926-1977) : la liberté d’en rire» de Pascal Ory chez Perrin Plus de lectures du 15 octobre
(2)                «Toppi : une monographie» par Michel Jans, «Yann & Conrad : une monographie» par Vivian Lecuivre chez Mosquito Plus de lectures du 15 octobre et «Alex Varenne : itinéraire d’un libertin» entretiens avec Luc Duthil chez PLG Plus de lectures du 19 février 2007
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