Depuis 2021, chaque année, Tiburce Oger rassemble une belle équipe de dessinateurs et dessinatrices pour évoquer l’Ouest américain à travers des personnages authentiques – le Far West, donc – et l’exploitation de ces territoires par des individus qui oubliaient, bien souvent, qu’ils n’étaient que des colonisateurs assoiffés de richesses…
Lire la suite...PLUS DE LECTURES N°60 DU 6 DECEMBRE 2004
Et encore des nouveautés chroniquées pour que vous puissiez garnir efficacement votre sapin avec de beaux et originaux cadeaux de Noël ! Cette semaine, notre attention s’est portée sur : “ Le commun des mortels ” par Kokor aux éditions Vents d’Ouest, “ Colombe et la horde ” par Simon Hureau aux éditions Ego comme X, “ L’enragé T.1 ” par Baru aux éditions Dupuis, «Le peintre Touo Lan suivi de Hank» par Marc-Antoine Mathieu aux éditions de L’An 2 et le célèbre « Lanfeust des étoiles T.4 : Les buveurs de mondes » par Didier Tarquin et Christophe Arleston aux éditions Soleil.
Cliquez sur l’appareil photo pour découvrir les couvertures des albums chroniqués.
“ Le commun des mortels ” par Kokor
Editions Vents d’Ouest (12,50 Euros)
Ce huis clos, quelque peu déroutant, met en scène deux personnages assez fantasques qui ne se connaissent pas et qui sont embauchés pour remettre en état un petit bar-hôtel situé au milieu de nulle part. Ils ne connaîtrons le commanditaire et propriétaire des lieux que lorsque tout sera terminé et vont vivre côte à côte pendant un mois. Tour à tour poétique, drôle et cruelle, cette étrange BD permet à Kokor (connu également sous le patronyme d’Alain Koch) d’expérimenter la couleur, laquelle fait ici partie intégrante de la narration. Les tons chaleureux adoptés contribuent d’ailleurs à l’ambiance apaisante de ce récit décalé et étonnant
“ Colombe et la horde ” par Simon Hureau
Editions Ego comme X (16 Euros)
Pétrie de crédulité, Colombe rêve du prince charmant. Elle s’invente une vie idéale faite d’illusions tout en tentant de renouer avec ses origines en se rapprochant de sa famille naturelle. Sa naïveté fait son charme et touche d’emblée le lecteur alors que l’auteur (déjà remarqué pour son Palaces chez le même petit éditeur angoumoisin) s’amuse à pousser à l’extrême un récit qui ne peut pas laisser insensible ! La trajectoire de cette adolescente qui tente d’échapper à son destin est une sorte de conte de fée «trash» enluminé par un sympathique graphisme décalé et fort prometteur.
“ L’enragé T.1 ” par Baru
Editions Dupuis (12,94 Euros)
Baru avait déjà situé un de ses nombreux (et à chaque fois pertinents) albums dans le milieu de la boxe : “Le chemin de l’Amérique”, paru en 1990 chez Albin Michel et réédité en 1998 chez Casterman. Aujourd’hui, il revisite cet univers pour nous dépeindre l’ascension sociale d’un gamin des cités qui canalise sa violence en pratiquant ce sport de manière intensive, malgré le désaccord de son père. Ce jeune homme attachant, qui n’est pourtant pas représenté sous un jour vraiment sympathique (il est ambitieux, orgueilleux, coléreux et rancunier), est prêt à tout pour fuir sa banlieue pourrie, sa condition précaire et la rigueur de son paternel. Il deviendra vite aussi riche que détestable mais c’est seulement dans le deuxième tome que nous connaîtrons la fin de cette trajectoire époustouflante qui le conduira à comparaître devant la justice : pour lui, la reconnaissance familiale et sociale pourrait avoir été à double tranchant. Sans racolages et sans compromissions, comme à son habitude, Baru sait nous parler au mieux du milieu ouvrier dont il est issu et raconte avec une rare force et une étonnante tension ce captivant destin d’un gamin qui a la rage aux poings. Avec une narration exemplaire et un dessin qui oscille entre réalisme et caricature (les scènes de ring sont particulièrement saisissantes et sont sublimées par le style vif et séduisant de cet auteur engagé et atypique qui fût professeur d’éducation physique), Baru nous assène son propos sans coup faillir !
« Le peintre Touo Lan suivi de Hank » par Marc-Antoine Mathieu
Editions de L’An 2 (17 euros)
Les éditions angoumoisines de L’An 2 (dirigées par l’érudit Thierry Groensteen, historien et exégète du 9ème art), nous démontrent, au détour de leurs indispensables publications, que la BD ne se limite pas à de simples cases jonchées de bulles. Après avoir publié un étonnant récit sans phylactères («Le système» de l’américain Peter Kuper), voilà qu’elles proposent, dans leur esthétique collection «Roman visuel», une adaptation insolite de deux contes traditionnels avec «Le peintre Touo Lan suivi de Hank» par Marc-Antoine Mathieu : l’un présente un artiste chinois fasciné par les visages, l’autre un bûcheron ne supportant pas que les arbres meurent après lui. Des textes courts (qui logeraient dans une bulle de BD), font face à de magnifiques illustrations proches de l’estampe. Dans ces histoires, rapportées par les célèbres écrivains Henri Gougaud et Paul Auster, l’auteur de «Julius Corentin Acquefacques» nous dévoile, avec sensibilité, tout de sa maîtrise des ombres et du noir et blanc.
« Lanfeust des étoiles T.4 : Les buveurs de mondes » par Didier Tarquin et Christophe Arleston
Editions Soleil (12,50 euros)
Tout en fêtant ses 10 ans d’existence, le désormais célèbre «Lanfeust de Troy» se paye le luxe d’être présent, en 2004, dans deux nouveaux albums dont l’un sort à point nommé pour Noël : «Les buveurs de mondes». Avec ce tome 4 du cycle «Lanfeust des étoiles» notre héros porteur du pouvoir absolu est envoyé dans l’espace pour préserver l’univers galactique des ambitions d’une terrible confédération extra-terrestre. Le graphisme de Didier Tarquin n’a jamais été aussi dynamique (rendons grâce également aux superbes couleurs de Claude Guth) et les dialogues ad hoc et bourrés de jeux de mots de Christophe Arleston ont une pêche d’enfer : Arleston étant l’un des rares scénaristes contemporains à retrouver ce qui faisait le charme des récits jovials et efficaces d’un René Goscinny. L’intrigue complexe des précédents épisodes cosmiques est légèrement mise en retrait par un coup de théâtre qui propulse le périlleux aventurier, toujours aussi naïf et maladroit, quatre mille ans en arrière.
Gilles RATIER