Dans le cadre de l’anniversaire de leurs 50 ans, les éditions Futuropolis publient un recueil des pages du dimanche en couleurs, inédites en album dans nos contrées, du célèbre Popeye par son créateur Elzie Chrisler Segar (1). Apparu pour la première fois le 17 janvier 1929 dans l’humoristique « The Thimble Theatre », le rude marin à la pipe obtient un tel succès qu’il en devient le personnage principal (et le compagnon d’Olive Oyl) : la série étant retitrée « Thimble Theatre Starring Popeye » en 1931. Cette bienvenue démarche patrimoniale est également un hommage à la mythique collection Copyright de l’éditeur — à l’époque d’Étienne Robial et Florence Cestac —, qui avait proposé, alors, huit tomes du plébiscité « Popeye » qu’il serait bon de rééditer.
Lire la suite...PLUS DE LECTURES n° 10 – Les 5 Critiques du 10 novembre 2003
« L’ascension du Haut Mal T.6 » par David B., « Des loups dans les murs » par Dave McKean et Neil Gaiman, « Une maison de Frank L. Wright et autres histoires d’amour » par Cosey, « Cotton Kid T.6 : Le coyote noir » par Pearce et Jean Léturgie, « Le tueur T.5 : La mort dans l’âme » par Luc Jacamon et Matz.
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« L’ascension du Haut Mal T.6 » par David B.
Editions L’Association (16 Euros)
David B. (alias David Beauchard) appartient à cette mouvance qui revendique une BD autobiographique, tout en étant à la recherche de nouveaux moyens narratifs pour le 9ème art, et qui s’engage vraiment dans la défense et l’expression d’une haute idée de la BD. Avec son «Ascension du Haut Mal», dont c’est le dernier volume, il démontre toute la valeur de ses principes et réussi à imposer au grand public une œuvre importante et inégalée jusqu’à ce jour. David B. nous parle de l’épilepsie de son frère aîné et des différentes thérapies essayées sur le malade, avec une franchise qui n’exclut pourtant pas une certaine pudeur. Tout en nous livrant un précieux témoignage sur les lectures et les influences qui ont nourri son imaginaire, au carrefour des légendes, de l’histoire et de la science, l’auteur s’efforce, dans cet ultime volet, de digérer son passé. Il s’éloigne de son milieu familial mais nous confie toujours ses rêves (ou plutôt ses cauchemars) et ses affrontements psychologiques, utilisant un style graphique déroutant au premier abord mais qui est de plus en plus maîtrisé et impressionnant : «L’ascension du Haut Mal», est une ambitieuse et remarquable bande dessinée !
« Des loups dans les murs » par Dave McKean et Neil Gaiman
Editions Delcourt (14,95 Euros)
A la frontière entre le livre d’enfant et la BD, ce somptueux ouvrage pour les plus petits, dû à l’un des plus brillants graphistes et l’un des meilleurs écrivains anglo-saxons, mérite votre attention. Jouant de façon inventive avec peintures et photos, Dave McKean s’éloigne des codes habituels de la bande dessinée pour coller au climat angoissant de ce conte dérangeant, basé sur les peurs enfantines. Quant à Neil Gaiman, il explose les limites du quotidien en mettant en scène une gamine qui, pour tromper l’ennui et attirer l’attention des parents, se réfugie dans l’imaginaire. En effet, depuis quelques temps, la petite Lucie entend des bruits étranges dans la maison et elle sait que ce sont des loups qui s’agitent dans les murs ; et non des souris, des rats ou des chauves-souris comme le prétendent sa mère, son père et son frère. Et quand les loups sortiront de leur cachettes pour envahir la maison, la famille n’aura d’autres choix que la fuite. Mais Lucie a oublié son cochon en peluche et retourne courageusement sur les lieux…
« Une maison de Frank L. Wright et autres histoires d’amour » par Cosey
Editions Dupuis (12,94 Euros)
Avec sa poésie contemplative et son dessin épuré rehaussé par un panel de couleurs réconfortant, le Suisse Cosey nous propose quatre variations sur le thème de l’amour, sans trahir ses thèmes de prédilection qui sont le voyage et la quête de soi. Il s’agit surtout d’histoires de rencontres où les regards se croisent et où les gestes, même les plus futiles, séduisent. Le premier de ses courts récits doux et fragiles (pré publié dans le journal Spirou) est un des plus émouvants : un vieil homme veut reconquérir un ancien amour et tente maladroitement de se souvenir de son nom. Chaque case semble se prolonger à l’infini afin de bien nous faire apprécier la beauté de l’instant car l’auteur maîtrise dialogues et images mélancoliques, tout en restant optimiste.
« Cotton Kid T.6 : Le coyote noir » par Pearce et Jean Léturgie
Editions Vents d’Ouest (8,99 Euros)
«Cotton Kid», cow-boy en culottes courtes, est en admiration devant les exploits (pas vraiment authentiques) de son grand frère, agent chez Pinkerton. Régulièrement, il quitte la plantation familiale pour suivre son frangin vantard, en mission dans le grand Ouest. Dans cet épisode aussi corrosif que les précédents, ils partent arrêter un mystérieux bandit qui s’empare impunément des recettes de la mine d’un riche propriétaire peu recommandable. Voilà de la bonne BD tout public, avec plusieurs niveaux de lecture (un peu comme pouvaient l’être les «Astérix» ou les «Lucky Luke» scénarisés par Goscinny), qui évolue dans une ambiance graphique rappelant également celle de «Lucky Luke». Cela est tout à fait normal puisque les auteurs ont beaucoup travaillé, officiellement, sur la série créée par Morris. Pearce, c’est le pseudonyme commun de Yann et Conrad ; et avec Jean Léturgie, ils étaient à l’origine de la création de l’excellent «Kid Lucky» où ils déployaient déjà, sans vergogne, leur panoplie d’anti-héros avec ce premier western qui ne se prenait pas au sérieux. Les aventures haletantes, très bien rythmées et fort drôles de «Cotton Kid» sont du même tonneau, avec un poil d’humour piquant en sus.
« Le tueur T.5 : La mort dans l’âme » par Luc Jacamon et Matz
Editions Casterman (9,45 Euros)
Tueur professionnel que rien n’arrête quand il est sous contrat, le principal protagoniste de cette série est fatigué : d’ailleurs c’est la fin de la série et ce cinquième tome nous révèle les tenants et les aboutissants des tomes précédents. Le tueur tente de retrouver ceux qui ont voulu le liquider en Amérique du Sud. Grâce à son partenaire, qui a réussi à se glisser dans le lit de la maîtresse d’un des complices, bien en place socialement, de sa tentative d’assassinat, il réussit à kidnapper ce bourgeois parisien afin de lui faire cracher quelques noms. Notre «héros» va-t-il enfin pouvoir prendre sa retraite et se consacrer à la vie plutôt qu’à la mort ? Saluée par la critique et le public dès la sortie des premiers opus, cette BD a pour atouts un scénario millimétré (signé Matz alias Alexis Nolent), alternant les scènes mouvementées et les périodes de réflexions. Mais le dessin du publicitaire Luc Jacamon n’est pas à dédaigner puisqu’il se base principalement sur des cadrages originaux et des couleurs lumineuses, inhabituelles : encore un succès mérité !