Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...Après l’âge tendre, les Pestaculaires rentrent dans l’âge bête…
Le Paris de la Belle Époque est bien plus populaire que celui d’aujourd’hui. Il existe des quartiers ouvriers où sévissent les bandes criminelles. Ainsi, dans le quartier de Montmartre, les enfants qui traînent la journée sur la butte sont parfois victimes de ceux qu’on nomme les Apaches. La petite troupe des Pestaculaires doit ainsi déjouer les menées criminelles d’une bande de malfrats. Suite, avec « Les Pestaculaires T2 : Âge bête », du préquel amusé et amusant de la série à succès « Les Spectaculaires » !
Paris, hiver 1889, la petite Pétronille, six ans, a toujours un esprit vif et un caractère bien affirmé. Elle et des garçons plus âgés, mais moins dégourdis (Félix, Évariste et Eustache) forment la bande des Pestaculaires : un terme trouvé par un jeune spectateur du spectacle de saltimbanques dans lequel jouait les garçons. Les quatre acolytes logent chez la bienveillante Léonie et s’amusent, dans la rue, de batailles de boules de neige.
À la lecture du journal, la vieille dame est intriguée par les exploits d’un malfaiteur qui ne manque pas de culot en laissant sa carte de visite chez tous ceux qu’il dévalise : l’insaisissable et malicieux Arsène Lapin. Elle est en revanche inquiète de l’évasion annoncée d’Ignace Roublot, Paul Caprani (dit Polo l’Italgo) et Raoul Laplanche (dit Casse-museau) : les trois bandits que les Pestaculaires ont fait arrêter l’année précédente.
La troupe d’apprentis saltimbanques (Félix, Évariste, Eustache et Pétronille) tente de mettre la main sur le mystérieux trésor des dames de Montmartre. Il se sont lancés sur ce jeu de piste autour de la butte Montmartre, après avoir découvert un message sibyllin dans une bouteille oubliée dans un moulin à l’abandon. Pendant qu’ils commencent leur enquête dans une abbaye à l’abandon, la bande d’Ignace Roublot les observe. Ils veulent se venger, mais sont retenus par la perspective de mettre la main sur un somptueux trésor. Arsène Lapin, de son côté, se prend de sympathie pour les Pestaculaires, jusqu’à leur offrir son ancien repère : le cabaret des ombres.
Nous trouvons toujours autant de charme pour les albums des « Pestaculaires » : série préquel des six volumes de la série à succès « Les Spectaculaires ». On y retrouve tous les membres de la joyeuse bande de saltimbanques réunis par le plus grand des hasards 20 ans avant leurs aventures du début du XXe siècle. Pas besoin de connaitre la série d’origine pour apprécier ces albums qui s’adressent à un lectorat plus jeune. Le dessin vif, expressif, à mi-chemin entre réalisme et caricature d’Arnaud Poitevin, dynamise un récit dans le ton des feuilletons du XIXe siècle. Il s’amuse ici à dessiner, dans leurs primes jeunesses, des personnages qu’il connaît bien, sans leurs ornements habituels de l’âge adulte.
Nous vantions ainsi dans cet article les qualités de la série d’origine dans laquelle les héros croisent Sarah Bernhardt ou Jules Verne : « Rocambole, Rouletabille et Fantômas sont les cousins aînés des Spectaculaires. Sous des auspices aussi vénérables, la série des « Aventures des Spectaculaires » ne peut connaître qu’un succès durable. Ce serait amplement mérité pour une bande dessinée intelligente, lisible et amusante pour tes les âges, dès huit/neuf ans. »
Nous étions déjà enthousiasmés par le travail scénaristique de Régis Hautière : « Régis Hautière a réussi à inventer un Paris Belle Époque réaliste, mais un peu steampunk, par l’intrusion inefficace des inventions de Prosper Pipolet. Il conduit sa comédie policière de main de maître avec une intrigue prenante, des rebondissements, des séquences d’action, dont une mémorable poursuite, dans et sur un train, le tout mâtiné d’un humour omniprésent, de dialogues ciselés à la verve amusée aux références plus ou moins cachés dans de nombreuses cases : du couple d’asiatiques s’essayant au selfie devant la tour Eiffel avec un appareil photographie à soufflet au dénouement devant un parterre de suspects digne d’un roman d’Agatha Christie. »
Il est toujours amusant de découvrir la jeunesse de héros de bande dessinée. Après « Spirou », « Blueberry » ou « Barbe-rouge », « Les Pesctaculaires » ne dérogent pas à cette règle. De jeunes lecteurs, dès l’école primaire se passionneront pour les aventures d’un groupe d’enfants de leur âge, dans un Paris où la butte Montmartre est encore occupée par des moulins. Les plus grands s’amuseront de dialogues divertissants et d’un scénario à rebondissements, tout comme dans les six volumes de la série mère qu’il est toujours agréable de relire à l’occasion.
Laurent LESSOUS (l@bd)
« Les Pestaculaires T2 : Âge bête » par Arnaud Poitevin et Régis Hautière
Éditions Rue de Sèvres (13,00 €) – EAN :  978-2-81020-430-4
Parution 9 octobre 2024