Dix ans après la parution de « Résurrection », la première partie d’un diptyque accouché dans la douleur, voici enfin « Révélations » : conclusion du dernier récit du regretté Philippe Tome, décédé alors qu’il travaillait sur les dernières pages de son scénario. Les éditions Dupuis proposent, enfin, l’intégralité de cette aventure magistralement dessinée par Dan Verlinden, digne successeur de ses deux prédécesseurs : Luc Warnant et Bruno Gazzotti.
Lire la suite...Dans « Pizzica Pizzica », son premier album, Solène Rebière démontre sa maturité graphique et narrative !
Née en 1993, Solène Rebière s’est formée, dès sa plus tendre enfance, aux arts plastiques (notamment la gravure à l’eau-forte et la peinture à l’huile) auprès de plasticiens, de graveurs… ou de dessinateurs de bandes dessinées, comme Emmanuel Lepage ou Christian Rossi, sans intégrer aucune école artistique : ce qui ne l’empêche pas, aujourd’hui, de donner des cours de dessin… « Pizzica Pizzica » est donc son premier album de BD ! Elle y décrit l’oppression subie par une jeune femme de la part d’un habile manipulateur, tout en évoquant le monde de ces danses traditionnelles qu’elle pratique assidûment… et c’est particulièrement réussi et envoûtant !
Son héroïne, Apolline, est une danseuse et chorégraphe qui manque de confiance en elle. Alors qu’elle accompagne une troupe de théâtre en Bretagne, elle tombe sous le charme d’Erwan : un très bel homme plein d’assurance qui va l’entraîner dans une ronde amoureuse et charnelle qu’elle ne va plus pouvoir maîtriser…
Pour elle, Erwan représente très vite un modèle et elle satisfait ses quatre volontés, acceptant ses suggestions les plus incongrues ; tandis que ce dernier n’appréhende absolument pas ses capacités et ne fait donc aucun effort pour s’y adapter, exerçant une emprise de plus en plus énorme sur Apolline, car il veut tout discipliner !
Subjuguée et commençant aussi à avoir un peu peur de le contrarier, la jeune femme se résigne, par exemple, à une sortie en voilier qu’il lui propose : or, cela se révèle une terrible épreuve qui va l’épuiser !
Une tempête déchaîne la mer et cela lui provoque des nausées qui la tordent de douleur et d’angoisse…
Quand le calme revient, comme Erwan insiste pour lui faire l’amour… et comme il ne supporte pas la moindre frustration, Apolline finit par céder.
Par la suite, elle abandonnera même son travail, laissant sans nouvelle la troupe théâtrale qui compte sur elle, pour le suivre dans un voyage en Italie qu’il lui a quasiment imposé.
Après une halte rapide chez ses parents dans la région lyonnaise — qui amènera son compagnon à critiquer sans ambages ses géniteurs —, ils repartent sans perdre une seconde pour Naples. Le couple visite alors la ville italienne de façon intensive, du matin au soir, sans prendre le moindre temps de repos nécessaire… et Apolline n’en peut plus ! Même quand elle se blesse à la main, l’intransigeant Erwan ne l’écoute pas et continue d’imprégner de ses volontés et de ses besoins sexuels tous les instants de leur quotidien : du réveil au sommeil, en passant par les repas…
Lors de leur expédition dans les Pouilles, la jolie chorégraphe décide de partir seule… Elle s’initiera ainsi à la transe explosive d’une tarentelle appelée pizzica. Cette danse populaire italienne datant du Moyen-âge est liée aux pratiques thérapeutiques du tarentisme qui soigne les morsures de la tarentule : les meurtrissures de cette araignée — qui piquait essentiellement les femmes, souvent désespérées par leur condition —, pouvant rendre complètement fou.
Réflexion sur le consentement, mais aussi sur la relation à soi-même, aux autres et au monde, ce récit très bien documenté est sublimé par un dessin plein de grâce où transparaît l’amour de l’autrice pour la danse et pour différents thèmes qui lui sont chers… Un essai qui n’est pas loin d’être un coup de maître !
Gilles RATIER
« Pizzica Pizzica » par Solène Rebière
Éditions Futuropolis (39 €) — EAN : 9 782 9310 7206 6
Tiens, c’est amusant, j’ai d’abord regardé les planches, avant de lire l’article, et je me suis, surtout aux pages 10 et 11, « Y a du Lepage là-dedans… Jusque dans le lettrage ».
Impression confirmée par l’article, donc. Y a pire comme référence.