« Toubab » ou la découverte du Sénégal…

Les éditions Les Aventuriers de l’étrange deviennent Les Aventuriers d’ailleurs et constituent désormais un nouveau label des éditions Bamboo. Le catalogue est constitué d’œuvres étrangères touchant au fantastique, mais pas que ! Il s’agit, pour Marc-Antoine Fleuret (le directeur), de découvrir des univers, des folklores ou d’autres visions du monde, souvent destinées à la jeunesse ; ce qui n’est pas vraiment le cas de la réédition grand format de « Toubab » : prix du meilleur roman graphique en Espagne, en 2019…

Au cœur du récit, Mar, adolescente de 17 ans, qui part plutôt malgré elle au Sénégal participer à une mission humanitaire. D’après la carte présentée en pages de garde, c’est du côté de Saint-Louis du Sénégal que l’on se trouve. Effectivement, c’est à Gandiol, situé à une vingtaine de kilomètres de Saint-Louis, que l’autrice a elle-même participé à une mission humanitaire. Son héroïne, Mar, est alors loin d’imaginer qu’elle part pour une autre culture, d’autres conditions de vie, d’autres rythmes… : l’occasion de découvrir les limites de ses certitudes et la nécessité de se remettre en cause pour adapter, pour apprécier également.

L’héroïne est très vie inquiétée par les « toubab » qui s’approchent d’elle, mais ce terme wolof désignant les Blancs n’est pas péjoratif. Mar est surtout déstabilisée par tout ce qui rompt avec son confort habituel : l’accès à l’eau, à la douche, aux toilettes, l’absence d’internet… La notion d’intimité, pour une adolescente qui plus est, est au cœur de ce qui la trouble, mais également l’âge du mariage, la notion de propriété !

Le rythme d’une journée aussi la perturbe : il lui faut apprendre à prendre le temps, son temps et ce n’est pas facile. Que d’apprentissages et de remises en cause ! Pourtant, petit à petit, comme on peut s’en douter, ce qui lui déplaisait devient ce qui lui plait : la nonchalance, le goût de la fête et de la danse, la spontanéité des rapports, la beauté des paysages…

Graphiquement, l’autrice, Nuria Tamari, use d’un trait très stylisé pour les visages et utilise beaucoup la couleur pour donner forme et relief aux décors, composant ici et là des pleines pages qui sont autant de petits tableaux savoureux. Elle laisse effectivement la part belle à des paysages plein d’atmosphère ou à des scènes de marché tout à fait remarquables et séduisantes. Les tissus des robes des femmes sont ainsi particulièrement bien représentés.

Nuria Tamari, autrice espagnole, a déjà signé « Et le village s’endort » (aux Aventuriers de l’étrange, en 2018) : l’histoire d’un petit village perdu en bordure de forêt où un cadavre a été découvert avec au menu sorcières, loups, corbeaux de fin du monde, cérémonies païennes et anciennes superstitions. Plus récemment, Nuria Tamarit  a réalisé « Géante », chez Delcourt : un conte féministe qui met en scène Céleste. Une géante qui s’épanouit dans son cocon familial, mais découvre aussi  l’hostilité inconnue provoquée par sa différence, ainsi que les injustices causées par la guerre et la religion.

L’album est complété par une interview de Nuria Tamarit qui évoque son séjour au Sénégal et sa vision du voyage au fil de 14 pages très illustrées (dessins, photos). [L@BD-> http://9990045v.esidoc.fr/] et sur Facebook.

Didier QUELLA-GUYOT

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« Toubab » par Nuria Tamarit

Éditions Les Aventuriers d’ailleurs (19,90 €) – EAN : 9782386040030

Parution 21 février 2024

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