N’hésitez pas à revenir régulièrement sur cet article, puisque nous l’alimenterons, jour après jour, avec tout que nous envoient nos amis dessinateurs, scénaristes, coloristes, libraires, organisateurs de festivals et éditeurs pour vous souhaiter de joyeuses fêtes : et ceci jusqu’à la fin du mois de janvier 2024 !
Lire la suite...Steve Cuzor : magistral dans « Le Combat d’Henry Fleming » !
Après son somptueux « Cinq Branches de coton noir » en noir et blanc, publié également aux éditions Dupuis dans la belle collection Aire libre, Steve Cuzor (1) adapte le roman de guerre « The Red Badge of Courage » de Stephen Crane. Paru à l’origine en 1895 et depuis diversement traduit en français (« La Conquête du courage », « L’École du courage », « Le Sceau du courage » ou « L’Insigne [rouge] du courage ») —, ce livre a aussi donné lieu à un célèbre film de John Huston : « La Charge victorieuse », en 1951. Le virtuose dessinateur s’empare ici de ce monument de la littérature américaine au propos extrêmement moderne — puisque même s’il parle de la guerre, il montre surtout la terreur qui accable le combattant lorsque sonne, pour lui, l’heure du corps à corps — et réinterprète la perfection classique de ce récit d’apprentissage avec un remarquable traitement graphique en différentes bichromies.
Par une journée de printemps 1863, pendant la guerre de Sécession, une jeune recrue de 18 ans découvre la réalité du combat : et c’est loin d’être l’héroïsme et le panache dont il rêvait. À l’aube de la célèbre bataille de Chancellorsville, Henry Fleming se remémore les raisons de son engagement, malgré les protestations douloureuses de sa mère mise devant le fait accompli. Maintenant, il s’interroge. Certes, il ne savait pas ce qui l’attendait, mais il a fantasmé la guerre et s’est surtout engagé par idéalisme. Alors que, demain, son régiment va se battre, saura-t-il affronter le danger avec courage, ou réagira-t-il comme un lâche ? : « Bon sang ! Quel genre de soldat suis-je, au fond ? Quel genre d’homme ? », se tourmente-t-il. Jim Conklin, l’un de ses camarades qui vient du même coin de pays que lui, tente de répondre à ses interrogations et à ses doutes, en évoquant l’esprit du bataillon qui permet, une fois le moment venu, de se lancer à l’assaut.
Lors du premier affrontement, les soldats confédérés du Sud sont repoussés dès la première charge, mais se regroupent. Ils attaquent alors de nouveau et font une percée au sein des troupes unionistes. Cependant, Henry espérait une charge beaucoup plus héroïque, sans trop d’ennemis en face et, là, il s’aperçoit que c’est la panique : il n’y a aucune cohésion et les ordres sont contradictoires. Dans la pagaille, il déserte sa position et ne reviendra que lorsqu’il entend un général annoncer la victoire des nordistes. Honteux de sa réaction de poltron, Henry s’échappe dans un bois, non loin du champ de bataille. Dans une clairière, il découvre le cadavre d’un jeune homme : « Bon dieu, je voudrais être mort !! », s’écrie-t-il. Perdu dans cette immense bataille, il va quand même retourner au front et faire, peu à peu, la conquête du courage… tout en se rendant compte que, finalement, la guerre n’est qu’une forme de manipulation mentale et physique !
Dans le roman, c’est Stephan Crane qui est le narrateur et il emploie des mots simples, dont l’effet obtenu est pourtant impressionnant. En revanche, il utilise rarement les dialogues et explique peu la stratégie militaire. Cela a donc obligé le dessinateur de « Blackjack », « O’Boys » ou d’un « XIII Mystery » à réfléchir, entre autres, à la façon de mettre en scène efficacement les mouvements de troupes, mais encore plus à jouer sur les intentions de développement de l’histoire : supprimant par exemple certains passages non essentiels ou analysant les différentes étapes émotionnelles par lesquelles passe le héros pour que le lecteur puisse, lui aussi, les ressentir.
Quoi qu’il en soit, le résultat est époustouflant : tant graphiquement que narrativement ! On a vraiment l’impression de se retrouver au beau milieu de l’enfer du fracas des canons et l’on comprend très bien le combat intérieur de ce jeune homme. Héritier de la bande dessinée réaliste classique des grands maîtres du noir et blanc — qu’ils soient américains, argentins ou évidemment franco-belges (on pense surtout à Jijé, Jean Giraud, Hermann, Christian Rossi…) —, Steve Cuzor met, comme eux, son trait au service du récit : chacune de ses pages démontrant qu’il est tout à fait possible d’insuffler du dynamisme et de la vie dans un dessin descriptif très détaillé, telle la reconstitution historique d’une bataille…
(1) Sur Steve Cuzor voir sur BDzoom.com : « Cinq branches de coton noir » par Steve Cuzor et Yves Sente, « O’Boys », la BD de Steve Cuzor, vient de là, elle vient du Blues !, « O’Boys T.1 : Le Sang du Mississippi »…
« Le Combat d’Henry Fleming » par Steve Cuzor, d’après Stephen Crane
Éditions Dupuis (26 €) — EAN : 9 791 0347 5248 5
Ce qu’il y a de bien avec les copié-collé de cases ou les effets de zoom dans un même dessin (voir les planches montrées), c’est qu’on peut s’amuser à faire le jeu des sept différences : un petit trait en plus ou en moins par-ci, un pli de vêtement ajouter par-là. Et hop, le dessinateur a gagné 20 mn de travail.
Ce qui est dommage dans le cas des zooms/dézoom, c’est que le trait prend ou perd de l’épaisseur et créé une rupture graphique dans le continuum de la planche.
Ce qui est encore plus troublant est que le dessinateur qui recourt à ce genre de subterfuge semble ne pas avoir conscience de l’effet visuel produit ou alors se dit-il que personne ne le remarquera du fait que peu de lecteurs savent regarder un dessin ?
L’un dans l’autre, c’est assez décevant. Je serais curieux d’avoir le point de vue d’un dessinateur sur le sujet et s’il assume la rupture graphique au sein de la planche que représente ce genre de manipulation.
Le très surfait Nice House on the lake en est bourré.
L’âge d’eau de Benjamin Flao regorge d’aquarelles agrandies dont on voit très nettement les différences de textures et de trait. Personnellement, cela me heurte les yeux.
Et je ne parle pas du récent Mr Miracle où, là, toutes les planches sont constituées à partir d’un même dessin copié-collé ou zoomé au prétexte d’un plan fixe.
Ce commentaire est à la fois malfaisant et d’une bêtise abyssale. Je ne vous insulte pas, je vous tiens au courant.
C’est gentil à vous de me tenir au courant.
Mais employer des termes insultants ne démontre rien. Pourriez-vous m’expliquer en quoi ce que j’ai écrit est d’une bêtise abyssale, s’il vous plaît ? Si possible en parlant du sujet sur un plan technique et non en jugeant le propos.
Merci d’avance.
Mon dieu, il suffit de regarder ces pages pour comprendre que « gagner 20 minutes » n’est pas l’objectif premier dans un tel « cahier des charges ». Les zooms avant ou les répétitions d’images ont pour objectif une narration fluide.
Att M. Ratier et M. Filippini : Décès de Alfredo Castelli.
Chers amis de BDzoom l’éditeur S. Bonelli vient d’annoncer la terrible nouvelle de la disparition d’Alfredo Castelli: un des scénaristes les plus renommés depuis les années 70, aussi connu en France (Martin Mystere, Les Gentlemen, Un homme une aventure..). Ca serait sympa de lui dedier un petit hommage sur le site.
Cordialement
F.
Bonjour Fabio…
Henri Filippini s’y est attelé et je m’occuperais de la relecture, puis de la mise en pages comme d’habitude, mais tout cela prend du temps et, en ce moment, l’un comme l’autre, nous sommes très occupés : cela devrait quand même venir bientôt, normalement (rires !)…
Bien cordialement
Gilles Ratier
Je me garderai bien d’émettre une opinion à propos d’un livre que je n’ai pas lu (ou plus exactement : pas encore lu). Mais je peux témoigner que les quelques originaux présentés à l’exposition « Adolescents en guerre » au dernier FIBD d’Angoulême étaient en effet assez impressionnants.
Est-ce que vous voulez parler des originaux de Cuzor ?
Si c’est le cas, avez-vous vu ces fameux copiés-collés ? A quoi ressemble une planche qui en contient ?
Si on est bien gentil avec eux, certains libraires donnent avec l’achat de la BD un fac-similé d’une planche A3 sur papier fort en noir et blanc. Non seulement il n’y a pas d’effet zoom/dézoom, mais ce qui frappe aux yeux, c’est au contraire la grande unicité de style de l’auteur !
Attention à ne pas confondre fac-similé et impression de qualité en noir et blanc. Un fac-similé est en quadri imprimé à partir de scans HD de l’original, même s’il apparaît en noir et blanc. Cela coûte très cher à réaliser, il suffit de voir le prix d’une Artist Edition. Cela m’étonnerait qu’on en offre en cadeau. vous pouvez vérifier avec un compte-fil si une trame quadri apparaît sur la feuille. Si ce n’est pas le cas, c’est une banale impression offset ou une sérigraphie ou impression laser.
Sur arte il y a un documentaire passionnant sur la guerre de sécession , j’ai hâte de lire la BD