Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...Alain Goffin refait son « Plagiat ! »…
Grand Prix RTL de la BD en 1990, « Plagiat ! » ressuscite aujourd’hui. Signé Goffin, Schuiten et Peeters, l’album est entièrement refondu par Alain Goffin — encrage numérique, couleur et lettrage — et complété par un riche dossier signé Charles-Louis Detournay. « Plagiat ! », ou quand une élégante ligne claire raille les dérives de certains milieux de l’art moderne.
La genèse de ce récit de 44 planches remonte à un véritable emprunt technique, dont un ami d’Alain Goffin (le peintre bruxellois Stefan de Jaeger) fut la victime. En effet, ses grandes compositions assemblant de petits polaroïds précédèrentcelles d’un certain David Hockney : lequel avait visité l’une de ses expositions quelques mois auparavant… Impressionnés par le graphisme épuré de Goffin dans l’album « Le Réseau Madou » (1982), Schuiten et Peeters, duo d’auteurs en vue depuis le début de la série des « Cités obscures » (1983), propose le sujet de « Plagiat ! » à leur ami Alain : dessinateur passionné de peinture comme eux. S’inspirant de la mésaventure du peintre bruxellois, dès lors injustement dédaigné comme copieur de Hockney, les deux scénaristes concoctent une histoire sur mesure traitant du sentiment de plagiat, comme des coulisses de la peinture plus généralement : Schuiten réalisant de surcroît les storyboards. Plus de trois décennies après sa sortie aux Humanoïdes associés, « Plagiat ! » paraît dans une nouvelle mouture : fruit de 18 mois de travail graphique.Â
Quid de cette fiction ? Jeune peintre en vue en 1996, l’excentrique Chris Van Meer aimante amateurs et critiques, jusqu’à ce que deux intrus entrent chez lui par effraction. C’est le prélude à la prochaine révélation publique, aux États-Unis, de brillantes compositions d’un nouvel et mystérieux artiste : Tommy Crane. Dès lors, Van Meer s’estime victime d’un plagiat… Excédé, rejeté par ses anciens laudateurs et obsédé par son plagiaire, il porte plainte et s’élève contre cet artiste inconnu dans un combat apparemment vain… Pour autant, l’étonnante conclusion diffère du destin de Stefan de Jaeger…
En fin d’album, un dossier complémentaire à la BD livre la chronologie de Van Meer, se jouant des liens entre fiction et réel. Clin d’œil au travail contemporain de Stefan de Jaeger, des fragments de ses œuvres sont aussi distillés dans cette nouvelle version. Ce récit adulte, moderne et référencé séduira de nouveau les amateurs d’une nostalgique ligne claire,habillée de couleurs sourdes ; ce d’autant que la réalisation de ce bel objet définitif s’avère des plus soignées.
« Plagiat ! » par Alain Goffin, François Schuiten et Benoît Peeters
Éditions Anspach (17 €) — EAN : 978-2-9311-0515-3
La couverture est un bel hommage à celle initiale – refusée par Hergé – pour la Marque jaune de Jacobs.
Bonjour
Le lettrage n’apparaît pas comme une réussite pour cette nouvelle version.
Les phylactères (ceux de 1989) était nettement plus lisibles.
Je suis d’accord. Et même les couleurs d’époque, quoique « vintage », étaient plus réussies, elles créaient une atmosphère bien différente.