Les amateurs de son œuvre le savent bien : Jacques Tardi est un boulimique de travail qui dessine matin, midi et soir. Or, « Dessins matin, midi et soir », c’est le titre d’un beau petit recueil édité par Oblique Art (structure dirigée par Pierre-Marie Jamet) qui nous propose pas moins de 160 pages rassemblant des illustrations réalisées par le créateur d’« Adèle Blanc-Sec », sélectionnées dans les nombreux carnets qu’il a noircis (voire mis en couleurs) tout au long de sa remarquable carrière d’auteur du 9e art : croquis, études de personnages… et même courtes bandes dessinées iconoclastes inédites.
Lire la suite...« The Maxx » de Sam Keith en français : une carence enfin comblée…
C’est en mars 1993 qu’un étrange personnage apparaît dans les comics shops. Loin des clichés et stéréotypes de super-héros, The Maxx, créature imaginée par Sam Kieth pour les éditions Image Comics, est maintenant disponible en France, grâce aux éditions Reflexions.
La couverture du premier comics américain fut un choc visuel. L’énorme corps violet de The Maxx est ramassé sur lui-même et son visage est barré d’une bande jaune, aboutissant sur un rictus tout en dents. De musculeux bras pendants se terminent par d’immenses poings jaunes, chacun prolongé par une imposante griffe. Ce corps massif est accroupi devant une tache rouge au milieu d’une couverture noire. Absolument rien ne peut dévoiler l’histoire et l’univers imaginé par Sam Kieth, lequel se prolongera sur près de cinq ans avec 35 numéros.
Comment peut-on imaginer que ce personnage navigue entre notre monde et un outback australien parallèle, fantasmé ? The Maxx est-il un clochard à la dérive se prenant pour un défenseur des plus faibles ou le hérault de la Reine Léopard ? Cette souveraine qui ressemble étrangement à Julie : l’assistante sociale prenant en charge ce courageux, mais ultra-violent SDF. Il y a une seule constante revendiquée entre les deux univers : Mister Gone, un étudiant en arts mystiques dans l’outback, un violeur en série dans notre monde. Dans les deux univers, il commande une armée de créatures teigneuses : les Isz.
La série « The Maxx » est parue à l’origine en fascicule chez Image Comics et elle fut compilée une première fois chez Wildstorm Productions en cinq volumes, accompagnés d’un supplément comprenant une histoire dérivée : « The Friends of Maxx ». En 2014, l’éditeur IDW Publishing propose à Sam Kieth de reprendre les couleurs de sa série pour une nouvelle intégrale sur un meilleur papier en sept tomes : « The Maxx Maxximized ».
C’est cette édition qui est reprise pour la publication française. Le premier album contient les quatre premiers comics de la série régulière, une introduction par Sam Kieth, la reprise des merveilleuses couvertures peintes et un cahier graphique. Le deuxième tome, annoncé pour septembre, comprendra les comics n° 5 à 8.
Si « The Maxx » reste la création emblématique de Sam Kieth, il participa, en tant que dessinateur, à la naissance d’un autre mythe de la bande dessinée américaine. En effet, c’est lui qui illustra les premiers numéros du « Sandman » de Neil Gaiman, dans l’arc « Préludes et Nocturnes ». C’est peut-être ce qui irrigua le côté onirique de son propre personnage perdu entre les mondes ?
La création de « The Maxx » fut aussi assistée par William Messner-Loebs, pour qui Sam Kieth avait dessiné « Epicurus the Sage ». Ce célèbre scénariste est donc crédité comme script pour « The Maxx ».
Emblématique des années Image Comics (maison d’édition créée par des dessinateurs mécontents de leur statut chez Marvel et voulant avoir tous les droits sur leurs travaux), « The Maxx » est l’un des fleurons de la création des années 1990, avec ce petit quelque chose dans la rondeur du dessin et la mise en page organique de Sam Kieth qui peut renvoyer au grand Vaughn Bodé.
Quoiqu’il en soit, les éditions Reflexions nous offrent une pièce maîtresse de l’histoire des comics.
Brigh BARBER
« The Maxx » T1 par Sam Kieth et Willam Messmer-Loebs
Éditions Reflexions (16,50 €) — EAN : 979-10-93603-95-7
Parution 13 mai 202